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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 4 novembre 2008 à 15h00
Statut des témoins devant les commissions d'enquête parlementaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Si vous soulignez une défaillance de ma mémoire, pourtant habituellement vigilante, je vous en donnerai acte bien volontiers, monsieur le rapporteur.

En tout état de cause, si j'avais été à la place de cette personne qui siège au Conseil constitutionnel, j'aurais, par éthique personnelle, refusé d'être le rapporteur de ce dossier et de prendre part au vote. Or la décision qui a frappé notre collègue Georges Fenech, figure emblématique de la lutte contre les sectes, a été acquise à une voix de majorité. Je suis heureux d'utiliser cette tribune pour révéler ces faits à l'opinion publique et à l'ensemble de nos collègues.

Mais je reviens à l'objet de notre débat. Coïncidence des calendriers parlementaire et judiciaire, c'est cet après-midi que s'est tenu, devant la 17e chambre correctionnelle – la chambre de la presse du tribunal de grande instance de Paris –, le procès intenté par Claude Vorilhon, alias Raël – qui n'est jamais présent au tribunal puisque, ayant lui-même quelques ennuis, il craint que, s'il remet le pied sur le territoire national, la République ne lui offre un séjour gratuit d'une durée indéterminée – c'est donc cet après-midi, disais-je, que se tenait le procès intenté par Claude Vorilhon à la présidente de l'association Innocence en danger, qui était venue verser son témoignage aux travaux de la commission d'enquête sur les mineurs victimes des sectes.

Que disait la présidente de cette association ? « Des mouvements comme les raëliens [...], ce sont des mouvements sectaires qui prônent la relation sexuelle entre adultes et enfants. » Nous savons bien, nous, ici, qui travaillons depuis des années sur le phénomène sectaire, que ces déclarations sont fondées sur des faits réels, sur des témoignages comme celui de Mme Dominique Saint-Hilaire, attaquée en justice par Raël à sa sortie de la secte, où elle était restée treize ans, et relaxée par la cour d'appel de Bordeaux en décembre 2005.

Ainsi, comme le constatent les associations de défense des victimes de sectes, les ex-adeptes et les associations de victimes font face à de longues et coûteuses procédures judiciaires.

Cette réalité n'est malheureusement pas nouvelle. Dès 1997, l'Observatoire interministériel sur les sectes constatait, dans son rapport annuel, l'utilisation des procédures administratives et judiciaires : « [...] les associations répertoriées comme ayant un caractère sectaire dans le dernier rapport parlementaire ont multiplié les actions judiciaires à l'encontre des personnes, élues ou spécialistes, et des associations engagées dans la lutte contre les dérives sectaires, sur le fondement de la diffamation, de l'injure raciale ou religieuse ou encore de la discrimination. »

« Sans pour autant renoncer à ce type de comportement, certaines de ces associations privilégient aujourd'hui la saisine des tribunaux administratifs, en vue de gagner une reconnaissance sociale et d'obtenir des avantages identiques à ceux consentis aux religions traditionnelles. [...] » Il en est ainsi des actions à répétition des Témoins de Jéhovah.

La criminalité des Témoins de Jéhovah est bien établie, qu'il s'agisse du viol de la loi fiscale et du droit pénal, de la non-dénonciation de crime de pédophilie ou de la soustraction de patients à la transfusion sanguine même lorsque le pronostic vital est engagé. Ces gens-là ont pourtant toujours pignon sur rue et ce n'est que lorsque la pression se fait trop forte qu'ils passent la frontière pour aller se réfugier en Allemagne, par exemple, où il existe même une clinique tenue par les Témoins de Jéhovah ; dans cet établissement, la mort est garantie pour les cas que je viens d'évoquer, sans que les coupables aient jamais à répondre de leurs actes.

Dans ce contexte, la proposition de loi qui nous est soumise est un excellent rempart contre l'acharnement procédurier, qui finit par s'apparenter à une forme de harcèlement et porte atteinte à la libre parole devant les commissions d'enquête.

Nous partageons le point de vue exprimé par le président de notre assemblée, selon lequel « les personnes entendues sous serment devant les commissions parlementaires doivent pouvoir s'exprimer sans crainte. Il n'est pas admissible que le simple fait de rapporter ce que l'on a vécu puisse exposer à des poursuites. Si ce dispositif n'était pas adopté, on peut craindre qu'à l'avenir plus personne n'accepte de témoigner ! »

Faire taire les témoins, ceux qui ont souffert, qui acceptent d'agir pour que d'autres ne connaissent pas leur calvaire et qui se battent sans relâche pour les libertés individuelles et collectives, voilà l'objet des procédures menées par les sectes sur le terrain judiciaire, grâce aux considérables moyens financiers dont elles disposent.

Pour ce qui nous concerne, ne nous laissons pas embrumer par ceux qui cherchent à se dissimuler derrière le principe de la liberté de conscience pour mieux asseoir leur emprise sur leurs adeptes. Il est très important que ce texte soit voté à l'unanimité et que tous les parlementaires, qu'ils soient de gauche ou de droite, puissent se retrouver pour manifester leurs convictions comme nous savons le faire dans notre pays lorsque l'on touche à l'essentiel. (Applaudissements sur tous les bancs.)

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