Vous paraissez très choqués par ce que je viens de dire, mais ce n'est que la vérité, et j'espère que vous vous en souviendrez !
Mais revenons-en à ce dont je veux vous parler, à savoir la situation du port de Marseille, puisqu'il se trouve, ne vous en déplaise, que je suis le président de la région dont Marseille est la capitale. Le chef de l'État semble avoir une reconnaissance particulière envers cette ville, si l'on en juge d'après la lettre qu'il a adressée au maire de Marseille entre les deux tours des élections municipales. Dans cette lettre portant sur seize points, le président de la République apportait son appui non pas au candidat Gaudin, mais à Marseille, « capitale de la Méditerranée ». Si je suis fier des termes employés par le chef de l'État, il me semble que ce rôle de capitale de la Méditerranée, ou de plus grand port de France et de la Méditerranée, Marseille le doit avant tout au savoir, au dévouement et à la compétence de ceux qui ont fait son histoire maritime et commerciale. Attaché au développement de la région que je préside, comme tous les Provençaux, les Alpins et les Azuréens, je déplore que l'État ait refusé à Marseille les moyens nécessaires pour que la Méditerranée ne se voie pas réduite au rang de couloir à bateaux en provenance de Chine ou du Brésil et se rendant à Malte ou à Tanger – dans ce nouveau port que le roi du Maroc a, à juste titre, voulu doter son pays.
La position géostratégique exceptionnelle du port de Marseille, au coeur industriel et économique de l'Europe, constitue un atout considérable. Ce projet de loi n'est malheureusement pas à la hauteur de ce que nous espérions. Car si Marseille a besoin de toute urgence d'une loi, elle a surtout besoin de l'aide de l'État pour se doter d'un équipement à la hauteur des ambitions de la France. Après avoir été si longtemps scandaleusement délaissée par l'État – je remercie M. Jibrayel d'avoir souligné l'effort de la région pour le suppléer –, Marseille doit maintenant être équipée et se voir doter d'un hinterland. Il ne suffit pas de dire qu'avec les terminaux Fos 2XL et Fos 3XL, nous allons disposer de l'espace nécessaire pour accueillir les conteneurs qui ne peuvent plus l'être à Barcelone ou à Gênes. En plus de ses équipements, Marseille doit bénéficier de la garantie de l'État pour la qualité de gestion de son port, une gestion qui donne toute sa place à la qualité que certains d'entre nous reconnaissent au service public.
À l'heure où le peuple irlandais vient d'envoyer, après le peuple français, un message très clair à l'Europe, ne devons-nous pas en tirer des conclusions sur ce qu'attendent les peuples européens – à défaut de leurs dirigeants, malheureusement trop souvent coupés des réalités de terrain – et donner à des ports comme Marseille, les moyens d'une gestion de qualité que seul le service public est à même d'assurer ? La loi qui nous est proposée aujourd'hui met fin à tout espoir de dialogue social avec les travailleurs du port de Marseille-Fos. Au lieu d'écouter leurs revendications orientées vers la recherche de qualité, le Gouvernement s'apprête à passer en force.
Pour notre part, nous refusons cette conception du dialogue social et afin de répondre aux attentes des travailleurs du port de Marseille et aux cris angoissés des peuples européens face à la mondialisation, nous voterons contre ce projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)