Il faut donc aller aujourd'hui dans la direction qu'a suggérée le Conseil constitutionnel et ne pas chercher à contourner sa décision.
Certains de mes collègues de la majorité et moi-même présentons des amendements qui recevront, je l'espère, votre approbation, car si le projet de loi est de nouveau retoqué par le Conseil, cela signifiera que le Parlement légifère mal, et sans doute trop.
Personne dans la majorité ne souhaite cela, et c'est pourquoi il faut corriger certaines des dispositions du texte, encore trop imparfait.
La plus grave difficulté du projet actuel réside dans la preuve. La seule adresse IP, que les agents assermentés rechercheront pour identifier les personnes susceptibles de voir leurs abonnements suspendus, n'est pas suffisante pour établir de manière probante qu'une infraction est constituée. L'internaute ordinaire ne sait pas et ne pourra pas totalement protéger l'accès à son adresse IP. Condamner un internaute dans ces conditions revient à créer le délit non intentionnel de défaut de protection, ce qui est inimaginable au regard des règles traditionnelles de notre droit. Cela correspondrait à un « délit de ne pas faire », qui serait une grande première.
La présomption de culpabilité demeure dans le texte et il faut absolument s'en défaire en l'inversant, pour respecter le principe souverain de la présomption d'innocence.
Cela dit, nous devons nous projeter dès aujourd'hui dans l'après-HADOPI et travailler à une solution d'avenir. Je m'adresse au nouveau ministre de la culture, espérant qu'il sera très attentif aux propositions qui sont faites par les uns et par les autres.
Je pense qu'il aurait été, du reste, plus opportun d'inverser la démarche et de commencer par le chantier de la rémunération des créateurs, du financement des entreprises culturelles et du développement des offres légales – l'aventure « DADVSI » ayant dû, pour une fois, servir de leçon.