Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean-Luc Warsmann

Réunion du 25 juin 2009 à 15h00
Rémunération des mandataires sociaux dans les sociétés anonymes — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Warsmann, président de la commission des lois :

Je tiens avant tout à dire un grand merci au groupe Nouveau centre, à son président et à M. de Courson, qui a rapporté cette proposition de loi. Elle porte sur un sujet très important : il ne s'agit même pas de la question de la légalité des rémunérations de certains dirigeants, mais de leur illégitimité.

La crise a fait naître ces derniers mois, chez nos concitoyens, le sentiment que le niveau des rémunérations de certains dirigeants d'entreprise, rémunérations qu'ils se sont auto-attribuées entre membres d'un même groupe, était totalement illégitime.

Autant nos compatriotes, dans leur immense majorité, admettent que celui qui entreprend, qui travaille, qui risque et qui a du talent, gagne de l'argent, autant ils ne comprennent pas certaines situations où les rémunérations défient tout sens commun – dépassant tout ce que peut espérer gagner un salarié français travaillant normalement – et sont accordées même dans les cas où les responsabilités ne sont pas assumées avec succès. C'est un véritable problème.

J'ai eu l'occasion d'intervenir, comme je l'ai dit à Mme la secrétaire d'État, il y a quelques semaines, lors d'une réunion sur le sujet, et j'ai prononcé la phrase suivante, que je répète, parce qu'elle correspond à ce que je pense vraiment : je suis persuadé que nombre de nos concitoyens ont envie de vomir lorsqu'ils entendent le montant des rémunérations de certains dirigeants de grandes sociétés.

Aussi, je remercie le groupe Nouveau Centre de sa proposition. Elle est légitime et elle traite d'un vrai sujet, mettant en danger notre pacte social.

La commission des lois s'est emparée de ce sujet. Elle a créé il y a quelques mois une mission sur les nouvelles régulations de l'économie, que j'ai l'honneur de présider et qui a défini trois chantiers. Le premier, pour lequel le rapporteur est Philippe Houillon, porte sur les abus de rémunération des dirigeants. Le deuxième, pour lequel le rapporteur est Sébastien Huyghe, traite des problèmes de réglementation bancaire, en grande partie à l'origine de ce qui s'est passé aux États-Unis. Le troisième porte sur les paradis fiscaux.

Le premier chantier est en voie d'achèvement et notre collègue rapporteur va rendre son travail dans les prochains jours. C'est pourquoi j'appellerai à voter la motion de renvoi en commission de Jean-Michel Clément. Je ne suis pas là pour dire ce que va décider la mission – ce ne serait pas loyal – mais seulement pour vous fournir certains éléments.

D'abord, nous avons été très déçus par le code de régulation interne MEDEF-AFEP. Nous avons reçu Mme Parisot, qui a déclaré n'avoir ni les moyens ni la volonté de faire respecter le code de régulation.

Par ailleurs, donnant acte à M. de Courson de son travail approfondi, je relève qu'il a fourni en annexe de son rapport la composition des comités des rémunérations des sociétés du CAC 40. Cette composition donne une impression de « petits arrangements entre amis », en tout cas d'endogamie. Les comités des rémunérations ne semblent donc pas non plus être un bon outil de régulation.

S'agissant des administrateurs indépendants, l'un de nos grands chefs d'entreprise, pour lequel j'ai beaucoup de respect car c'est un entrepreneur qui fait honneur à notre pays, nous a dit : « Lorsque j'ai un administrateur indépendant dans mon groupe, si je n'en ai pas fait un ami et un allié en quelques semaines, c'est que je m'y suis vraiment mal pris ! » Par conséquent, le recours à l'administrateur indépendant supposé avoir un regard extérieur ne me semble pas non plus être la bonne solution.

Nous devrons donc faire des propositions. La mission va y travailler, et nous n'écartons pas l'aspect fiscal des choses. Aujourd'hui, les rémunérations versées aux mandataires sociaux n'entrent pas dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Nous nous posons la question de savoir si, au-delà d'un certain niveau, ces montants ne devraient pas être fiscalisés. Nous serions alors dans la logique du rapporteur, qui vise à responsabiliser les actionnaires afin qu'ils ne laissent pas faire ces petits arrangements entre amis et que disparaissent les rémunérations sans aucun rapport avec la réalité économique.

Je ne vous appelle pas à voter la motion de renvoi en commission pour enterrer le sujet. Au contraire, nous allons nous saisir de cette question avec beaucoup d'énergie dans les jours à venir. Je rends à nouveau hommage au groupe Nouveau Centre, parce que c'est vraiment une question qui, si nous ne la résolvons pas collectivement, posera de gros problèmes dans notre société. Nos concitoyens salariés ne comprendraient pas qu'au niveau national, on ne trouve pas de régulations pour ce type de problème. Cela étant, et je le dis sans vouloir être discourtois, je pense que cette proposition a un caractère partiel. Je souhaite qu'elle soit renvoyée en commission pour nous donner le temps d'approfondir la réflexion. J'espère que nous saurons nous rassembler, avec l'ensemble du groupe Nouveau Centre, dans les jours à venir lorsque la mission commencera à arrêter ses propositions.

Voilà pourquoi je vous appelle, mes chers collègues, à voter la motion de renvoi en commission de Jean-Michel Clément.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion