Prévue à l'origine pour renforcer les pouvoirs et l'autorité du Président de la République, votre réforme – par un curieux paradoxe – offre finalement, et plus sagement, grâce aux travaux de la commission des lois, des avancées appréciables pour les parlementaires : la maîtrise de la moitié de l'ordre du jour, l'encadrement de la procédure d'urgence, le débat à partir du texte adopté en commission, la garantie d'un temps minimum de réflexion, l'assistance de la Cour des comptes.
Mais, malgré leur intérêt réel – qui devra compter dans l'appréciation finale que nous serons amenés à donner – l'ensemble de ces mesures ne suffit pas à briser le corset qui enserre le Parlement depuis 1958. II manque à votre projet l'audace qui caractérise la volonté. Dans trop d'articles, les bonnes intentions semblent pétrifiées par la peur de transgresser les canons du parlementarisme dit rationalisé.
Votre texte garde du Parlement l'image d'un pouvoir indocile et malhabile, d'un vaste forum traversé par trop de conflits partisans pour bien défendre l'intérêt national. Le Parlement reste donc – selon ce schéma – une institution par essence turbulente que l'on doit rappeler à l'ordre. À cet égard, la révision de l'article 49, alinéa 3 est exemplaire. En autorisant cette procédure une fois par session pour les textes ordinaires, votre projet fixe la limite à un niveau supérieur à celui enregistré dans la pratique. Une réforme ambitieuse devrait donc a minima interdire tout recours à cet article en dehors des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale.