On n'a pas tort de souligner les difficultés de gestion et d'organisation de l'hôpital moderne. Il serait en revanche dangereux de sous-estimer l'impact financier qu'engendrent obligatoirement les progrès techniques.
Le profit n'est pas la finalité de l'hôpital. Sa gestion, pour rigoureuse qu'elle doive être, ne peut-être subordonnée à des objectifs comptables. L'hôpital n'a qu'un objectif : soigner les malades, tous les malades. Ce principe fondamental, beaucoup de professionnels de santé craignent que la tarification à l'activité ne le mette à mal si la codification des actes continue à ignorer l'activité réelle des hôpitaux. Un lit vide dans un hôpital, ce n'est pas une faute de management, c'est un espoir pour le malade ou l'accidenté qui va venir l'occuper.
Vous avez raison, madame la ministre, l'hôpital n'est pas une entreprise ; mais il le devient quand, cessant d'être un havre pour ceux qui souffrent, il n'est plus qu'un terrain d'application pour ces principes arbitraires et délirants dont tout aujourd'hui, en France comme ailleurs, signale la faillite.
Ces services des urgences qui acceptent tout le monde, où chacun peut se présenter spontanément – illustrant ainsi, outre la liberté, l'égalité, et la fraternité – ces urgences où, pour tant de nos compatriotes, s'apaisent les angoisses de la maladie ou de l'accident, où renaît l'espoir, où revient le sourire, la seule raison qui justifie qu'on en modifie l'organisation, c'est de les rendre encore meilleures que ce qu'elles sont.
Moins qu'ailleurs, le personnel peut y être transformé en variable d'ajustement. Les licenciements auxquels nous assistons dans de nombreux établissements sont de mauvais augure.
Pourquoi le personnel est-il à ce point attaché à son travail ? Pourquoi surmonte-t-il non seulement la fatigue et la tension qu'engendre son activité, mais aussi les conditions généralement lamentables et parfois effroyables dans lesquelles il l'exerce ? Parce qu'il a une conscience élevée de sa mission. Ce personnel supporte beaucoup de choses, madame la ministre, même s'il est bien mal récompensé par des salaires souvent dérisoires. Il est capable, en cas de crise, de se mobiliser avec un dévouement inouï.