Or cette croissance à laquelle le Gouvernement dit croire si fort n'est pas au coeur du dispositif d'allocation des ressources aux collectivités territoriales. Vous préférez indexer les dotations, non pas sur la croissance du PIB, mais sur l'évolution de l'inflation. À moins de considérer que le Gouvernement souhaite plus d'inflation que de croissance, je vois mal comment ce dispositif pourrait être favorable aux collectivités. Alain Rousset l'a rappelé à l'instant, il est d'autant plus injuste de procéder de la sorte que les collectivités territoriales ont joué un rôle moteur dans l'accompagnement de la croissance au cours des vingt dernières années.
L'investissement des collectivités territoriales, mesuré à partir de la formation brute de capital fixe, est passé de 66 % en 1982 à 72 % en 2006, tandis que leur endettement diminuait de 29 % du PIB en 1982 à 11 % aujourd'hui. Cela démontre qu'il est possible, dans la gestion des affaires publiques, de se désendetter tout en investissant davantage et que les collectivités territoriales ont été bien gérées, qu'elles ont participé à la croissance globale. Il y a donc une forme d'injustice à déconnecter la progression de leurs dotations de la croissance du PIB pour l'indexer sur l'inflation.
Le dispositif que vous nous proposez, à l'article 12 de la loi de finances, rend la fiscalité de moins en moins locale, de moins en moins lisible et de plus en plus injuste. Les dispositions arrêtées par les gouvernements depuis 2002 réduisent très sensiblement la portée du principe d'autonomie de gestion des collectivités territoriales et leur marge fiscale. Ainsi, le plafonnement à 3,5 % de la valeur ajoutée de la taxe professionnelle neutralise 50 % des bases de taxe professionnelle pour les collectivités territoriales. En 2002, votre prédécesseur a décidé de diminuer de 40 % les bases de recettes de taxe professionnelle pour les professions libérales, s'engageant à les compenser pour les collectivités territoriales. Aujourd'hui, nous constatons une diminution de 22 % de la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Non seulement l'État réduit les marges de manoeuvre fiscales des collectivités territoriales, mais il n'honore pas ses engagements. Voilà comment il limite le principe d'autonomie des collectivités territoriales !
La fiscalité est de moins en moins lisible parce que le contribuable qui paie la facture de ce transfert de gestion de la dette de l'État vers les collectivités territoriales est le particulier, alors que le Gouvernement prétend vouloir diminuer la charge fiscale qui pèse sur lui pour encourager la croissance. Vous transférez vers les collectivités la charge fiscale qui pèse sur les personnes physiques tout en déclarant vouloir la limiter au plan national : il y a là une contradiction majeure.
Enfin, la fiscalité est de plus en plus injuste en raison du rôle des collectivités locales comme investisseurs et de l'excellence de leur gestion par rapport à celle de l'État. En réalité, le projet que nous examinons aujourd'hui consiste à transférer de l'État vers les collectivités territoriales, qui ont pourtant un rôle de correction des inégalités sociales et de mise en oeuvre de la solidarité sur les territoires, la charge d'une dette qu'il ne parvient pas à maîtriser. C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons qu'exprimer les plus grandes réserves sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)