Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, chers collègues, je voudrais revenir sur le cas, déjà évoqué, de Christian et Julien Veillât, agriculteurs dans les Deux-Sèvres, dont une parcelle de maïs biologique a été contaminée par des OGM. Je crois utile de préciser que cette parcelle de maïs biologique était située à plus de vingt-cinq kilomètres de la culture d'OGM la plus proche. Cet été, lorsque nous avons appris la mise en culture de ces OGM, nous avons alerté le préfet et les ministres sur les risques de contamination pour les AOC et cette culture biologique. On connaissait le risque, et pourtant la contamination s'est produite. Ces agriculteurs, qui ont subi un préjudice économique et moral, ont porté plainte contre l'État, qui n'a pas été capable de protéger et de garantir leur liberté d'entreprendre. Leur coopérative et la région se sont portées partie civile à leurs côtés. Je vous invite à méditer cet exemple car avec ce projet de loi, de tels contentieux seront demain légion dans les tribunaux administratifs. Je soumettrai ce projet à trois questions simples.
Ce projet de loi permettrait-il, demain, à d'autres Christian et Julien Veillât d'être indemnisés du préjudice subi par le déclassement de leur récolte, qui ne pourrait plus bénéficier du label « bio » ? La réponse est non.
Permettrait-il à d'autres Christian et Julien Veillât d'être indemnisés alors qu'il est impossible d'identifier l'origine de la contamination ? La réponse est encore non, car votre projet de loi instaure la responsabilité de l'exploitant voisin, mais, lorsque le voisin n'est pas en cause, elle ne prévoit pas celle des semenciers.
Enfin, ce texte permettra-t-il que l'on puisse cultiver sans OGM, que ce soit dans le cadre de l'agriculture biologique ou conventionnelle, en zone AOC ou non ? La réponse est également non, car votre projet de loi a pour but la dissémination et la généralisation des OGM en plein champ. Certes, il ne s'agira plus de MON 810, mais d'une autre substance ; cependant, le problème demeurera. C'est si vrai que le rapporteur a, en commission, déposé un amendement n° 158 qui veut, au détour de la définition des conditions techniques destinées à limiter les contaminations, inscrire dans la loi que la présence d'OGM dans d'autres productions sera « techniquement inévitable ».
M. le ministre reconnaissait tout à l'heure que ce texte est imparfait. Le mot est faible, car en dépit du Grenelle de l'environnement, de l'opposition de l'opinion publique et de plus de 66 % des agriculteurs, mais aussi des ministres qui, hier, reconnaissaient qu'il fallait ne pas prendre de risques avec les OGM, ce texte instaure essentiellement la liberté de produire « avec OGM ». Bref c'est la liberté du renard Monsanto dans le poulailler de l'agriculture conventionnelle.