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Intervention de Huguette Bello

Réunion du 22 juin 2009 à 10h30
Modification du règlement du congrès — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHuguette Bello :

Monsieur le président, monsieur le président du Sénat, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je me demande, au moment de prendre la parole, ce que peuvent penser les Français de nos débats, ce que sont leurs attentes et leur angoisse. Je m'interroge sur « l'essentiel », comme disait Jean-François Copé.

La réalité, la préoccupation de ceux que nous croisons tous les jours dans nos régions, nos départements, nos villes, nos territoires, elle n'est pas, je crois, dans les débats d'initiés. C'est un chômage qui augmente à un rythme jamais observé, ce sont des destructions d'emplois considérables – 200 000 au premier trimestre –, c'est un pouvoir d'achat en déclin, ce sont même, phénomène nouveau, des entreprises qui baissent les salaires, c'est une dette qui concourt à l'explosion des déficits publics.

La réalité que vivent les Français, c'est celle d'un pays caractérisé par le recul de la présence de l'État, par la disparition progressive des services publics dans les territoires ruraux et les quartiers urbains en difficulté.

Au regard d'une telle situation, nos compatriotes attendaient un plan de relance de grande envergure, comportant des annonces sociales de nature à encourager le soutien à la consommation en même temps que les besoins en investissement. Ils attendaient des perspectives sérieuses et crédibles prenant en compte les nécessaires régulations sociales et environnementales, en utilisant comme levier et comme potentialités l'appui inestimable des collectivités territoriales et locales.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que nous sommes bien loin du compte car, en fait de relance, il s'agit plus d'un catalogue d'actions en cours, dans une version pâle et timorée.

Quant à vos projets en matière territoriale, ils créent de l'insécurité là où l'on attendait un encouragement clair et un partenariat exemplaire avec celles qui concourent aujourd'hui à plus de 80 % à l'investissement public, c'est-à-dire les collectivités territoriales.

J'en viens à l'objet de la discussion de ce matin et du vote qui va suivre. (« Ah ! » sur plusieurs bancs.)

Nous connaissons le programme : se taire, faire vite et applaudir. Mes chers collègues, êtes-vous certains que cette parodie de débat parlementaire soit à la hauteur de la situation que nous traversons ? (« Non ! » sur plusieurs bancs.)

Aujourd'hui, le Parlement réuni à Versailles sera, comme l'a dit Robert Badinter, le théâtre de la monocratie triomphante en majesté. Suivront une suite de monologues, en l'absence de celui qui nous aura convoqués pour s'exprimer et, ensuite, disparaître.

Certes, me dites-vous, tout cela était contenu dans la révision de la Constitution, révision à laquelle nous étions opposés parce que nous avions vu la tromperie d'un prétendu renforcement du Parlement et les dangers manifestes pour l'équilibre de nos institutions.

Nous allons bientôt célébrer son premier anniversaire et, permettez-moi de vous dire le fond de notre pensée, c'est un échec total, reconnu bien au-delà de ceux qui l'avaient combattue.

Sous ce régime d'omniprésidence, le pouvoir gouvernemental s'est érodé, le Premier ministre a été relégué au rang de premier des ministres, et son rôle de coordination de l'action gouvernementale a été transféré au secrétaire général de l'Élysée, effacement d'ailleurs confirmé par la tenue de ce Congrès.

Les nouveaux droits du Président ne sont accompagnés d'aucune remise en cause de ses pouvoirs au profit du Parlement. Il dispose toujours du droit de dissolution et demeure politiquement irresponsable. Il peut tout, mais n'est responsable de rien.

Quant à la prétendue réhabilitation du Parlement, la pratique a montré qu'elle n'était que trompe-l'oeil face au renforcement, bien réel, de l'exécutif.

Le Président a une idée le lundi, il exige une loi pour le mardi. La déclaration d'urgence, rebaptisée procédure accélérée, n'a jamais été autant pratiquée, plus d'ailleurs par tactique qu'en raison du contenu même des réformes envisagées.

Le partage de l'ordre du jour, improvisé et mal calibré, produit, force est d'en convenir, un encombrement tel qu'il est devenu impossible à organiser dans la sérénité. Le rôle accru conféré aux commissions tourne au marathon diurne et nocturne, transformant notre travail parlementaire en véritable vaudeville.

Quant aux semaines d'initiative et de contrôle parlementaire, elles se révèlent au mieux des coquilles vides, au pire une piteuse mise en scène.

Nous sommes bien loin des avancées indispensables à notre démocratie, parmi lesquelles, notamment, une meilleure participation des citoyens.

Mes chers collègues, mon groupe ne votera pas la proposition de résolution modifiant le règlement du Congrès, qui entérine l'un des éléments les plus contestables de la révision constitutionnelle, qui plus est dans des conditions de mépris inacceptables pour le Parlement et la représentation nationale.

Nous avons bien compris que, pour le Président de la République, le temps parlementaire était un temps perdu, un débat superflu. Nous savons ce que l'on attend de nous : nous taire, faire vite, applaudir. Les instruments de mise au pas du Parlement sont en place. Ce n'est pas notre conception d'une République moderne, ouverte à tous, et soucieuse de la participation des citoyens.

Parce que les parlementaires ne sont pas des spectateurs mais des acteurs de la vie politique, Nous voterons contre votre proposition de modification du règlement et nous ne participerons pas au débat de sourds que vous nous octroyez. (Applaudissements.)

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