Monsieur le président, madame la ministre de la santé et des sports, mes chers collègues, il y a maintenant vingt ans, en 1988, un médecin de renom, le sénateur Claude Huriet, a proposé un cadre tout à fait nouveau, celui de la recherche interventionnelle avec risques. Ce cadre, qui permettait une meilleure protection des personnes, était nécessaire et a constitué une avancée, tant pour les chercheurs que pour les malades.
Depuis, plusieurs textes, parfois un peu contradictoires, se sont empilés : la directive européenne de 2001, la loi Kouchner de 2002, les deux lois de 2004 respectivement relatives à la santé publique et à la bioéthique, et la loi de recherche de 2006.
Pratiquement, il existe trois types de recherches.
D'abord, la recherche interventionelle avec risques. À l'automne dernier, en Angleterre, un jeune est mort d'une insuffisance rénale dans le cadre d'une recherche.
Ensuite, la recherche interventionnelle avec risques négligeables, voire sans risques. C'est précisément à cause de cette recherche sans risques que je me suis intéressé à la question. Dans mon service de chirurgie, nous nous sommes mis en effet, voilà quatre ans, à la chirurgie percutanée, qui ne nécessite qu'une petite incision. Les coupes osseuses auxquelles il est procédé sont maintenues par des plâtres et des pansements. La technique originale est quantifiée. Mais nous avons souhaité ajouter deux vis. C'est alors que j'ai compris la difficulté d'établir un protocole de recherche avec deux séries homogènes.
Enfin, la recherche observationnelle. Il s'agit d'examiner deux groupes de patients, par exemple des enfants de la capitale régionale d'Amiens et des enfants de mon village de Remiencourt dont les conditions de vie sont différentes, ainsi que l'environnement. Dans vingt ans, constaterons-nous plus de risques cardiovasculaires dans un groupe que dans l'autre ? La recherche observationnelle est importante pour la France, car nous sommes compétitifs dans ce domaine. Mais dans quelques années, des pays d'Extrême-Orient, ou d'Orient, nous battront sur la loi du nombre. Lorsque nous ferons une série avec un million de personnes, eux pourront la faire avec dix millions, voire cent millions de personnes. Il faut donc agir.
Cette proposition de loi vise à donner un cadre unique à toute recherche en médecine, avec un avis obligatoire des comités de protection des personnes. Le texte déclare en outre solennellement que le développement de la recherche sur la personne constitue une priorité nationale.
Le deuxième objectif de la proposition de loi est de procéder à une classification des différents types de recherches. Il y a la recherche biomédicale avec risques, classiquement appelée loi Huriet, qui est parfaitement quantifiée, bien rodée et qu'il ne faut en aucun cas modifier – déclaration au comité de protection des personnes, au niveau de l'AFSSAPS et de la CNIL.
Pour ce qui est de la recherche interventionnelle sans risques ou avec risques négligeables, c'est en réalité l'extension de la procédure visant à évaluer les soins courants prévue par la loi de 2004 que l'on pourra prolonger jusqu'aux recommandations des sociétés savantes.
Pour la recherche observationnelle, officiellement il n'y pas vraiment de texte. Mais il est extrêmement compliqué de respecter les cinq textes empilés : il faut faire à la fois à la CNIL, au CPP, à l'ARH, au ministère de la recherche et enfin une déclaration au CCTIRS. Je citerai l'exemple de la grippe, qui, au passage, tue chaque année un million de personnes dans le monde. Imaginez la lourdeur de la procédure si vous voulez simplement observer comment va se propager le virus dans une famille où un seul membre est atteint tandis que les autres portent un masque !
Pour les collections biologiques, c'est encore pire, car deux lois se télescopent, ce qui rend très difficile leur utilisation. À l'Assistance publique de Paris par exemple, il y a environ 900 congélateurs remplis de collections biologiques. Actuellement, les laboratoires doivent déclarer la totalité des collections au comité de protection des personnes pour savoir s'ils ont le droit de stocker et de préparer ces collections. Ils doivent faire également une déclaration au ministère de la recherche. Et, dans le même temps, chaque collection doit être déclarée au CPP avec le consentement et le protocole. Vous pouvez constater que c'est compliqué.
Le troisième objectif de la proposition de loi est de clarifier, d'harmoniser et de simplifier les procédures de recherche.
Simplifier le consentement. Je propose trois types de recherche : une recherche interventionnnelle avec risques, pour laquelle le consentement écrit est indispensable, une recherche interventionnelle sans risques ou avec risques négligeables, où le consentement éclairé est indispensable, une recherche observationnelle, qui requiert une information avec possibilité de refus de la personne.
Enfin, pour les collections, il faut supprimer le télescopage entre les deux lois de bioéthique et de santé publique. Il ne faut laisser que la déclaration de la totalité des collections au ministère de la recherche et supprimer celle qui est redondante au niveau des CPP.
Certains poseront peut-être la question : pourquoi faire une loi sur la recherche, alors que l'on va commencer la révision des lois relatives à la bioéthique ? Ce n'est pas du tout pareil. Une loi de recherche est une loi organisationnelle. Historiquement, cela a toujours été ainsi. On a toujours fait des lois distinctes en ces matières. La loi de révision bioéthique répond à des questions différentes. Doit-on faire des recherches sur les gamètes, sur les embryons, par exemple ? Il s'agit de prendre en compte un problème moral et éthique. Ma proposition de loi vise uniquement à organiser la recherche française. En cette période de crise majeure, …