La discussion montre à quel point ce projet de loi vise à interdire l'accès à notre territoire plutôt qu'à le réglementer. Nous sommes bien dans l'esprit des lois votées en session extraordinaire : de même que le texte relatif au service minimum avait plutôt pour objet de décourager les personnes désireuses de faire grève, les dispositions dont nous débattons tendent à décourager celles qui souhaitent venir en France. C'est pourquoi, d'ailleurs, elles revêtent un caractère anticonstitutionnel. Je rappelle à ce sujet la décision du Conseil constitutionnel du 13 septembre 1993 :
« Les étrangers dont la résidence en France est stable et régulière ont, comme les nationaux, le droit de mener une vie familiale normale ; […] ce droit comporte en particulier la faculté pour ces étrangers de faire venir auprès d'eux leurs conjoints et leurs enfants mineurs sous réserve de restrictions tenant à la sauvegarde de l'ordre public et à la protection de la santé publique, lesquelles revêtent le caractère d'objectifs de valeur constitutionnelle ; […] il incombe au législateur, tout en assurant la conciliation de telles exigences, de respecter ce droit. »
Par ailleurs, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, qui s'impose, me semble-t-il, au législateur, consacre, dans son article 8, le « droit au respect de la vie privée et familiale » pour toute personne résidant dans un État partie :
« Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. »
Tel est le sens de notre amendement.