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Intervention de Charles de Courson

Réunion du 16 juillet 2007 à 15h00
Débat d'orientation budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Il s'est engagé à ramener le déficit à 2,4 % du produit intérieur brut en 2007 – ce qui représente à peu près 2 milliards d'économies – puis à 2,3 % en 2008 – encore 2 milliards supplémentaires. Il a également promis de faire repasser le ratio de dettes sous le seuil des 60 %, et de ramener le solde public à l'équilibre au plus tard en 2012, mais si possible dès 2010.

Le groupe Nouveau Centre approuve ces objectifs. Mais si nous voulons les tenir, il faut rompre avec des pratiques inadaptées à la situation de nos finances publiques et être convaincus que nous devons faire des efforts comparables à ceux consentis par tous nos partenaires communautaires. La France est devenue une anomalie en Europe.

Ce redressement dépend largement de la croissance française. Cessons de nous raconter des histoires ! Au cours des cinq dernières années, la croissance française a tourné autour de 1,5 %, alors qu'elle se situait à un peu plus de 2 % auparavant. Elle a constamment décru. Cet état de fait s'explique par deux raisons majeures.

La première réside dans l'ampleur du déficit des finances français qui est d'une tout autre nature que celui de l'Allemagne, par exemple. Le déficit français est massivement imputable à des dépenses de fonctionnement ; celui de l'Allemagne est davantage creusé par des dépenses d'investissement. En France, sur 42 milliards de déficit budgétaire, 22 milliards sont liés au fonctionnement. Quant à celui de la sécurité sociale, c'est entièrement un déficit de fonctionnement.

Ne vous étonnez pas si à force de ponctionner l'épargne nationale pour alimenter un déficit de fonctionnement, vous assistiez à une chute du taux de croissance. De combien ? De l'ordre de 0,5 point sur la moyenne période. Pourquoi ? En divisant 2,5 ou 3 % par un coefficient de capital de 4, on obtient, grosso modo, la réduction de la croissance française : un demi – point…

Deuxième cause de la baisse du taux de croissance : la baisse de la compétitivité internationale de nos entreprises qui, de ce fait, perdent des parts de marché. Au cours des cinq dernières années, on peut estimer que ce facteur nous a coûté environ 0,5 à 0,6 point de croissance par an.

Donc, si nous voulons regagner le point de croissance qui nous manque pour essayer de gérer avec sagesse nos dépenses publiques et améliorer fortement le niveau de chômage – c'est-à-dire le faire tomber à 4,5 ou 5 %, performance des pays les mieux gérés en Europe – il faut chercher à redresser la compétitivité des entreprises : favoriser la recherche, l'innovation, l'assouplissement des relations sociales, etc.. C'est cela qui permettrait de gagner deux fois 0,5 point et de passer de 1,5 à 3 % de croissance annuelle.

Dans le rapport qui, hélas, ne nous a été remis que ce matin, le rapporteur général le montre très bien : avec un taux de croissance de 3 % et une gestion rigoureuse, nous atteindrions l'équilibre budgétaire en 2010, sans problème ! En revanche, si nous tombons à moins de 2 % comme cela a été le cas, en moyenne, ces cinq dernières années, les choses deviendront extrêmement difficiles.

Monsieur le ministre, il semblerait que vous envisagiez de retenir un taux de croissance d'environ 2,5 % pour l'année prochaine. C'est une hypothèse optimiste, plutôt en haut de la fourchette des prévisions. En effet, nous avons réalisé 1,2 % en 2005, 2,1 % en 2006 et actuellement les évaluations se situent entre 2,1 % – selon l'INSEE – et 2,4 % – pour les plus optimistes.

Or il ne s'agit pas de se focaliser seulement sur 2008, mais de tenir dans la durée avec un taux de croissance beaucoup plus élevé que ces dernières années. Monsieur le ministre, je vous conseillerais donc de faire l'inverse de vos prédécesseurs : retenez systématiquement l'hypothèse la plus basse ! Ne pensez pas, comme vos prédécesseurs, qu'afficher un taux de croissance plus élevé que raisonnable modifie le comportement des acteurs économiques. Il n'en est rien. Les acteurs économiques n'attendent pas que le ministre des finances leur annonce le futur taux de croissance. Alors, soyez prudent et dites que vous retenez l'hypothèse la plus basse, et que tout ce qui viendra en plus, nous l'affecterons à la réduction du déficit budgétaire.

À ce stade, j'aimerais vous citer un passage du rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques. Je voudrais mettre cet excellent extrait en résonance avec votre objectif, monsieur le ministre : diviser par deux le taux de croissance en volume de la dépense publique – État, sécurité sociale, et collectivités territoriales.

« Malgré l'infléchissement de 2006, l'augmentation moyenne des dépenses a été plus forte au cours des cinq dernières années (2,6 % par an en volume) qu'au cours des cinq précédentes (1,8 %). La croissance des dépenses n'a donc manifesté aucune tendance de fond au ralentissement sur la période récente en dépit des objectifs annoncés. » La note de bas de page, où se trouve toujours l'essentiel dans les rapports de la Cour des comptes, précise : « Depuis 2000, – vous voyez que tout le monde est concerné ! –, tous les programmes de stabilité ont retenu des objectifs de progression des dépenses compris entre 0,3 % et 1,3 % par an en volume. » Mais n'ont jamais été respectés…

Si nous voulons effectivement redresser les finances publiques, il faut donc amorcer une véritable rupture dans leur gestion. S'agissant du budget pour 2008, monsieur le ministre, vous n'y parviendrez pas si, comme je vous l'ai dit en d'autres lieux, vous ne tendez pas à une progression « zéro valeur » pour ce qui concerne les dépenses de l'État. Vous m'aviez répondu que cet objectif était atteint dès lors que l'on retranchait les augmentations spontanées, notamment de la dette. Or, mes chers collègues, le rapport de M. Carrez et celui de la Cour des comptes le montrent bien : n'espérez plus une baisse des taux d'intérêt ! Bien au contraire, ceux-ci augmentent et portent sur un stock de dette lui aussi croissant. Pour 2008, l'ordre de grandeur actuellement avancé est de 1,8 milliard d'euros, soit entre 1,5 milliard et 2 milliards selon l'évolution des taux d'ici à la fin de l'exercice.

Certains de nos collègues pensent que l'objectif du « zéro valeur » est irréaliste : je les invite à consulter le rapport de la Cour des comptes, qui montre que, chez la plupart de nos partenaires, la part de la dépense publique dans la richesse nationale a rapidement baissé.

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