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Intervention de Alfred Almont

Réunion du 22 janvier 2008 à 21h30
Organisation du service public de l'emploi — Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le sénat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlfred Almont :

C'est ainsi qu'il prévoit, dans un premier temps, en fusionnant l'ANPE et le réseau opérationnel des ASSEDIC, de créer un opérateur unique pour assurer à la fois le placement et l'indemnisation des demandeurs d'emploi, pour mettre l'accent sur l'accueil et l'accompagnement des demandeurs d'emploi en simplifiant leurs démarches.

Une telle politique, qui concerne en somme l'avenir du service public de l'emploi au sein de la République, pour ambitieuse qu'elle soit, ne saurait manquer de prendre en compte la situation particulière de l'emploi outre-mer, et bien sûr à la Martinique, sous peine d'apparaître comme discriminatoire.

Il est vrai que dans le cadre de la concertation qu'il a voulue, le Gouvernement a confié à la mission de l'IGAS le soin de réaliser un audit sur l'ensemble du territoire national en amont de ce grand projet de réforme. Il faut cependant regretter que cette mission ne se soit pas intéressée à l'outre-mer où pourtant, pour ne citer que cet exemple, les taux de chômage y sont encore extravagants – près de 28 % aux Antilles, et de 40 % à la Réunion – avec l'incidence que l'on sait sur la précarité.

Cette réforme, madame la ministre, suscite des préoccupations très légitimes de la part des salariés des ASSEDIC et de l'ANPE. Chez nous, ils s'interrogent, ils craignent des suppressions d'emplois du fait notamment du transfert de la collecte des cotisations d'assurance chômage à l'URSSAF, par ailleurs de nature, selon eux, à altérer la gestion paritaire du régime d'assurance chômage et ils appellent encore des garanties sur le statut futur des personnels.

Je suis, dès lors, conduit à vous faire part de mes observations, madame la ministre, sur certains points.

Lors de la présentation de ce projet de loi, vous avez fait référence au respect des partenaires sociaux en précisant que le régime d'indemnisation demeurait sous la responsabilité de l'UNEDIC et en indiquant que la gouvernance se ferait autour des deux financeurs, l'État et les partenaires sociaux. Cela est effectivement prévu dans votre projet, mais au niveau national uniquement.

Pour la Martinique et, d'une manière générale, pour les régions d'outre-mer, il est essentiel que le rôle et l'apport des partenaires sociaux soient précisés pour garantir la prise en compte des réalités économiques régionales et, bien entendu, les résultats recherchés. Les représentants des employeurs et des salariés apportent la connaissance des besoins des entreprises régionales, nous le savons. Ils peuvent ainsi orienter la politique régionale de l'emploi et de la formation. Pour illustrer mon propos, je rappelle que sur dix stagiaires formés par les ASSEDIC, huit sont reclassés. Le financement de l'assurance chômage provient des cotisations des employeurs et des salariés. Dans ces conditions, il est opportun que les financeurs aient également un rôle décisionnaire au plan régional.

Pour répondre à cet objectif de prise en compte des problématiques régionales, le positionnement des partenaires sociaux pourrait dès lors se situer au niveau d'une « instance régionale » de coordination du service public de l'emploi, avec un rôle décisionnaire, ayant pour mission de favoriser la concertation entre les différents acteurs et d'assurer la meilleure coordination des politiques de formation professionnelle et d'emploi. A cet égard, le Sénat a préconisé la création d'un « comité régional pour l'emploi », mais sa composition rappelle celle d'autres institutions du même type créées naguère et qui n'ont pas pu remplir leur mission faute de moyens administratifs et budgétaires. Le moment me paraît de ce fait venu d'instituer un véritable paritarisme qui permette aux représentations salariales et patronales d'assurer, avec les moyens nécessaires, l'administration de telles structures paritaires.

Sur un deuxième point, le nouvel organisme aurait notamment pour mission le reclassement des salariés privés d'emploi et l'analyse du marché du travail. Le transfert du recouvrement à l'ACOSS en 2012 aura pour conséquence la perte de la relation privilégiée à l'entreprise.

On peut craindre que le transfert du recouvrement ne soit de nature à pénaliser, à terme, ce nouvel organisme dans sa mission de reclassement et d'analyse du marché du travail. L'intervention de l'URSSAF dans la collecte des fonds peut en effet altérer les capacités et la fiabilité de l'UNEDIC à produire des statistiques et des analyses en matière d'emploi. Pour pallier cette difficulté, il est indispensable de garantir la mise à disposition du fichier des entreprises actualisé en temps réel. Cela nécessite la réalisation d'outils performants permettant ce transfert de données en continu.

On peut craindre en outre que le transfert du recouvrement à l'ACOSS en 2012 ne porte atteinte à la carrière des agents affectés aujourd'hui à cette fonction au sein de l'assurance chômage – 1 500 agents au niveau national, dix agents en Martinique. Il faut donc pouvoir garantir le repositionnement de ces agents dans le nouvel organisme, avec la mise en oeuvre de parcours de professionnalisation adaptés.

Le projet de loi prévoit enfin un droit d'option pour les agents de l'ANPE entre leur statut actuel et la convention collective du nouvel organisme. Les agents de l'assurance chômage n'ont pas ce droit d'option puisque c'est la convention collective du nouvel organisme qui leur sera appliquée, sans garantie de maintien des conditions actuelles. Si un amendement du Sénat prévoit le maintien de la convention collective de l'assurance chômage jusqu'au mois d'octobre 2010, il est nécessaire que, au-delà, les conditions de rémunération et de déroulement de carrière du personnel de l'assurance chômage soient garanties, sans préjuger de l'issue des négociations.

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