Monsieur le président, mes chers collègues, quand le Premier ministre nous a assuré que la révision constitutionnelle de juillet 2008 apporterait « un véritable poids démocratique au Parlement », le pensait-il vraiment ? Quelle que soit la réponse que l'histoire apportera à cette question, il faut admettre que, si cette révision visait bien l'Assemblée nationale, c'était en fait pour l'asservir à la volonté de l'exécutif.
Il m'appartient, avec mes collègues de l'opposition, de vous rappeler la lourde responsabilité que nous impose notre qualité d'élus de la nation et de représentants du peuple désignés par le suffrage universel. Nous sommes démocratiquement investis de la charge souveraine de veiller à la préservation des droits et des libertés, en refusant toute atteinte à l'État de droit et à son expression démocratique. Telle est notre légitimité.
Aux questions qui doivent nous imprégner lorsque nous légiférons sur le sens de la loi, sur sa qualité et sur son applicabilité, s'en ajoute une qui porte sur le fondement même du régime parlementaire : exprimons-nous l'intérêt général ? Lorsque la loi devient l'instrument d'une stratégie politique, un artifice en quelque sorte, et plus encore lorsque les modalités de son vote font l'objet d'une instrumentalisation partisane, il s'agit d'un manquement grave aux principes démocratiques et au mandat que les citoyens nous ont confié.
Votre réforme est-elle, oui ou non, un progrès pour le fonctionnement de l'Assemblée, pour son organisation, pour son travail, et donc pour notre démocratie – ce qui constituerait la seule évolution que nous puissions accepter ? Je dois répondre par la négative, avec regret, car j'aime notre Assemblée nationale et que je suis fier de participer, le plus et le mieux possibles, à l'oeuvre législative, parce que je veux rester fidèle à ceux qui m'ont élu.
Une réforme censée revitaliser notre assemblée ne peut naître de la mort programmée des droits du Parlement, qui résultera de la réduction de ceux de l'opposition.