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Intervention de Valérie Létard

Réunion du 11 février 2009 à 21h30
Réforme de l'hôpital — Reprise de la discussion

Valérie Létard, secrétaire d'état chargée de la solidarité :

Mesdames et messieurs les députés, comme l'a souligné Jean-Marie Rolland, l'enjeu des ARS, au-delà des textes et des mécanismes, sur lesquelles je reviendrai, est bien de mettre fin au cloisonnement entre les différents acteurs qui contribuent à la santé de nos concitoyens, et d'assurer une véritable imprégnation réciproque des cultures sanitaire et médico-sociale.

Dans le même esprit, Mme Bérangère Poletti a souligné l'importance non seulement de préserver les acquis du secteur médico-social en termes d'approche personnalisée ou du rôle privilégié des usagers et des associations, mais aussi d'en faire également bénéficier le champ sanitaire. Le vieillissement de la population n'est pas seulement un défi pour le secteur médico-social, c'est aussi un défi pour l'hôpital.

Pour mettre enfin en oeuvre cet objectif de décloisonnement, le principe de la création des ARS fait dorénavant consensus sur les bancs de votre assemblée, et je m'en réjouis. J'ai notamment entendu Mme Génisson et M. Rogemont en reconnaître la nécessité.

M. Domergue et M. Spagnou ont souligné tout l'intérêt que présente, pour répondre aux besoins de santé d'une population vieillissante, la réorientation de l'activité des hôpitaux de proximité vers le champ médico-social. Pour accompagner ce mouvement qu'impose la démographie, il faut rassembler, dans une main unique, l'ensemble des enveloppes et réaliser les transferts financiers nécessaires. C'est précisément ce que permettra la création des ARS.

Mme Ameline a bien montré combien la création de ces nouveaux établissements médico-sociaux, destinés à faire face à des besoins considérables, était également un facteur de dynamisme pour notre économie, dans la mesure où elle est porteuse de créations massives d'emplois, qui plus est harmonieusement répartis sur l'ensemble du territoire et par définition non délocalisables. Cette année, par exemple, le champ médico-social créera plus de 20 000 emplois, pour répondre à des besoins démographiques et augmenter les moyens en personnels, notamment dans les maisons de retraites.

À cet égard, le secteur médico-social n'est pas le petit Poucet des ARS : prise dans sa globalité, l'enveloppe médico-sociale sera l'enveloppe la plus importante directement gérée par les ARS. Ce secteur représente en effet 700 000 emplois et plus d'un million de places pour personnes âgées et handicapées.

M. Préel s'est interrogé sur l'opportunité de l'intégration du champ du handicap dans les ARS et il a exprimé certaines réserves sur ce point. Nos politiques publiques sont orientées vers la gestion décloisonnée des champs du handicap et de la dépendance des personnes âgées. Même si j'ai pu apprécier la logique de sa démonstration, il n'en demeure pas moins qu'il aurait été contre-productif de séparer les deux secteurs. De façon très concrète, c'est bien par l'intégration à l'ARS que pourra s'accélérer la démarche de prise en charge dans des structures médico-sociales adaptées des personnes atteintes de pathologies psychiques stabilisées, pour lesquelles l'hôpital psychiatrique n'est pas forcément la solution la plus adaptée.

M. Mothron a souligné tout l'intérêt que présente le remplacement de la procédure actuelle des CROSMS par les appels à projets. En effet, actuellement, les promoteurs des projets ne savent pas, au moment où ils les déposent, s'ils s'inscrivent ou non dans la réponse aux besoins des personnes âgées ou handicapées. Même lorsqu'ils obtiennent l'avis favorable du CROSMS, les projets ne sont pas assurés d'être retenus et financés par l'autorité publique compétente. La confusion actuelle du dispositif avec ces listes d'attentes sans fin et sans perspective, loin de favoriser l'expression de la capacité d'initiative, enferme et limite celle-ci dans un ensemble d'incertitudes et d'opacités peu satisfaisant.

L'appel à projets deviendra, au contraire, la procédure finale d'une démarche cohérente : les besoins seront d'abord évalués dans le cadre de la conférence régionale de santé, à laquelle seront associés tous les acteurs, puis la programmation pluriannuelle des moyens sera déterminée dans le cadre des programmes régionaux d'accompagnement pour les personnes âgées et handicapées.

