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Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 11 juillet 2007 à 9h30
Travail emploi et pouvoir d'achat — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Cahuzac :

On ne sait rien de tout cela ! C'est le travail en commission qui aurait dû permettre de le préciser.

Mes chers collègues, si vous avez la réponse, si vous savez précisément où iront ces 3,2 milliards d'euros et quelle partie de la population, au regard de ses revenus, en bénéficiera le plus, dites-le, au lieu de vous agacer, de vous indigner, lorsque nous posons ces questions, qui sont, me semble-t-il, parfaitement légitimes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Une question posée par les parlementaires les plus aguerris de cet hémicycle concerne les intérêts d'emprunt. C'est naturellement dans les premières années que les ménages qui s'endettent pour acquérir leur résidence principale acquittent la plus lourde charge des remboursements d'emprunt. C'est donc naturellement dans les premières années que les organismes bancaires vont augmenter leur taux. Cet effort de la collectivité aura pour finalité première de neutraliser cette augmentation des taux. Cette mesure considérable, qui représente 3,2 milliards d'euros en vitesse de croisière, va profiter non pas aux populations dont vous portez, monsieur le haut-commissaire, d'une certaine manière le destin, mais d'abord et avant tout à des organismes bancaires. Je n'avais pas remarqué, ces derniers mois, que, dans notre pays, ces entreprises avaient le plus besoin d'aides publiques, directes ou indirectes – loin s'en faut ! (Sourires.)

Que proposez-vous pour éviter que les banques, d'une certaine manière, ne « cannibalisent », les premières années, via les intérêts d'emprunts, l'aide publique que vous vous apprêtez à voter ? Que ferez-vous si les taux d'intérêt augmentent dans des proportions tout à fait déraisonnables ? Cette aide publique serait en réalité dirigée d'abord vers les organismes bancaires, par l'intermédiaire des ménages qui se sont endettés. Vous n'avez apporté aucune réponse à ces questions qui ne sont pas, me semble-t-il, totalement inutiles, au risque de lasser certains collègues de la majorité.

Notre collègue Charles de Courson a évoqué les heures supplémentaires et regretté que rien ne soit prévu pour la fonction publique dans le projet initial, pas plus que pour les heures complémentaires destinées aux salariés à temps partiel. La majoration du coût sera donc de 50 %. Il ne s'agit plus de 6 milliards d'euros mais de 9 milliards d'euros.

Aujourd'hui, 37 % des salariés font des heures supplémentaires. La moyenne des heures supplémentaires est de 57 heures par an, alors que la législature précédente les a décontingentées à près de 250 heures. Qu'espérez-vous de cette mesure ? Une hausse du pouvoir d'achat ? C'est très bien pour ceux qui bénéficieront de ces heures supplémentaires. Mais, là encore, aucune étude d'impact n'a été réalisée, non plus que d'études statistiques.

Dans le rapport présenté au Parlement figurent des exemples curieux. Un salarié effectuant 35 heures à qui seraient proposées quatre heures supplémentaires par semaine, tout au long de l'année, verrait son revenu augmenté de 2 500 euros. C'est effectivement très séduisant. Mais, si l'on y regarde de plus près, on n'aboutit pas au même résultat. L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui a procédé à la même étude, parvient au chiffre de 2 150 euros. Certes, c'est encore beaucoup ! Mais cela concerne en fait les salariés des petites et moyennes entreprises, celles précisément dans lesquelles les 35 heures ne s'appliquent pas, celles où l'exemple cité ne peut exister puisque ces salariés effectuent déjà 39 heures. Dans les PME, cela ne sera pas le cas – l'ACOSS l'a indiqué très clairement. Je vous renvoie à cette étude préalable au projet de loi que nous examinons.

L'ACOSS arrive à la conclusion que, en année pleine, le gain de pouvoir d'achat sera de moins de 650 euros par an et par salarié. Certes, ce n'est pas rien ! Mais n'annoncez pas la somme de 2 500 euros, car ce serait comme une escroquerie à l'espoir pour ces salariés qui pensent percevoir cette somme, alors que leur fiche de paie sera augmentée de moins de 600 euros !

Il y a ensuite le RSA, le « petit cousin de province », celui que l'on a invité à monter à la capitale et qui vient « s'asseoir à la table des grands ». Je parle naturellement du RSA, et non, bien sûr, de vous, monsieur le haut-commissaire. (Sourires.)

Cette mesure coûte 25 millions d'euros. Vous venez de calculer devant nous que le coefficient multiplicateur par rapport à l'année prochaine était de 30. Mais quel est le coefficient multiplicateur par rapport à l'ensemble du coût de ce paquet fiscal, c'est-à-dire de 15 milliards d'euros ? Plus de 60 !

Il y aurait 50 000 à 55 000 bénéficiaires du RSA pour un public global estimé à 1,4 million. Que vient faire le revenu de solidarité active dans ce paquet fiscal ? Le coût n'a rien à voir avec ce que nous venons d'envisager. L'effet sera sans aucune mesure sur les finances publiques.

Il fallait probablement faire le revenu solidaire d'activité. Pardonnez-moi, monsieur le haut-commissaire, mais j'ai le sentiment que vous faites des publics concernés un rempart pour éviter d'être atteint par les critiques légitimes qui pourraient être formulées par ceux qui observent, judicieusement je crois, que votre texte n'a rigoureusement rien à voir avec le projet de loi. Il pèse 25 millions d'euros par rapport à ceux qui émargent à 800 millions d'euros pour le bouclier fiscal (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen), à près d'un milliard d'euros pour l'exonération des droits de succession, à plus de trois milliards d'euros pour la déductibilité des intérêts d'emprunts, à près de 9 milliards d'euros pour les heures supplémentaires.

Que faites-vous donc là autour de cette table avec vos petits, vos misérables 25 millions d'euros, quand on connaît les besoins existants. Le RSA est « monté à la capitale », mais ne peut prétendre au même festin et ne dispose pas des mêmes couverts.

C'est la raison pour laquelle nous aurions pu demander en commission, si nous en avions eu le temps, la disjonction de cette partie du texte du reste du projet, car la philosophie qui les anime de même que les moyens sont totalement différents. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen),

Monsieur le haut-commissaire, vous qui portez le RSA, considérez votre situation. Vous ne siégez pas au même banc que les autres ministres (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire ; Mme la ministre et M. le secrétaire d'État à la consommation font des signes de dénégation), puisque M. le secrétaire d'État à la consommation, qui était à côté de vous, vient de rejoindre Mme Lagarde.

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