Au fil du temps, Mayotte a peu à peu été considérée comme une collectivité de seconde classe. Il en a résulté un développement entravé de cette île, qui a conduit à des mouvements importants de la population mahoraise vers La Réunion voisine qui, elle, bénéficiait de plus d'avantages.
Toutefois, il ne faut pas le nier, le décalage culturel entre les deux sociétés, mahoraise et réunionnaise, a provoqué de réelles difficultés d'intégration et de cohabitation entre les différentes communautés à La Réunion. La départementalisation à venir peut donc constituer une chance pour tous.
En effet, une seconde collectivité forte dans l'océan Indien constitue autant d'opportunités d'ouverture et de développement pour une zone fortement touchée par les difficultés économiques et sociales. Les relations bilatérales entre La Réunion et Mayotte s'en trouveront d'autant plus renforcées. La cohabitation entre Réunionnais et Mahorais sera assurément plus apaisée. Nous pourrions alors nous limiter à cette simple vision positive, mais les interrogations demeurent nombreuses, les craintes également.
Ce nouveau statut ne doit pas se transformer en un piège politique dans lequel tout le monde s'égarerait. Ce processus doit s'accompagner, certes progressivement, des dotations nécessaires pour permettre à Mayotte de faire face à ce nouveau statut.
Au delà des questions matérielles, c'est également une réelle ambition sociétale qui doit se mettre en place. Les défis sont nombreux : l'état civil, la justice cadiale, la fiscalité, le droit de la famille. Autant de sujets qui nécessiteront une réelle politique d'accompagnement pour permettre l'émergence d'une nouvelle collectivité française dans l'océan Indien : un deuxième département dans l'océan Indien.
Toutes les institutions et les infrastructures doivent être mises à niveau, car, pour ne prendre qu'un exemple, l'INSEE avoue lui-même ne pas être en mesure de nous livrer des données statistiques actualisées fiables. Le processus sera long, mais devra offrir à tous la reconnaissance de la France. A La Réunion, ce nouveau statut prendra aussi son sens pour tous ceux qui ont quitté Mayotte pour une vie meilleure.
Un nouveau statut impose non seulement de nouveaux droits, mais aussi une responsabilité partagée. La Réunion ne saurait ignorer cette évolution. Dans notre île, les Mahorais sont de plus en plus nombreux à venir chercher une vie meilleure pour eux et leurs enfants. Ils y viennent parce que notre île est le territoire français le plus proche, parce que les conditions de logements sont meilleures que chez eux, parce que, disons le franchement, sans hypocrisie, les prestations sociales y sont plus avantageuses, parce que l'on peut mieux s'y former.
Répondre à leurs attentes, c'est répondre aux besoins d'une population qui a toujours marqué son attachement à la France. Il faut clarifier sa situation et lui offrir de vraies perspectives à Mayotte, à La Réunion et en métropole.
Par ailleurs, cette évolution politique ne saurait ignorer l'environnement régional de Mayotte. Eu égard à la réalité historique, la France ne peut pas s'affranchir d'une vraie politique de co-développement dans l'archipel des Comores, voire dans la zone sud de l'océan Indien. Elle doit faire face à ses responsabilités. Rien ne devra se faire dans la précipitation ni dans l'improvisation.
C'est pour cela que je prends la parole dans cet hémicycle afin de vous rappeler que au-delà du statut, c'est une politique ambitieuse de développement qu'il faut engager, pour une zone qui en a réellement besoin, et qui est pleine de potentialités. Ensemble et par ce biais, nous pourrons voir émerger des économies insulaires stables et efficaces, pour le profit de tous. Ce sera, madame la ministre, l'une des conditions de la réussite de votre et, je l'espère, de notre projet de départementalisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe UMP.)