Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, chers collègues, nous sommes probablement l'une des rares démocraties dans lesquelles une intervention militaire à l'étranger, sa poursuite, l'accroissement envisagé de ses moyens, ou encore la création d'une base importante dans un autre pays, ne puissent faire l'objet d'un débat au Parlement sans une demande réitérée et pressante de l'opposition. Et ne parlons même pas d'un vote, qui reste aujourd'hui interdit.
Autrement dit, monsieur le Premier ministre, vous n'êtes pas capable d'anticiper de deux mois le texte de loi sur les institutions qui va venir en discussion au mois de mai prochain à l'Assemblée nationale et qui prévoit que lorsqu'une intervention militaire extérieure excédera six mois, sa prolongation devra être autorisée par le Parlement, et ce par un vote. Il y a tout de même de quoi s'inquiéter sur la crédibilité de ce texte.
Il est vrai que pendant les six premiers mois d'une intervention militaire, le Parlement n'aura pas voix au chapitre, il pourra seulement être informé, peut-être avec un débat, mais sans vote.
Que de subtilités pour arriver en fait à limiter le droit du Parlement de s'exprimer et de voter sur la pertinence politique d'un engagement militaire !
Le deuxième point que je voudrais souligner au nom du groupe de la gauche démocrate et républicaine, c'est la dérive atlantiste d'un Président de la République dont je ne suis pas sûr qu'il ait été mandaté pour cela.
Dérive atlantiste qui s'est manifestée à plusieurs reprises.
D'abord, par une cour à George Bush totalement à contretemps : à contretemps de l'évolution de l'opinion des Américains eux-mêmes et de l'opinion mondiale concernant la stratégie dangereuse du Président des États-Unis ; à contretemps aussi car dans dix mois, M. Bush ne sera plus le Président des États-Unis.
Dérive atlantiste, car le Gouvernement soumet complètement la construction d'une politique de sécurité et de défense européenne à une intégration plus forte, pour ne pas dire totale, de la France dans l'OTAN, alors même que la seule justification à l'existence d'une politique de sécurité et de défense européenne, c'est son autonomie et son indépendance. Sinon, elle n'a pas de sens.
Dérive encore accrue quand, sans débat, la France prévoit l'implantation d'une nouvelle base militaire face à l'Iran, s'engageant un peu plus, là aussi, dans les espaces de guerre américains.
Enfin et pour ne pas allonger la liste, dernier avatar de cette dérive atlantiste qui confine à une soumission aux souhaits et enjeux américains, c'est la volonté d'envoyer 1 000 hommes supplémentaires en Afghanistan, soit une augmentation de 60 % des effectifs.
S'agit-il de soulager l'effort de guerre des États-Unis en Irak ? S'agit-il de hâter une solution au problème afghan, alors que tout le monde sait depuis très longtemps que ce type d'intervention se termine par un enlisement irrémédiable et lourd de conséquences, dont l'URSS a donné le plus bel exemple ?