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Intervention de François Rochebloine

Réunion du 10 octobre 2007 à 15h00
Lutte contre la corruption — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur dont je salue l'excellent travail, mes chers collègues, lorsqu'à la fin du mois de juillet, j'étais intervenu, au nom du groupe Nouveau Centre, dans la discussion du projet de loi autorisant la ratification du protocole additionnel à la convention du Conseil de l'Europe contre la corruption, j'avais eu l'occasion de rappeler à quel point celle-ci était, dans les affaires publiques comme dans les affaires privées, une drogue dangereuse. Je m'étais réjoui de la part prise par la France au développement des moyens de lutte contre ce fléau. Je ne peux, dès lors, que saluer avec satisfaction un projet de loi qui assure la transcription dans notre droit interne des engagements internationaux de la France, parmi lesquels figure le protocole additionnel dont je viens de parler.

Dans la démocratie telle que notre tradition nationale la conçoit, la vertu, pour parler comme Montesquieu, a toujours été considérée comme le ressort de la vie politique et sociale. C'est sans doute pourquoi la législation française a été historiquement à l'avant-garde de la lutte contre la corruption, que ce soit la corruption des fonctionnaires et agents publics ou celle des personnes privées. C'est pourquoi les actes de corruption des personnes investies d'une fonction publique sont sanctionnés dans notre droit par des peines particulièrement lourdes, pouvant aller jusqu'à dix ans d'emprisonnement. Des événements récents ont donné une actualité nouvelle à cette préoccupation traditionnelle. Il est essentiel que les citoyens de notre pays soient convaincus et vérifient dans les faits que les comportements de corruption, quels qu'en soient les auteurs, sont effectivement poursuivis et punis. Je ne peux que souscrire aux propos qu'ont tenus à ce sujet le président de la République et, sur un autre registre de responsabilité, la présidente du MEDEF.

Notre détermination à adapter notre droit aux exigences nouvelles de la répression de la corruption renforce la crédibilité de l'action internationale de la France dans ce domaine. Notre pays a été véritablement à la pointe de la lutte. Après avoir été le premier du G8 à avoir ratifié la convention des Nations unies dite de Mérida, la France a été la première à introduire dans son droit interne, par la loi du 30 juin 2000, le délit de corruption d'agent public international.

Le débat de juillet dernier, auquel je faisais allusion tout à l'heure, avait déjà fourni l'occasion de récapituler les divers engagements internationaux souscrits par la France, que ce soit sous l'égide des Nations unies ou dans le cadre du Conseil de l'Europe. La présente discussion se situe donc dans une grande continuité politique.

La corruption est un phénomène vieux comme le monde. Tel un parasite, la corruption épouse et accompagne la complexité croissante des mécanismes économiques et trouve dans l'ouverture, par ailleurs bénéfique, des échanges internationaux de biens et de services une occasion de se répandre et de s'organiser avec ampleur et efficacité. Autant internationale que nationale, la pratique de la corruption appelle donc une riposte coordonnée des États, par la voie des conventions que je viens d'évoquer. Mais chaque État, chaque législateur national, conserve une responsabilité propre dans la prévention et la répression des pratiques de corruption.

Tout d'abord, la compétence pénale, fût-elle exercée en concertation avec d'autres États, demeure un attribut de la souveraineté nationale. L'Union européenne développe à ce sujet une pratique désormais éprouvée de la combinaison entre la définition de principes communs et l'adaptation des législations et des pratiques juridictionnelles. Cette adaptation prend évidemment en considération les droits nationaux, ainsi que les caractéristiques nationales des pratiques que l'on se propose de réprimer. Dans le cadre plus traditionnel de la coopération internationale, la pratique des lois de transposition répond aux mêmes exigences. Tel est précisément l'objet du projet de loi que nous examinons à présent.

Les observations que je viens de développer expliquent suffisamment pourquoi le groupe Nouveau Centre accueille favorablement un tel texte, qui vise à mettre les dispositions du code pénal et du code de procédure pénale en conformité avec nos engagements internationaux. Nous appuyons la démarche globale du Gouvernement, qui se préoccupe de mettre à jour une législation pourtant récente, puisque promulguée en l'an 2000, avec l'évolution particulièrement rapide de la coopération internationale en matière de droit pénal.

Il est proposé d'étendre le délit de corruption active ou passive aux agents publics étrangers et aux agents publics internationaux, au-delà du champ du commerce international où il est actuellement circonscrit. Des poursuites pourront être exercées quel que soit le pays ou l'organisation internationale en cause et quelle que soit la contrepartie attendue. Nous estimons cette extension tout à fait opportune.

Autre extension bienvenue de la répression, les dispositions visant à sanctionner le trafic d'influence exercé sur les agents des organisations internationales ou sur un magistrat d'une cour internationale. L'avancée la plus notable, à nos yeux, est cependant l'introduction d'une incrimination spéciale visant les atteintes à l'action de la justice hors des frontières de la souveraineté française, c'est-à-dire les actes d'intimidation et de subordination de témoin qui entravent le bon fonctionnement de la justice dans les procédures suivies dans un État étranger ou devant une cour internationale.

Je mentionnerai également, pour m'en féliciter, l'extension proposée de la répression au cas où l'avantage indu procuré par l'acte de corruption bénéficie non pas directement à l'agent public « cible » de cet acte, mais à une tierce personne, ainsi que les nouvelles facilités techniques ouvertes aux enquêteurs, comme la surveillance des biens et des personnes, la sonorisation, voire l'infiltration.

Madame la garde des sceaux, mes propos vous auront clairement indiqué dans quel état d'esprit positif le groupe Nouveau Centre a abordé l'examen de ce projet de loi. Il en attend une efficacité renforcée dans la lutte contre la corruption. Il en salue l'exemplarité. Cette dernière préoccupation nous conduit d'ailleurs à souhaiter des précisions sur les motivations, la pérennité et la portée de la réserve d'interprétation introduite par la France pour ce qui concerne le trafic d'influence passif visant un agent public d'un État étranger.

Sous le bénéfice de cette seule observation, le groupe Nouveau Centre votera ce bon projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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