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Intervention de Lionel Tardy

Réunion du 21 juillet 2009 à 15h00
Protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

Au passage, par une acrobatie juridique risquée, ce texte crée, pour une série de contraventions dont la liste n'est même pas close, une peine complémentaire qui constitue une atteinte à un droit que le Conseil constitutionnel vient de reconnaître comme constitutif de la liberté d'expression.

Pour moi, le message du Conseil constitutionnel est clair : on peut suspendre un accès à internet, mais pas n'importe comment et surtout pas pour n'importe quoi. Ce texte n'a donc aucune chance, selon moi, d'être promulgué, car il se heurtera une seconde fois à l'obstacle du Conseil constitutionnel. En tant que député soucieux de la qualité de la législation, cela me désole.

Ce qui compte maintenant, c'est l'après-HADOPI. Monsieur le ministre, vous avez annoncé une grande concertation sur le financement de la création et j'en suis heureux, mais n'aurions-nous pas dû commencer par là ? Je me tiens à votre disposition pour travailler sur le volet numérique de cette concertation. Nous sommes d'accord sur les bases : la propriété intellectuelle doit être respectée et internet ne doit pas devenir une zone de non-droit.

Le vrai sujet est de savoir comment parvenir à mettre en oeuvre le dispositif qui le permettra. Les épisodes DADVSI et HADOPI ont clairement montré que vouloir faire plier la technologie pour la faire entrer dans les cases du droit est une voie sans issue.

Les bouleversements technologiques apportés par internet nécessitent une adaptation du droit dans de nombreux domaines et en particulier celui de la propriété intellectuelle. Cela ne concerne pas que la musique et la vidéo mais aussi les textes. On sort donc du strict cadre des téléchargements.

Aujourd'hui, deux conceptions de la propriété intellectuelle s'affrontent sur internet. La première est portée par les ayants droit qui visent à maximiser leurs gains. C'est cette philosophie qui sous-tend les textes DADVSI et HADOPI et selon laquelle le consommateur doit payer pour tout : acquérir l'oeuvre, mais aussi l'utiliser, et encore, dans des conditions restrictives. On lui demande sans cesse de passer à la caisse, avec sans cesse la menace de poursuites, rendues crédibles par le fait que sur internet, tout se voit, tout est repérable.

C'est un frein à l'innovation et surtout, cela heurte les consommateurs et les utilisateurs qui ont le sentiment d'être rackettés.

L'autre conception est celle portée par certains internautes évoluant notamment dans le monde du logiciel libre, et va dans le sens inverse. Elle s'est construite essentiellement sur la propriété intellectuelle en matière de logiciels. Elle n'est pas forcément parfaitement adaptée pour d'autres contenus.

C'est le point de vue de l'ayant droit contre celui de l'utilisateur. Les deux sont légitimes et défendables et c'est à nous, politiques, de trouver un compromis acceptable pour tous.

Voilà le vrai sujet, chers collègues ; nous mettrons peut-être beaucoup de temps pour y arriver, mais nous ne pourrons faire l'économie de ce débat-là. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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