Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, chers collègues, permettez-moi de commencer cette intervention sur l'article 1er en vous faisant part d'une récente expérience. Il se trouve que ma circonscription accueille les trois établissements pénitentiaires de l'agglomération nantaise : un centre de détention, une maison d'arrêt et un établissement pénitentiaire pour mineurs, déjà construit mais qui n'est pas encore entré en fonctionnement. Le 19 novembre, à l'initiative du GENEPI, nous avons, avec quelques députés et sénateurs de toutes tendances politiques, fait usage de nos prérogatives de parlementaires pour visiter la maison d'arrêt de Nantes. Étant nouveau député, c'était pour moi la première fois que je visitais un tel établissement. Celui-ci, comme malheureusement beaucoup d'autres, souffre autant de la vétusté de ses locaux que de la surpopulation. Je profite d'ailleurs de l'occasion pour me faire une nouvelle fois le porte-parole des personnels pénitentiaires, qui attendent avec impatience l'ouverture du chantier de la nouvelle maison d'arrêt de Nantes.
J'en reviens au projet de loi. Comme les quatre parlementaires avec qui j'ai visité la maison d'arrêt, j'ai été frappé de constater qu'un très grand nombre de détenus – par définition condamnés à de courtes peines ou placés en détention préventive – étaient atteints de troubles psychologiques ou psychiatriques. De l'aveu même des représentants de l'administration pénitentiaire qui nous accompagnaient – car nous n'avons pas voulu effectuer cette visite par surprise –, 30 à 40 % des détenus, dans l'agglomération de Nantes, sont atteints de troubles plus ou moins graves, ce qui n'est évidemment pas sans conséquence sur le fonctionnement des établissements : il en résulte des tensions entre les détenus, et le travail du personnel est rendu encore plus pénible.
Cette expérience ne fait que conforter ma conviction : votre projet de loi ne répond pas à la difficulté qui se pose à la société française – comme à de nombreux autres pays – et qui, au-delà du risque de récidive lié à des problèmes psychiatriques, concerne plus généralement l'accompagnement des détenus atteints de ces troubles. Telle est la première raison de notre opposition à l'article 1er.
Il est vrai qu'un des objectifs de l'enfermement est la protection de la société contre des individus dangereux. Cependant – et le constat me semble largement partagé, au-delà des clivages politiques –, la prison, dans son état actuel, n'est pas adaptée pour accueillir les personnes atteintes de troubles psychiatriques. Certains en viennent même à dire qu'elle ne sert pas à grand-chose puisque les personnes condamnées, quelle que soit la durée de leur peine, finissent toujours par en sortir, et se retrouvent au point de départ une fois celle-ci purgée. Les parents d'un détenu m'ont ainsi confié leur désarroi face à cette situation.
Personnellement, je n'ai pas peur de l'expression « hôpital-prison » : la question ne doit pas être taboue, à condition de prendre en charge dès les premières semaines d'incarcération les détenus atteints de troubles psychiatriques.