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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 30 octobre 2007 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Relations avec les collectivités territoriales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, nos collectivités vivaient sous le fragile abri du contrat de solidarité et de croissance qui a régi les relations entre l'État et les collectivités territoriales depuis 1999. Je commencerai donc par vous proposer d'observer une minute de silence pour son décès brutal, vendredi dernier, dans cet hémicycle. (M. Chassaigne s'interrompt quelques instants.) Je vous remercie.

La disparition du contrat de solidarité et de croissance est imposée sans concertation, sans choix partagés : curieuse conception, madame la ministre, de la contractualisation. Le Premier ministre avait prévenu, début juillet, que les dotations de l'État aux collectivités ne devaient pas croître globalement plus que le taux d'inflation. Or nous constatons que, malgré les réactions unanimes des associations d'élus, cette funeste promesse a été tenue puisque le PIB n'est plus pris en compte dans l'évolution du total des dotations. Seule la DGF continuera, de façon dérogatoire dit-on, d'être indexée sur la croissance, du moins pour l'année 2008, période d'élections municipales et cantonales.

Le tour de passe-passe budgétaire est donc toujours le même depuis de nombreuses années : faire supporter pour partie aux collectivités les choix désastreux qui affectent les ressources de l'État, à savoir les cadeaux fiscaux faits aux plus riches, toujours plus importants d'année en année.

Il a donc fallu, en particulier, amputer la dotation de compensation de taxe professionnelle de près de 50 %, soit 215,6 millions d'euros, au détriment des collectivités et bassins d'emplois fragilisés par les fermetures d'entreprises et par la réduction de la taxe professionnelle. C'est sans compter que cette dotation alimente le fonds d'indemnisation des catastrophes naturelles à hauteur de 20 millions d'euros – ainsi avons-nous droit aux vases communicants avant les inondations. Cela me conduit, madame la ministre, à vous demander si la DCTP, principale variable d'ajustement, la seule même, jusqu'à cette année, sera vouée à disparaître au détriment des engagements pris auprès des collectivités territoriales.

Au fond, cette mesure s'inscrit dans la même logique que la non-compensation intégrale des dépenses nouvelles transférées par l'État. C'est ainsi que le piège se referme. D'une part, on fait financer par les contribuables locaux la transformation des collectivités en services déconcentrés de l'État chargés de compétences nouvelles et du versement de diverses prestations ; d'autre part, on réduit les dépenses de l'État en enterrant le contrat de solidarité et de croissance.

Les collectivités territoriales seront alors contraintes de freiner un effort pourtant essentiel en faveur des habitants. Déjà, l'an dernier, les dépenses et les produits de fonctionnement ont connu une croissance moindre que l'année précédente. De plus, la hausse des dépenses d'investissement est moins soutenue : 7,1 % en 2006 contre 8,3 % en 2005. L'autofinancement, qui pourtant augmente, ne suffit plus à financer l'investissement, d'où le recours de plus en plus massif à l'emprunt. Les collectivités hypothèquent ainsi leurs investissements à venir. On sait pourtant que les collectivités, qui concourent à hauteur de 70 % aux investissements civils, contribuent au maintien de près de 850 000 emplois dans le secteur privé et associatif, d'autant plus que les emplois aidés par l'État se réduisent comme peau de chagrin.

L'évolution des enveloppes suivant la seule inflation implique de fait une « croissance zéro » des dotations. En effet, les collectivités doivent faire face à un écart grandissant entre le « panier du maire » – à savoir l'augmentation de l'indice des prix des dépenses spécifiquement communales –, et le taux d'inflation. C'est donc le pouvoir de dépense des collectivités dans leur ensemble qui s'érode de plus en plus. Peut-on parler de stabilité ?

Si elles veulent assurer le développement d'investissements indispensables au bien-être de leurs habitants, les collectivités, pour s'en sortir, devront recourir à une hausse de la fiscalité. Seulement, les impôts locaux ont-ils vocation à se substituer aux baisses des dotations de l'État ? Sans compter que tout le monde s'accorde à qualifier d'inadaptée une fiscalité dont toutes les associations d'élus sans exception exigent la réforme.

Or, plutôt que de moderniser cette fiscalité, le Gouvernement risque d'aggraver son caractère injuste. Ainsi, une réflexion est menée, sous l'influence du Medef, pour ramener le plafond de la taxe professionnelle à 3 % de la valeur ajoutée. Quand on connaît le manque à gagner induit par le plafonnement à 3,5 % de la valeur ajoutée, on mesure le risque d'une telle mesure.

Ainsi, le choix vers lequel le Gouvernement veut entraîner les collectivités est une délégation massive au privé de pans entiers du service public local…

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