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Intervention de Pierre-Alain Muet

Réunion du 16 juillet 2007 à 15h00
Débat d'orientation budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet :

…car on ne construit pas une économie dynamique en la fondant sur l'héritage. Comme l'écrivait Philippe Frémeaux et ainsi que l'a rappelé mon collègue Jean-Pierre Brard dans un débat précédent, « une société où le pouvoir se transmet sans avoir à faire preuve de mérite a un petit goût d'ancien régime ; c'est une société condamnée à la croissance lente où les rentiers l'emportent sur les créateurs ». Je crois qu'on retrouve cette expression dans la bouche de beaucoup de chefs d'entreprises, même de grandes entreprises, qui considèrent que fonder l'essentiel de la transmission d'entreprise sur l'héritage n'est pas la meilleure façon de construire une économique dynamique.

Aucune de ces mesures n'est susceptible d'accroître réellement l'offre potentielle de notre économie qui en a pourtant bien besoin. Je rappelle que nous avons 30 milliards de déficit extérieur, ce que notre pays n'a jamais connu dans le passé.

Pour développer la croissance potentielle, il serait plus pertinent d'utiliser autrement ces 13,6 milliards de cadeaux fiscaux. Par exemple, comme nous le proposions, nous socialistes, en investissant massivement dans la recherche et dans l'enseignement supérieur. Ou en favorisant l'innovation et l'investissement, notamment par la modulation du taux de l'impôt sur les sociétés en faveur des bénéfices réinvestis. Ou encore en mettant l'accent sur l'entrée des jeunes dans la vie active, car ceux pour qui travailler plus pour gagner plus a un sens sont bien les jeunes qui attendent d'entrer dans la vie active.

Au lieu de cela, votre « paquet fiscal » comporte, au mieux, des mesures de pouvoir d'achat – Mme la ministre ne s'en est d'ailleurs pas cachée durant nos débats –, mais à destination de ceux qui n'en ont pas forcément le plus besoin.

Il en restera peut-être une relance par la demande. Et encore, ce ne sera pas la plus efficace car les cadeaux fiscaux qui vont aux plus fortunés de nos concitoyens ne sont pas ceux qui ont l'impact le plus évident sur la consommation.

Et encore faut-t-il, pour que l'effet reste positif, que l'État ne reprenne pas demain ce qu'il donne aujourd'hui – le rapporteur général a lui-même utilisé cette formule –, comme cela s'est produit de 2002 à 2006 où, après une baisse de l'impôt sur le revenu, les prélèvements obligatoires ont augmenté. Si vous compensez à terme ces cadeaux fiscaux par une hausse de la TVA, ce serait profondément injuste, inégalitaire – le « paquet fiscal » l'est déjà –, mais aussi fortement négatif sur la croissance et l'emploi.

Enfin, à une époque où l'Europe est en train de retrouver une croissance forte, qui était de 2,7 % en 2006 – la France étant à la traîne –, et qui pourrait, selon la prévision commune de trois instituts de conjoncture, être proche de 3 % cette année, vous commettez la même erreur que celle qui a conduit à la dérive et à la persistance des déficits à partir de 2002.

En privilégiant, dès le début de la législature, les cadeaux fiscaux au détriment d'une réduction rapide de la dette et des déficits − vous prévoyez en effet que la dette ne reviendra à 60 % du PIB qu'à la fin de la mandature, et les déficits resteront relativement importants en 2007 et en 2008, proches de ce qu'ils sont actuellement −, vous courez le risque d'être incapables de faire face à un éventuel ralentissement de l'activité économique mondiale ou européenne. Monsieur le ministre, votre politique économique n'est donc pas seulement injuste : elle risque d'être profondément inefficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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