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Intervention de Yves Durand

Réunion du 23 juillet 2007 à 21h45
Libertés et responsabilités des universités — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Durand :

Ce sujet n'étant pas véritablement abordé dans le projet de loi, nous souhaitons obtenir de votre part et du rapporteur des éclaircissements qui nous permettraient d'engager positivement – car nous le souhaitons – la discussion des articles de votre projet de loi.

Le dernier point, mais non des moindres, qui avait provoqué la colère et donc le rejet du monde universitaire était celui, essentiel, des personnels et du maintien de leur statut. Or, à ce sujet, votre texte amendé, avec votre accord, par la majorité sénatoriale nous inquiète tout autant, si ce n'est davantage, que les sujets précédents.

L'article 15 dispose que « le contrat pluriannuel d'établissement fixe le pourcentage maximum de la masse salariale que l'établissement peut consacrer au recrutement d'enseignants-chercheurs contractuels », et l'article 16 que « le président peut recruter, pour une durée déterminée ou indéterminée, des agents contractuels ».

Tout le monde est d'accord pour considérer que le recrutement de contractuels peut être nécessaire pour résoudre des problèmes ponctuels ou attirer vers l'université des chercheurs étrangers sans pour autant les enfermer dans un emploi statutaire.

Mais vous nous permettrez, madame la ministre, de rapprocher ces deux dispositions des articles 15 et 16 et la lettre de mission du Président de la République, qui exige le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Comment ne pas craindre le risque énorme de voir l'emploi contractuel se substituer à l'emploi statutaire, déchargeant ainsi le budget de l'État d'un nombre important de salaires ? Car vos déclarations à l'issue de la discussion générale et notamment en réponse à Alain Claeys et à M. Mamère n'ont pas été rassurantes.

Dans ces conditions, il est impossible de laisser au seul président d'université le soin de recruter des contractuels sans bornes légales. À l'interpellation de notre collègue Alain Claeys en commission sur ce point précis, vous n'avez pas répondu franchement. Or il s'agit d'un point central puisqu'il touche, au-delà de l'université, au statut même de la fonction publique. Quelle dérive peut en effet s'opérer si un président d'université a la possibilité d'employer un cadre administratif de catégorie A contractuel, comme le texte le permet, alors que le même métier, la même mission peut être remplie par un agent titulaire dans l'une des fonctions publiques ? Pour nous, et nous ne voulons pas faire preuve d'immobilisme mais au contraire de bon sens, les dispositions de la loi de 1984 sont la garantie que la reconnaissance du statut de la fonction publique est unanimement partagée sur tous ces bancs, y compris par vous-même, ce dont je ne doute pas, madame la ministre.

De même, pour les enseignants-chercheurs, il paraît nécessaire de poser un verrou dans la loi en prévoyant un décret qui fixe la part maximale de la masse salariale afin qu'elle s'impose à tous. Contrairement à ce que vous avez affirmé au Sénat, en réponse à un amendement du groupe socialiste, le décret ne nous paraît pas une précaution inutile, mais un gage d'égalité entre universités.

Ces dispositions du projet, en dehors des problèmes de constitutionnalité qu'elles peuvent présenter, marqueraient une évolution sans précédent dans la fonction publique tout entière, évolution que nous ne pouvons accepter. Sur ce sujet majeur de l'emploi contractuel, nous avons entendu vos déclarations en réponse à M. Claeys, mais à partir du moment où est introduite dans la loi cette possibilité d'emploi de contractuels, et toujours en regard de cette fameuse lettre de mission, avouez que votre seule bonne volonté qui, je n'en doute pas, est réelle, ne peut suffire à nous rassurer.

Sans compter que M. Darcos, cela a été rappelé à de multiples reprises cet après-midi, a annoncé la suppression de 17 000 postes dans l'éducation nationale. Dans ces conditions, madame la ministre, même si cette annonce ne concerne que l'enseignement scolaire, comment ne pas voir votre projet de loi comme un leurre ?

Vous commencez votre travail en abordant la gouvernance, alors que ce problème aurait dû être le point final venant conclure la solution des autres problèmes que sont l'échec massif des étudiants dès la première année, alors que la France manque d'étudiants diplômés, et les difficultés des universités les plus dégradées, pour lesquelles vous n'annoncez aucun plan de rattrapage.

Vous avez déclaré l'urgence sur ce projet de loi, mais en l'absence d'un collectif budgétaire, les premiers moyens n'arriveront qu'à la rentrée 2008, s'ils arrivent !

Derrière la gouvernance, vous avez élaboré un texte apparemment technique, après le vote défavorable du CNESER le 22 juin et l'intervention en catastrophe du Président de la République pour tenter d'assainir un terrain miné, mais vous avez laissé des dispositions qui impliqueront d'énormes transferts de charges vers les universités. Or, vous le savez bien, celles-ci se retourneront immanquablement vers les collectivités territoriales, ce qui laisse présager que, hélas, une fois de plus, on nous tiendra ce discours que nous entendons depuis cinq ans, depuis la fausse décentralisation du gouvernement Raffarin qui, en opérant des transferts de charges sur les collectivités territoriales, a prétendu baisser les impôts nationaux, mais a, en fait, augmenté les impôts locaux. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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