En donnant l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 745 , je voudrais en même temps répondre le plus complètement possible à tous ceux qui sont intervenus, car ils expriment chacun une part de vérité.
Lorsque M. Bouvard rappelle le caractère indispensable des commissaires aux comptes, il a bien sûr raison, mais le problème n'est pas là. Pour avoir moi-même été chef d'entreprise jusqu'à une date récente, je connais bien l'utilité des commissaires aux comptes puisque mon entreprise y était soumise.
Le problème a été soulevé par Éric Ciotti : il se situe dans la nécessaire conciliation de cette obligation avec les objectifs globaux du gouvernement et de ce projet de loi, au demeurant fort bien discuté par la représentation nationale. Nous voulons éliminer les obstacles qui empêchent nos petites et moyennes entreprises de se développer, et le titre Ier du projet s'y emploie : création, développement, transmission, financement, simplification sont autant de notions qui sont évoquées dès les premiers articles. Voilà en effet des années que les artisans, les commerçants et les petites et moyennes entreprises se plaignent, avec raison, de la complexité à laquelle ils sont confrontés. Vous le savez tous sur ces bancs.
Le Gouvernement poursuit des objectifs de simplification. Nous souhaitons, avec l'article 14, simplifier le fonctionnement des sociétés par actions simplifiées et, pour les plus petites d'entre elles, les dispenser de l'obligation de désigner un commissaire aux comptes. Cette réforme me semble justifiée à plus d'un titre.
D'abord, elle permet de dispenser de cette obligation les petites entreprises pour lesquelles elle n'a pas de justification. C'est d'ailleurs déjà le cas pour d'autres structures : il n'y a pas d'obligation de recourir à un commissaire aux comptes pour la SARL de moins de 50 salariés ; pour la société en nom collectif et la société en commandite simple, la désignation d'un commissaire aux comptes n'est obligatoire qu'à partir d'un certain seuil.
Il en résultera, selon nos évaluations, non seulement un allégement des obligations pesant sur les petites sociétés par actions simplifiées, mais aussi un gain important pour l'ensemble des PME. Je vous rends attentifs au niveau moyen des diligences d'un commissariat aux comptes : 3 000 euros en moyenne – je le sais car, pour mon entreprise qui comptait vingt salariés, le coût était supérieur. Si vous multipliez 3 000 euros par 60 000 mandants, cela fait environ 200 millions d'euros. Vu les efforts que nous faisons pour financer le développement de nos PME, on ne peut pas balayer d'un revers de la main une telle somme. Il s'agit d'argent qui est directement rendu aux entreprises. Les intentions du Gouvernement en la matière sont pures dans la mesure où il n'a aucun intérêt dans ce changement qui finalement profitera exclusivement aux PME. C'est une illustration concrète de notre souci de ne plus faire peser sur les petites entreprises une sorte d'impôt réglementaire dont nous nous plaignons les uns et les autres.
Le Gouvernement a néanmoins pris soin d'encadrer cet allégement des obligations pesant sur les sociétés par actions simplifiées. Ainsi, le projet de loi prévoit que cette dispense ne s'appliquera pas aux sociétés qui détiennent directement ou indirectement 5 % ou plus du capital ou des droits de vote d'une autre société. De surcroît, la nomination d'un commissaire aux comptes pourra toujours être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant le dixième du capital.
La réforme assure donc un équilibre entre la simplification et la sécurité financière. Au demeurant, dans bien des cas, les entreprises choisiront librement de recourir à un commissaire aux comptes car celui-ci remplit, on l'a dit sur tous les bancs, un rôle utile, qui n'est pas remis en cause par ce projet de loi.
Cette réforme ne remet pas en cause la place des commissaires aux comptes dans l'économie ; leur champ d'intervention, nous le savons tous, s'est au contraire accru au cours des dernières années – j'y reviendrai en évoquant à la fin de mon intervention les conditions de la nécessaire concertation.
Cette réforme part simplement du constat de bon sens que, pour une petite entreprise, le recours au commissariat aux comptes n'est pas toujours indispensable et que c'est également à l'entrepreneur d'apprécier, au cas par cas, s'il doit y recourir ou non.
Je voudrais maintenant vous donner quelques raisons claires de l'attachement du Gouvernement à cet article et à la nécessaire concertation qui devra s'engager pour la fixation du seuil.
J'ai rappelé mon expérience de chef d'entreprise, je n'insiste pas.
L'extension du périmètre de l'activité des commissaires aux comptes a été liée au fait que nous avons imposé des obligations de commissariat aux comptes sur les établissements publics, les EPIC, sur les associations recevant des subventions publiques. Cette activité supplémentaire est incontestable. De plus, la certification des sociétés cotées a conduit à une augmentation de plus de 10 % des honoraires de commissariat aux comptes dans les deux ans.
Je voudrais également indiquer que, contrairement à ce qui a été dit, les associations, les unions ont réaffirmé leur accord – lequel figure déjà dans la plateforme de l'Union professionnelle artisanale de 2006 – pour la suppression de l'obligation du commissariat aux comptes pour les sociétés par actions simplifiées, sous un certain seuil à déterminer par décret. La CGPME est dans le même état d'esprit. Il semble donc que nombre d'artisans, de commerçants ou de PME souhaitent une telle suppression.
On nous parle des 60 000 mandats environ qui sont aujourd'hui exercés au titre des SAS, et on le compare au nombre global de mandats des commissariats aux comptes, qui atteint presque les 200 000, pour faire croire qu'un vrai risque pèserait sur cette profession dont on vient les uns et les autres de dire qu'elle était utile et même indispensable. Mais on ne nous parle pas du chiffre d'affaires qui est généré par les diligences exercées dans ce type de société. À ma connaissance, cela n'atteint pas la proportion des mandats détenus au titre des sociétés par actions simplifiées.
J'ajoute que le nombre de droits d'alerte, qui est finalement la justification du recours aux commissaires aux comptes, s'élève à quelques dizaines par an. L'exercice de simplification auquel nous procédons ne crée donc pas d'insécurité. Il est demandé par l'ensemble des petites et moyennes entreprises de ce pays et il dégagera une source de financement sans pour autant attenter à une profession dont chacun s'accorde à reconnaître le caractère indispensable.