Ces rapports nous apprennent que la fiscalité du patrimoine des ménages est plus élevée en France que dans le reste de l'Europe – étant à peu près à égalité avec celle en vigueur au Royaume-Uni. Prétendre que la fiscalité favoriserait, en France, les ménages les plus fortunés est-il inexact puisque la fiscalité du patrimoine est plus élevée chez nous. Monsieur Cahuzac, nous avons déjà évoqué le sujet à plusieurs reprises : je n'y reviens pas, mais ce fait éclaire d'un jour différent notre débat sur le bouclier fiscal.
En ce qui concerne certains aspects techniques, notamment les erreurs que j'aurais pu, selon vous, commettre sur le bouclier fiscal, dont le caractère totalement original et exclusif le ferait entrer dans le patrimoine fiscal français, je tiens à affirmer que c'est faux. On a évoqué l'Allemagne : la Cour constitutionnelle allemande a bien fait application du plafonnement à 50 % – c'est ainsi qu'on nomme le bouclier en Allemagne –, laquelle a entraîné la suppression de l'ISF. Je tiens par ailleurs à votre disposition des informations sur l'Espagne et la Finlande. Dans ces deux pays existait un plafonnement des impôts directs qui s'appliquait à l'impôt sur le revenu et à l'équivalent de l'ISF – c'était du reste la même chose en Irlande – : or ces plafonnements ont existé dans chacun de ces pays aussi longtemps que l'impôt sur la fortune y a été conservé. Lorsque la Finlande, en 2006, a décidé de supprimer l'ISF, elle a supprimé le bouclier fiscal. L'Espagne a fait de même en 2008.
Enfin, comme vous le savez, puisque vous connaissez très bien la question, l'équivalent du bouclier fiscal existe toujours dans deux pays nordiques : le Danemark et la Suède. Ce plafonnement couvre, au Danemark, l'impôt sur le revenu national, l'impôt communal et la taxe de santé et, en Suède, l'impôt national et l'impôt communal. Certains pays ont donc bien conservé le bouclier fiscal et ceux qu'ils l'ont supprimé ne l'ont fait que parce qu'ils supprimaient corrélativement l'impôt sur la fortune.
Monsieur Muzeau, vous me donnez des leçons en matière de niches fiscales. Dois-je rappeler que c'est nous qui les avons données puisque nous avons, dans un premier temps, tenté de supprimer les niches fiscales ? Cela n'a pas été possible en raison d'un certain recours devant le Conseil constitutionnel, qui ne nous a pas facilité la tâche. Nous sommes revenus à la charge et la majorité a réussi à faire adopter le plafonnement global des niches fiscales.