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Intervention de Nicole Ameline

Réunion du 14 janvier 2009 à 15h00
Déclaration du gouvernement sur la situation au proche-orient et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Ameline :

Ils ajoutent au cortège de souffrances, de violences qui n'ont cessé de jalonner l'histoire de ces deux peuples, dont cependant les destins sont indissociablement liés.

Notre groupe parlementaire soutient sans réserve l'initiative de paix et l'appel immédiat à l'arrêt des combats portés courageusement par le Président de la République. Grâce à la confiance établie, grâce à l'esprit de dialogue qui a su être construit avec l'ensemble des acteurs régionaux, les premières bases d'un cessez-le-feu ont été posées. Le groupe d'amitié parlementaire dirigé par Claude Goasguen est du reste allé sur place, sur le terrain, relayer ce message de paix.

Rien n'est plus important – mais je crois que tous les orateurs l'ont dit à cette tribune – que de mettre un terme à ces combats. Et nous saluons, de ce point de vue, toutes les initiatives qui convergent dans ce sens. Je pense aux pays européens que vous avez cités, monsieur le ministre, la Suède, la Norvège, mais aussi, bien évidemment, aux autres pays, tels le Qatar ou bien encore la Turquie, qui ne ménagent pas leurs efforts.

En effet, si nous comprenons et si nous respectons le fait que l'État d'Israël mette au premier rang de ses préoccupations la sécurité et la protection de ses citoyens, si nous considérons que cette exigence, cette aspiration légitime doit être comprise et admise dans l'ensemble de la région, nous considérons que seule l'existence d'un État palestinien constitue la réponse durable à cette exigence.

La guerre ne saurait donc être une solution durable. Elle risque, au contraire, de fragiliser l'espoir de voir naître prochainement un État palestinien et de nourrir le ressentiment d'une partie du monde islamique à l'égard de l'Occident.

Nous en voyons parfois l'expression jusque dans nos propres territoires et ici même en France par l'augmentation inacceptable et inquiétante d'actes antisémites.

La guerre réduit, certes, la capacité militaire du Hamas. Mais ne risque-t-elle pas aussi, indirectement, d'en renforcer l'aura dans une certaine partie du monde ? La perpétuation du conflit israélo-palestinien avec son cortège de violences affecte sensiblement l'ensemble de l'équilibre non seulement de cette région, mais, on peut le dire également, notre sécurité européenne.

Monsieur le ministre, l'opération en cours, telle qu'elle est conduite, risque, à certains égards, de ne pas atteindre son objectif. Ainsi que l'écrit Dominique Moisi, il n'y a pas de victoire possible sur ceux qui ne sont pas seulement prêts à sacrifier leur vie, mais attendent la mort comme une victoire.

Que peut-il sortir d'un confit qui durerait ? Nous sommes évidemment dans une situation paradoxale où la force risque au contraire d'affaiblir le vainqueur. Du reste, les accusations, la condamnation, les critiques qui sont faites aujourd'hui vis-à-vis de l'État d'Israël démontrent, s'il en était besoin, que cet État est aujourd'hui en train d'en payer le prix et se trouve sous le regard du monde.

Que dire des populations civiles ? Nous sommes extrêmement sensibles au fait que, aujourd'hui, des femmes, des hommes, dans des conflits de plus en plus nombreux, lorsqu'ils impliquent des mouvements non étatiques, se trouvent exposés – je devrais dire instrumentalisés. Nous sommes bien loin du droit international et des conventions de Genève. Il serait très important que nous puissions nous saisir de cette question.

Nous sommes également inquiets quant à la stabilité régionale, précaire et aujourd'hui ébranlée. L'Iran, toujours avide de renforcer son influence dans cette partie de la Méditerranée, n'a pas ménagé son soutien, tant logistique que financier et politique. De son côté, la rue arabe exerce une pression croissante sur les États modérés, plus ouverts vis-à-vis de l'Occident. Les réponses que nous attendons sont bien sûr à la fois régionales et internationales.

