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Intervention de Pierre-Alain Muet

Réunion du 11 juillet 2007 à 9h30
Travail emploi et pouvoir d'achat — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet :

Ce que vous faites sur les heures complémentaires, vous savez très bien que ça ne résout pas le pas le problème du temps partiel. Si on veut le résoudre, il faudrait que le temps partiel soit encadré par la négociation sociale et que ceux qui souhaitent travailler à temps plein puissent le faire. Ce n'est pas une incitation qui changera les choses puisque le temps partiel est déterminé essentiellement par l'employeur.

Donc, aucun des objectifs que vous fixez dans cette proposition « travailler plus pour gagner plus » ne se retrouve dans cette loi. Vous montez une « usine à gaz » – le terme n'est pas de moi, mais se retrouve pratiquement dans toutes les études qui ont été effectuées sur le sujet. Vos propres services expliquent qu'il s'agit d'une « usine à gaz qui aura des effets incertains sur l'emploi et sur le pouvoir d'achat, pour un coût exorbitant pour les finances publiques ». Cette phrase on la retrouve aussi bien dans un rapport du Conseil d'analyse économique – qui sera, je l'espère, prochainement publié – que dans des travaux qui ont été diffusés par le ministère des finances.

Je voudrais terminer par deux remarques. « Travailler plus pour gagner plus », c'est effectivement un objectif que doit se fixer une société à l'échelle globale. Il ne s'agit pas de le faire à l'échelle individuelle, mais à l'échelle globale. C'est tout simplement viser le plein emploi.

Mais vous n'en prenez pas la route ! J'ai regardé attentivement le rapport où le rapporteur général nous explique – dans un graphique qui doit se trouver à la page 56 – que les pays qui ont retrouvé le plein emploi sont ceux qui travaillent le plus. Moi, je vous conseille de consulter la page 51, où vous avez des données totalement objectives – et non pas un graphique effectué en prenant quatre pays au hasard – sur le temps travaillé dans tous les pays.

On remarque que les deux pays qui travaillent le moins, ce sont la Hollande et la Norvège. Ces deux pays sont depuis longtemps en plein emploi. La Norvège, qui n'a pratiquement jamais connu le chômage de masse, a baissé son temps de travail de façon considérable pendant quinze années de suite, depuis la fin des années soixante-dix. La Hollande a fait la même chose. Tout le monde a eu l'occasion d'analyser les accords de Wassenaar et la politique de réduction du temps de travail menée en Hollande, qui a conduit au plein emploi depuis dix ans.

Je vous invite à regarder ces donnés car vous constaterez que les trois pays qui travaillent le plus, monsieur le rapporteur général, ce sont la Grèce, la Pologne et la Tchéquie. Or, la Grèce est championne du chômage dans l'Europe de l'Ouest, avec un taux de près de 10 % depuis cinq ans ; la Pologne détient le record de pays de l'Est, avec un taux qui a avoisiné les 20 % pendant cinq ans ; et la Tchéquie n'est pas très éloignée de ces deux pays. Cela montre que, si l'on veut aller vers le plein emploi, la réduction du temps de travail est aussi un élément.

Autre exemple : celui de la France. Regardons à la lumière de la proposition « travailler plus pour gagner plus » ce qui s'est passé à l'échelle de la société tout entière. Depuis un siècle, en France, la durée individuelle du travail a été divisée par deux. Dans le même temps, cinq millions d'empois ont été créés. C'est peu. Ainsi, le nombre total d'heures travaillées dans l'économie française a été globalement divisé par deux, en un siècle.

On constate un mouvement continu, sauf pendant une seule période de cinq ans : de 1997 à 2002, les années du gouvernement Jospin. Pendant ces années, la durée individuelle du travail a certes baissé, mais deux millions d'emplois ont été créés. Pour la première fois, la France a effectivement travaillé plus pour gagner plus. Elle a gagné plus parce que c'est la seule période où le revenu des Français, le revenu national, a crû de 3 % par an.

Vous en êtes loin aujourd'hui ! Eh bien, madame la ministre, vous devriez vous inspirer à la fois des exemples européens et de l'histoire. Le meilleur service que vous puissiez rendre à notre pays, c'est de retirer cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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