La procédure d'appel à projets, qui interviendra sur la base des besoins déterminés collectivement et des moyens disponibles, permettra de sélectionner et de financer sans délai les projets présentant la meilleure réponse aux besoins, au meilleur coût pour les usagers et la collectivité. Le gain de temps sera considérable, alors que des milliers de projets attendent aujourd'hui des années avant d'être mis en oeuvre. Les projets pourront être comparés entre eux sur la base d'un cahier des charges clair, qui permettra de sélectionner le mieux disant.

Certains craignent que l'innovation ne s'en trouve pénalisée. À mon sens, il n'en sera rien. En effet, dans le domaine de la recherche, de l'enseignement et de la culture, les appels à projets sont une procédure courante et ils n'ont jamais empêché l'émergence de l'innovation, bien au contraire. Aujourd'hui, il est souvent impossible de présenter un projet innovant, qui consisterait à créer, par exemple, une véritable plateforme de services associant des services de téléassistance, une unité d'hébergement Alzheimer, une structure d'accueil de nuit ou de jour et un service de soins infirmiers à domicile. Avec Roselyne Bachelot, nous voulons que, demain, cela soit possible, car ces structures globales sont celles des établissements du XXIe siècle. De même, pour ce qui est de l'autisme, les promoteurs doivent pouvoir explorer de nouvelles approches de prise en charge.

Je ne suis pas certaine qu'il soit opportun de réserver, dans la loi, une procédure spécifique aux appels à projets innovants, puisque le cahier des charges des appels à projets, qui sera défini par décret, fera l'objet d'une large concertation des acteurs – je m'y engage – et permettra, dans tous les cas, de proposer des offres innovantes. Mais je suis bien entendu ouverte à la discussion sur ce point sensible.

À propos de la prise en charge des personnes âgées dépendantes, M. Colombier a souligné l'importance de la permanence des soins et du maillage du territoire par la médecine de ville, afin de permettre, le plus souvent possible, le maintien à domicile, qui est un objectif de premier rang de nos politiques publiques. Il a par ailleurs rappelé, à juste titre, combien il est important, pour la collectivité et pour les personnes âgées, que ce soit en termes sanitaires, humains ou financiers, d'éviter le passage aux urgences, souvent si traumatisant.

À cet égard, la création des ARS n'est certes pas une solution miracle qui résoudra tous les problèmes comme par magie, mais elle offre incontestablement l'opportunité de bénéficier enfin d'une vision cohérente de l'ensemble des dispositifs de prise en charge, aujourd'hui éclatés entre de multiples instances de décision. Ainsi, le développement de politiques de prise en charge par filière, pour la maladie d'Alzheimer par exemple, pourra faire l'objet d'une réflexion dans le cadre des agences.

De nombreux parlementaires ont fait des propositions pour doter l'ARS d'outils permettant d'orienter l'installation des professionnels de santé vers les zones les moins bien dotées, y compris en réduisant l'installation dans les zones définies comme « surdenses ». Ainsi que nombre d'entre vous l'ont souligné, enrayer le développement des déserts médicaux et paramédicaux dans les zones rurales et dans les zones urbaines sensibles est une véritable nécessité. Élue du Nord, je suis très sensibilisée à cette question, puisque, dans ma région, les effectifs de médecins spécialistes ou d'infirmiers sont souvent inférieurs de moitié à la moyenne nationale, de sorte qu'il n'est plus possible de faire face notamment aux phénomènes liés au vieillissement.

Enfin, et cela m'amène à sortir quelque peu du secteur médico-social, je souhaite remercier Nicole Ameline et Bérangère Poletti pour leurs interventions en faveur d'une meilleure prise en charge de la contraception. Permettez à la secrétaire d'État aux droits des femmes que je suis de se féliciter de la vigilance des parlementaires sur ce sujet, qui reste toujours d'une brûlante actualité et sur lequel je sais que ma collègue Roselyne Bachelot reste entièrement mobilisée.

En conclusion, le titre IV du projet de loi et les agences régionales de santé englobent l'ensemble de la politique médico-sociale, laquelle représente un million de places en établissement et dans les services, ce qui est considérable. Grâce à cet outil qui permettra de tenir compte de la réalité de chaque territoire, le maillage du territoire national sera le plus équitable et le plus adapté possible. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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