Depuis soixante ans que dure ce conflit au Proche-Orient, nous avons désormais le recul historique pour comprendre qu'aucune victoire militaire momentanée n'a assuré à la société israélienne la possibilité de vivre durablement en paix.
Israël, en effet, n'affronte pas simplement des États ou des fractions armées dont elle pourrait détruire durablement le commandement et l'infrastructure. C'est pourquoi la seule solution passe par l'avènement d'une véritable Realpolitik israélienne, capable de se situer réellement dans le long terme. La disqualification successive de ses interlocuteurs est une impasse. Récuser le Fatah libère l'espace au Hamas, et ce processus est sans fin, avec des acteurs toujours plus radicaux. Israël doit revenir à l'intuition fondamentale d'Itzhak Rabin : « Je combattrai le terrorisme comme s'il n'y avait pas de processus de paix, mais je poursuivrai le processus de paix comme s'il n'y avait pas de terrorisme ». Combattre les attaques du Hamas contre son territoire n'empêche pas de discuter simultanément les conditions de la paix avec les interlocuteurs du camp d'en face. De même, ni la division du peuple palestinien ni son affrontement militaire interne ne renforcent sa cause. Quant à l'espoir de détruire l'État d'Israël pour instaurer un État peut-être islamique aux portes de l'Europe, ce projet qui est porté par la charte du Hamas mais n'est plus, semble-t-il, celui de tous les responsables du mouvement, est inacceptable : ce n'est qu'une illusion, source de souffrances pour le peuple palestinien. Yasser Arafat avait rompu avec la charte de l'OLP qui préconisait la destruction de l'État d'Israël, pour avancer vers la paix et l'État palestinien. La seule solution est connue et reconnue. François Mitterrand l'avait affirmée à la tribune de la Knesset en 1982 : il n'y a pas d'autre solution au Proche-Orient qu'une paix juste et durable sur la base d'une double exigence : le droit de l'État d'Israël à l'existence et à la sécurité et le droit des Palestiniens à un véritable État viable dans lequel ils pourront mener une vie digne.