Sortir de la crise, c'est d'abord en avoir conscience. Si l'on peut tirer un parti de la situation actuelle, c'est en faisant en sorte que nos concitoyens comprennent la gravité du moment dans lequel nous nous trouvons.
À la différence d'autres pays ayant traversé depuis dix ou quinze ans des crises plus localisées – je pense au Japon ou à la Finlande – et dans lesquels la conscience de la crise a été très aiguë, ce qui a aidé le Gouvernement et les Parlements à proposer et à faire partager des solutions, dans notre pays, le diagnostic et les solutions qui l'accompagnent ont toujours suscité beaucoup de doutes sur l'état des finances publiques et la fragilité de l'économie. De larges cercles de l'opinion ont toujours affiché leur scepticisme devant l'alerte et les solutions exigeantes qu'elle requérait.
Que faire pour sortir de la crise ? Faire en sorte, d'abord, que nos concitoyens prennent avec nous conscience de la crise. C'est une circonstance nouvelle dans notre pays, et la responsabilité pédagogique du Gouvernement et de la représentation nationale est majeure.
Pour sortir de la crise, il faut ensuite que des mesures soient prises. Ces mesures ont été conçues par l'exécutif, proposées à la représentation nationale et, vous l'avez annoncé tout à l'heure, madame la ministre, mises en oeuvre dès aujourd'hui.
Il fallait trouver, pour rétablir le système financier, un juste équilibre. Ne pas mobiliser des moyens excessifs sous peine de laisser croire que le système était plus fragilisé qu'on ne le disait ; en mobiliser suffisamment pour que le dispositif soit efficace et que l'économie ne soit pas plus gravement pénalisée qu'elle ne l'est. Vous avez conçu et nous avons voté ce dispositif. Vous avez décidé avec les banques des premières conditions de mise en oeuvre. Vous avez notre pleine confiance pour l'application de ces mesures.
Voilà pour l'urgence. Mais la question principale qui se pose en ce début de discussion sur le budget et la loi de programmation touche à l'avenir. Nous vous faisons confiance pour l'urgence, nous voulons aussi vous faire confiance pour l'avenir et nous souhaitons en discuter.
Et si, pour une fois, la France ne loupait pas le coche de la reprise, lorsque celle-ci surviendra ? Il peut paraître curieux d'évoquer la reprise en pleines difficultés économiques et financières, mais la discussion budgétaire sur la programmation des dépenses publiques doit nous y conduire.
L'histoire de ces dernières années nous montre qu'à chaque récession la France a été touchée comme les autres pays, qu'à chaque mouvement de reprise, en revanche, elles est repartie plus tard et moins bien que ses partenaires. Pour que cette fois, la France ne loupe pas le coche, il faut que le budget, cette année et pour les trois années qui suivent, permette à l'État d'être performant. Et pour cela, il faut toujours garder à l'esprit que la réduction des déficits et la maîtrise de la dette sont nécessaires à la crédibilité de la signature de l'État, à sa capacité d'action et à son efficacité.
Je le disais tout à l'heure, il ne s'agit pas d'être confit en bigoterie devant tel ou tel chiffre mais de rappeler qu'il existe une ligne jaune : elle ne nous est pas imposée, c'est celle de la sagesse, de l'intelligence et de la cohérence de notre politique.
La crédibilité du budget passe aussi par des choix. Vous avez dit tout à l'heure, madame la ministre, qu'il fallait stabiliser les prélèvements obligatoires – je suis d'accord – mais que cela n'interdisait pas de créer des prélèvements nouveaux, quitte à en diminuer d'autres. Vos exemples n'étaient pas très convaincants, si vous m'autorisez à le dire, qu'il s'agisse de la réforme de l'audiovisuel public –dont nous sommes beaucoup à penser que nous aurions pu nous en dispenser – ou du financement du RSA. Comme le disait Pierre Mendès France, gouverner, c'est choisir, et le financement du RSA aurait pu passer par d'autres choix.
La performance de l'État dépend de sa crédibilité budgétaire mais aussi de sa réforme, de la réforme de la France dans une perspective de développement durable. Si l'on veut aujourd'hui anticiper sur les bonnes conditions du rebond de notre pays, il faut y insister. Pour cela, on peut certes mobiliser l'outil fiscal, mais en veillant à ne pas déraper, à ne pas dériver et à respecter l'engagement pris par notre majorité de stabiliser l'impôt, ce qui vaut tout aussi bien pour notre politique environnementale.
Le développement durable, ce doit être un choix raisonnable de la dépense. Je fais partie de ceux qui pensent qu'il s'est dit des choses passionnantes et que des voies importantes ont été ouvertes la semaine dernière avec le projet de loi sur la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. Il n'empêche que l'addition des dépenses évoquées n'est pas raisonnable, qu'elle n'est pas cohérente avec notre trajectoire financière. Or le développement durable suppose avant tout des finances publiques durables et ne dispense pas d'une politique de choix.
Réformer l'État, c'est aussi envisager une réforme territoriale hardie. Or jusqu'ici, s'agissant des services de l'État, elle ne l'est pas assez.
C'est enfin définir des priorités, au premier rang desquelles la recherche. J'évoquais tout à l'heure la Finlande qui, lorsqu'elle s'est redressée, a fait de la recherche une de ses priorités, au détriment des dépenses connexes. Il faut savoir déterminer ce qui, dans la recherche, est prioritaire, débattre du crédit d'impôt recherche et poser la question du ciblage.
Nous devons mettre le pays en mouvement. Moins que jamais, même dans la situation de crise que nous connaissons, nous ne devons nous contenter de demi-réformes. C'est de pleines réformes que la France à besoin.
Alors que faire ? La majorité, en responsabilité, soutient le Gouvernement dans la gestion de crise. Pour être utile, elle entend aussi formuler toutes ses exigences pour la préparation de notre pays au rebond. C'est le sens que nous donnons à la loi de finances pour 2009 et à la loi de programmation des finances publiques.