Madame la ministre, le projet de loi dont nous achevons l'examen ce soir s'inscrit dans la continuité des réformes entreprises et des politiques conduites sous la précédente mandature. Nous avions eu droit à la loi de programmation pour la cohésion sociale. Celle-ci autorisait des opérateurs privés à placer et accompagner les chômeurs, autorisait également et du même mouvement l'ANPE à créer des filiales lui permettant de développer des activités rémunératrices. Parallèlement à cette réforme, nous assistons depuis plusieurs années à un contrôle accru des chômeurs, à l'augmentation du nombre de radiations, aux pressions hiérarchiques exercées au sein des agences de l'ANPE pour faire du chiffre, aux placements au forcing, à la restriction des offres de formation.
Votre projet de loi, madame la ministre, se situe dans le prolongement de cette action. Le but affiché exploite le bon sens populaire : c'est la baisse du chômage et la simplification des démarches des demandeurs d'emploi. Le but recherché, lui, est cependant tout autre : il ne s'agit en fait que d'organiser le démantèlement du service public de l'emploi, de basculer d'un modèle de protection et d'accompagnement du demandeur d'emploi à un modèle coercitif, à un régime de l'emploi contraint qui s'inspire, de près ou de loin, de l'idéologie anglo-saxonne du workfare. Si vous organisez la fusion opérationnelle des activités de placement et d'indemnisation, c'est en effet pour mieux contrôler le demandeur d'emploi indemnisé, le contraindre à accepter n'importe quel boulot, répondre aux attentes de ces « chercheurs d'emploi » – comme vous dites ! – que sont les entreprises qui s'entêtent à ne proposer que des emplois précaires, des salaires indignes, des conditions de travail déplorables.