Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, beaucoup d'entre nous prennent aujourd'hui la parole pour la première fois à l'Assemblée nationale. Si j'en fais moi aussi partie, je le regrette : car c'est pour relever que ce projet de loi a, dans sa première version, fait l'impasse sur la réalité particulière de l'Université des Antilles et de la Guyane. Structure tripolaire implantée dans trois régions monodépartementales aux identités très fortes, cette université est contrainte de respecter certains équilibres essentiels. De ce fait, diverses dispositions de la réforme proposée ne peuvent s'y appliquer.
Confrontée à cette réalité, vous avez, madame la ministre, décidé, lors du débat au Sénat, de légiférer par ordonnance afin d'adapter le texte aux caractéristiques de l'université des Antilles et de la Guyane. Si je prends acte de votre volonté de proposer une réforme appropriée, je ne puis que déplorer le recours aux ordonnances, qui est la négation même de la démocratie parlementaire. (Exclamations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Une concertation préalable avec le monde universitaire des départements français d'Amérique aurait permis de l'éviter.
D'autre part, vous avez choisi de vous attaquer en priorité à la gouvernance des universités. Or des sujets tels que l'orientation par l'échec, la mauvaise insertion professionnelle, les conditions de vie déplorables des étudiants, la revalorisation du statut des enseignants-chercheurs, le manque d'effectifs et de financements sont au coeur de la crise universitaire et appellent des réponses tout aussi urgentes. Permettez-moi de faire une parenthèse sur la situation des étudiants guyanais dans l'Hexagone, qui sont confrontés, outre aux problèmes de ressources, aux pires difficultés pour trouver un logement. À l'insuffisance du parc de logements pour étudiants s'ajoute en effet pour eux l'impossibilité de trouver une location dans le privé, car on leur réclame une domiciliation bancaire en métropole alors que leurs parents vivent en Guyane.
La Guyane dispose depuis 2004, grâce à ses élus, d'un pôle universitaire qui a défini une politique de recherche associant universités et instituts de recherche français et étrangers. La coopération se développe notamment avec l'université de Brasilia, le CEFET de Fortaleza, Montpellier II et les universités de Toulouse. Au nombre des champs disciplinaires qu'elle couvre figurent les énergies renouvelables, les risques naturels et la télédétection, ainsi que la biodiversité tropicale, qui devra être étudiée en lien avec le parc amazonien de Guyane.
La structure universitaire de Guyane est composée de quatre établissements autonomes – l'IUT, l'IESG, l'IUFM et le pôle universitaire guyanais – auxquels il convient d'associer une antenne de l'UFR de médecine : l'ensemble sera bientôt regroupé sur le nouveau campus de Trou Biran. Les effectifs ont pratiquement doublé depuis 2002, pour s'établir actuellement à 2 225 étudiants – je peux confirmer ce chiffre, madame la ministre. Compte tenu de la croissance forte de la population et de sa jeunesse, le pôle guyanais pourrait compter 3 000 étudiants rapidement et 5 000 à court terme. Ce développement conforte la demande d'une université de plein exercice, demande à laquelle il faudra apporter une réponse tôt ou tard. En attendant, dans le cadre de la réforme universitaire engagée, il convient d'aller vers une véritable responsabilité locale permettant au pôle universitaire guyanais de développer pleinement ses capacités : devenu un pôle d'excellence, il pourra relever le défi de la mondialisation des savoirs au service des Guyanais et de l'ensemble des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)