Pensez-vous que la présence, aujourd'hui, du Secrétaire général de l'ONU dans la région, l'investiture prochaine dans quelques jours du nouveau président des États-Unis puissent accompagner de manière déterminante les efforts conduits par la France ?

Nous appelons à notre tour l'Europe à s'impliquer plus fortement encore. Nous soulignons qu'elle en a la légitimité, la capacité. L'Europe a été aussi la terre de batailles incessantes, de souffrances, de luttes épuisantes entre ses peuples, mais elle est aussi la terre qui a réussi, avec le multilatéralisme, dont elle est certainement un peu le dépositaire dans le monde, à démontrer sa capacité à résoudre les conflits.

Est-ce le moment – nous en sommes convaincus – de renforcer notre partenariat avec les États-Unis dans une relation plus forte, transatlantique, ciblée sur ces sujets essentiels, et notamment sur la lutte contre le terrorisme ?

L'Europe, je le disais, a la légitimité et la capacité à agir. Elle peut apporter une contribution déterminante à l'élaboration d'une solution nouvelle, durable, dont nous connaissons – vous les avez rappelés – les termes : deux États, deux peuples dans le respect des frontières connues, reconnues et garanties. Notre rôle est probablement celui-là : apporter des garanties et assurer les conditions d'un développement économique sans lequel la paix reste une illusion.

L'Europe, premier donateur de l'aide aux Palestiniens, doit, monsieur le ministre, porter son effort politique au niveau de son engagement économique. Or que constatons-nous ? Depuis des années, le taux de chômage est compris entre 30 et 40 % dans la bande de Gaza. La pauvreté y est intense. Elle alimente évidemment l'extrémisme.

L'Union européenne a compris depuis longtemps qu'elle devait aider au développement des territoires palestiniens. Cette aide considérable – près de 500 millions d'euros en 2008 – ne semble pas répondre aux critères d'efficacité nécessaires. Bien au contraire !

Il y a près d'un an, l'Union européenne lançait un nouveau mécanisme, qui remplaçait le système précédent, dont le coût était particulièrement élevé. Monsieur le ministre, quel bilan tirez-vous aujourd'hui de son fonctionnement ? Ne faut-il pas s'appuyer sur ceux qui, au niveau du peuple palestinien, sont engagés avec le souci de faire que cette aide soit particulièrement efficace et durable. Il y a là un vrai sujet de réflexion.

La présidence tchèque de l'Union européenne a annoncé son souhait d'organiser une conférence des donateurs pour répondre aux besoins humanitaires de la population de Gaza. Cette idée est intéressante. Nous avions déjà réuni, le 17 décembre 2007, à Paris, une conférence des donateurs. Comment concilier cette double démarche ?

Ne pensez-vous pas que, à plus long terme, un volet des projets à conduire dans le cadre de l'Union pour la Méditerranée pourrait viser spécifiquement au développement économique de la bande de Gaza, en lien avec ses voisins ?

Je voudrais insister sur l'intérêt du déploiement d'une force internationale chargée de garantir un cessez-le-feu à Gaza. Le Parlement européen porte cette idée. Dans un instant, le président de la commission des affaires étrangères la reprendra. Je crois que c'est un élément très important.

L'Union européenne aurait tout à gagner à se faire le relais de cette demande auprès des Nations unies, puis à proposer d'en assurer la conduite. Le fait que la France assure actuellement la présidence du Conseil de sécurité ne peut d'ailleurs que l'y aider. L'Europe, vous l'aurez compris, doit, pour nous, s'affirmer comme une puissance d'équilibre régulatrice. La France est à sa place. Elle doit jouer son rôle. Elle doit poursuivre l'expression du droit et le faire avec courage, mais je dirai aussi de toute son âme et de toutes ses forces, convaincue et consciente qu'elle est qu'il n'y aura pas de paix durable, qu'il n'y aura pas de solution durable au Moyen-Orient si nous ne sommes pas tous persuadés que ce problème est le nôtre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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