Compte tenu de l'heure tardive, je ferai plus que respecter mon temps de parole !
Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la question des organismes génétiquement modifiés est prioritaire. Tout d'abord, en effet, il s'agit de la transposition d'une directive européenne, dont tous les orateurs ont souligné le caractère très tardif. En outre, ce texte fait suite aux conclusions du Grenelle de l'Environnement, qui comportent la mise en place d'un cadre rigoureux et transparent pour les OGM et les biotechnologies.
Les OGM suscitent une méfiance légitime tant sont complexes la compréhension des mécanismes en jeu et l'évaluation des dangers encourus. Les risques potentiels concernent à la fois la biosphère et la santé des consommateurs.
On sait aujourd'hui identifier et isoler certains gènes, puis les transférer dans le génome d'un autre être vivant. C'est cette technique modifiant le patrimoine génétique qui conduit à l'obtention des OGM. Ces organismes génétiquement modifiés sont définis par une directive européenne comme « tout organisme – à l'exception des êtres humains – dont le matériel génétique a été modifié d'une manière qui ne s'effectue pas naturellement par multiplication etou par recombinaison naturelle ». Cette définition des OGM est essentielle car elle permet de poser la problématique réelle, qui est celle de la modification par l'homme du patrimoine génétique de ses ressources.
Nous ne pouvons pas connaître la nocivité ou l'innocuité des OGM, d'autant moins que tous les OGM ne présentent pas les mêmes risques potentiels. Ainsi les plantes génétiquement modifiées ne risquent-elles pas de contaminer par croisement les cultures non génétiquement modifiées et la flore sauvage, engendrant des hybrides dont on ne pourrait plus contrôler la dispersion ? Il est essentiel de déterminer l'impact des OGM dans tous les domaines et de n'en retenir que les risques acceptables, sachant que le risque zéro n'existe pas.
En tout état de cause, il n'existe aucune certitude scientifique quant aux effets des OGM en matière environnementale et sanitaire. Il faut non seulement pouvoir garantir la sécurité sanitaire, alimentaire et environnementale des Françaises et des Français, respecter leurs attentes et leur offrir des perspectives économiques et écologiques durables ; il nous appartient également de protéger les produits labellisés AOC et les agriculteurs qui les cultivent d'une trop grande proximité avec des cultures OGM.
En revanche, la biologie moléculaire et la génomique sont des domaines dans lesquels la recherche peut sans aucun doute faire progresser les connaissances propres à améliorer les conditions de vie. Le génie génétique permet désormais un usage nouveau des plantes par obtention de molécules à usage thérapeutique capables de se substituer aux synthèses chimiques et de pallier l'extinction de substances issues d'organes animaux ou humains. Le champ des applications thérapeutiques est immense, allant de la production de médicaments aux xénogreffes. L'État se doit d'apporter son soutien aux activités de recherche sur le vivant et de veiller à ce qu'elles soient conduites indépendamment des intérêts privés. Il faut prendre le temps d'expertiser, permettre à la recherche de travailler officiellement sur la question, la laisser oeuvrer en toute sérénité et lui en donner les moyens. C'est grâce aux chercheurs et à leurs travaux que nous aurons le recul nécessaire sur les OGM, et que nous en maîtriserons mieux les tenants et les aboutissants.
Ce qui me semble important, c'est de garantir le droit et la liberté de produire et de consommer avec ou sans OGM. La liberté de choix est essentielle. Il faut garantir un régime de responsabilité stricte impliquant l'ensemble des opérateurs de la filière OGM, le respect du droit à l'information et à la participation du public, et une évaluation indépendante, transparente et pluridisciplinaire des OGM. Ces demandes sont conformes aux conclusions du Grenelle de l'environnement.
Je suis bien évidemment satisfait que le Gouvernement ait décidé de suspendre la culture commerciale du maïs Monsanto 810 jusqu'à sa réévaluation par les instances européennes. Je regrette néanmoins que le texte voté par le Sénat soit moins encadré que celui du Gouvernement. Il est donc particulièrement important d'instaurer des garde-fous sécuritaires du principe de précaution qui fassent appel à la prudence, au sens de la mesure et à la responsabilité individuelle et collective.
Je suis donc favorable à ce texte, sous réserve d'amendements qui permettront notamment de mieux protéger les cultures non-OGM, de créer une Haute autorité indépendante et transparente, et de mettre en place un régime de responsabilité plus large s'appliquant à tous les acteurs de la filière OGM. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)