La législation relative au pilotage de notre politique de santé est si complexe que l'on ne sait pas toujours à quel saint se vouer. Nous avons ainsi confié tout à l'heure le choix des stratégies de qualité médicale au Haut conseil de la santé publique, alors que – et je suis d'accord avec M. Bur sur ce point – cette mission aurait dû être confiée à la Haute autorité de santé, qui a vocation à donner un avis sur la qualité des soins.
Par ailleurs, Mme la ministre vient d'expliquer que M. Régereau, le président du conseil de surveillance de la Caisse nationale d'assurance maladie, négocie la convention médicale. Or c'est totalement inexact : c'est le directeur général de la CNAM, le fameux proconsul, qui est en charge de cette négociation. C'est si vrai que M. Régereau s'est prononcé contre la convention médicale et la construction du parcours de soinss. À aucun moment, les partenaires sociaux n'ont eu à donner leur avis sur ce point.
J'en viens maintenant à l'article 29.
Le Gouvernement veut doter la Haute autorité de santé de pouvoirs médico-économiques alors que, lors de l'examen de la loi de 2004, cette assemblée s'y était opposée, pour trois raisons.
Tout d'abord, il nous paraissait nécessaire que la Haute autorité de santé commence par acquérir une véritable légitimité scientifique vis-à-vis des acteurs de la santé et de l'opinion publique. Or nous avons le sentiment que cette légitimité n'est pas encore suffisante pour lui permettre de s'affirmer.
La deuxième raison était d'ordre pédagogique. Compte tenu de ce qu'est la qualité des soins dans notre pays, il nous semblait nécessaire, pour asseoir l'autorité morale de la HAS, de ne pas mélanger tout de suite les aspects économiques et qualitatifs. Et l'on a pu constater, lorsque nous avons discuté de la vaccination, combien il était important de parler en premier lieu de qualité.
Enfin, nous ne souhaitions pas que la Haute autorité de santé s'arroge, à la faveur de la confusion entretenue par un certain nombre de partenaires sociaux, un droit d'arbitrage sur le périmètre des soins. C'est en effet au pouvoir politique, c'est-à-dire à l'exécutif sous le contrôle du législatif, qu'il revient de trancher cette question.
La légitimité de cette approche s'est trouvée renforcée lors de l'affaire du déremboursement des médicaments à service médical rendu dit insuffisant, sur lequel la Haute autorité a rendu son avis le plus net. En effet, nous avons été un certain nombre, parmi les parlementaires membres de la MECSS, à être choqués par l'argument qu'avançait la Haute autorité, selon lequel la France n'avait pas les moyens de se payer ce type de médicaments – argument qui témoignait d'une dérive de sa communication.
Aujourd'hui, le Gouvernement est dans une fuite en avant. L'amélioration du service médical rendu est d'ores et déjà une compétence qui relève de la Haute autorité. Aller plus loin en lui confiant le soin de juger de l'opportunité économique d'une stratégie de soins ne correspond ni à sa mission ni à sa légitimité actuelle. À force d'étendre le périmètre d'action d'une Haute autorité dont la légitimité n'est pas encore suffisamment forte, on risque de régresser au lieu de progresser dans le sens des réformes nécessaires.