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Intervention de Michel Bouvard

Réunion du 20 octobre 2008 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Bouvard :

Cette responsabilité que j'évoquais dans la construction du budget se manifeste aussi du côté des recettes, qui sont évaluées raisonnablement. Plusieurs exemples l'attestent : le budget prévoit un montant de l'impôt sur les sociétés – 52 milliards d'euros net – inférieur à celui de 2008, pour tenir compte de la situation économique, notamment dans le secteur bancaire et financier ; le produit attendu de l'ISF est fixé à 3,9 milliards d'euros – alors que le réalisé prévisible pour 2008 se situe à 4,17 milliards – afin de répercuter l'effet de la baisse des prix de l'immobilier et des mesures votées en faveur des PME ; certaines recettes indirectes s'inscrivent aussi en baisse : ainsi la contribution de la CDC passe de 2,1 milliards à 950 millions d'euros.

Autre disposition qui traduit le caractère responsable de ce budget sur la durée : la première étape vers une mise sous plafond de la dépense fiscale. À la constance du discours de plusieurs d'entre nous – à commencer par notre rapporteur général – sur la préservation de la recette, répond enfin une information globale sur la dépense fiscale. Le rapport sur les voies et moyens intègre les variations de périmètre, non seulement celles liées au passé, mais aussi celles proposées pour l'exercice budgétaire. Le tableau présente une balance des plus et des moins de la dépense fiscale, ramenant la progression à 538 millions d'euros pour 2009 et 731 millions pour 2012.

Toutefois, à mon sens, ces progrès ne constituent qu'une étape. Tout d'abord parce que les éléments à notre disposition, permettant d'évaluer la dépense fiscale et son efficacité, ne sont encore que partiels, y compris dans le tableau récapitulatif. Cette absence d'informations, pour ne citer que quelques exemples, touche ainsi les réductions d'impôts au titre des dons – article 140 de la LME – ; les réductions d'impôts pour les tuteurs de chômeurs qui créent ou reprennent une entreprise – article 69 de la LME – ; les exonérations des suppléments de rémunérations versés aux salariés et mandataires sociaux – article 121 de la LME – ; les exonérations d'impôts sur les revenus heures, les jours supplémentaires et heures complémentaires de travail ; les cinq mesures de l'article 24 de la loi sur les archives et de l'article 33 de la LME sur les sommes consacrées par les entreprises au rachat d'un trésor national.

Ce total, présenté dans le tableau de la loi pluriannuelle, en ressort affaibli. Cette insuffisance de l'information en matière de dépense fiscale a déjà été signalée à l'occasion de la publication des RAP 2007. Malheureusement, on la retrouve trop fréquemment encore dans les projets annuels de performances.

Cependant, il faut signaler un autre progrès : la mise en place d'indicateurs pour quinze dépenses fiscales. Cette évolution intéressante devrait nous permettre de mieux apprécier l'efficacité de ces dépenses fiscales à l'avenir.

Cela étant, je pense qu'il faudra surtout s'interroger sur la manière de rendre l'objectif de coût de la dépense fiscale contraignant. Actuellement, il n'y a pas de vote. L'objectif de meilleure connaissance et de chiffrage suppose donc, à terme, une intégration à la loi organique sur les lois de finances, afin que le Parlement puisse voter sur un objectif de dépense fiscale.

En dehors de la dépense fiscale, il existe un autre moyen d'affaiblir les recettes de l'État : le transfert de recettes vers les opérateurs, dont la Cour des comptes a rappelé à juste titre qu'il portait atteinte à l'universalité budgétaire.

Dans ce domaine, il n'y a pas de mesures nouvelles cette année, et nous vous en remercions. Cependant, il faut bien constater qu'au travers des droits de timbre pour l'Agence nationale du titre sécurisé, de la TGAP pour l'ADEME et la redevance Barnier pour le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, 370 millions d'euros de recettes nouvelles échappent au périmètre budgétaire.

Dans ces conditions, je souhaite dire mon opposition totale à l'élargissement du nombre des bénéficiaires de la redevance audiovisuelle. J'ai déposé un amendement de suppression de cette disposition qui aurait nécessité un débat préalable sur le périmètre de l'audiovisuel public.

Dernier point que je souhaite évoquer, trop brièvement compte tenu du temps qui m'est imparti, celui de la mise en oeuvre de la réserve de précaution. Le PLF 2009 en fixe le taux à 5 %, contre 6 % en 2008, et à 1,5 % des dépenses de personnels, taux inchangé par rapport à 2008, ce qui correspond à un montant total de 6,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 6,2 milliards d'euros en crédits de paiement.

Cette diminution est une mesure positive, rendue possible par la mise en oeuvre du budget triennal. Nous en attendons beaucoup pour que les responsables des budgets opérationnels de programme sur le terrain, comme les responsables des programmes budgétaires, puissent avoir plus de souplesse de gestion et pour que joue enfin réellement la fongibilité asymétrique.

Il faut aussi améliorer l'information du Parlement sur l'utilisation de la réserve. À cet égard, notre première demande date de 2006 ; le Premier ministre d'alors, M. de Villepin, avait fait une promesse d'information, non tenue. Notre demande a été renouvelée, sans plus de succès, en 2007. Cette année aura marqué une première avancée, puisque nous avons eu une information le 5 mai 2008, à la demande du président de la commission des finances et du rapporteur général du budget.

Budget courageux qui, dans un environnement économique difficile, maintient le cap de la maîtrise de la dépense ; budget de transparence qui permet d'améliorer le contrôle parlementaire ; pluriannualité qui s'inscrit dans une démarche de retour à l'équilibre des comptes : autant de bonnes raisons d'apporter notre soutien au projet présenté.

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