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Intervention de Christian Blanc

Réunion du 2 août 2007 à 17h35
Dialogue social et continuité du service public dans les transports terrestres — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Blanc :

Depuis vingt ans, la société française a beaucoup évolué, et les usagers sont devenus, de plus en plus, des clients : ils attendent des services publics de transports une qualité comparable à celle que proposeraient des entreprises privées, entre lesquelles ils pourraient choisir. Or les sentiments de dépendance et d'incertitude face à des incidents ou à une mauvaise information renforcent les critiques, tandis que les mouvements de grève, dont les motifs sont souvent perçus comme peu compréhensibles ou catégoriels, suscitent des sentiments de frustration et, fréquemment, de colère. Cette situation a nourri la lassitude d'une opinion publique qui, depuis vingt ans, souhaite à 75 % une réglementation du droit de grève dans les transports – aspiration qui s'est traduite, comme vous le savez, par une quinzaine de propositions de loi en vingt ans.

Ce projet de loi a un triple mérite : il prévient plus efficacement le conflit, encourage le développement du dialogue social et garantit le droit à l'information des usagers. Il repose sur l'idée simple et juste que c'est par le renforcement du dialogue social dans les entreprises de transport que l'on évitera les grèves.

Ce texte permettra en premier lieu de sortir d'une culture du conflit. Il généralise d'ici le 1er janvier 2008 les procédures d'alarme et, en posant le principe d'une négociation obligatoire dans les entreprises de transport public, donne une base légale aux accords-cadres signés notamment à la RATP et à la SNCF. Il systématise la négociation préalable au dépôt d'un préavis de grève 48 heures avant le début du conflit. Il oblige, après huit jours de mouvement, les salariés à voter à bulletin secret la poursuite de la grève. Il réaffirme clairement le principe de non-paiement des jours de grève. Enfin, il interdit les préavis « glissants ».

Ce texte définit ensuite un cadre législatif équilibré, permettant de concilier les différents principes constitutionnels. Comme l'indique en effet le rapport Mandelkern, « les points d'ancrage constitutionnels sont nombreux et particulièrement fermes pour assurer la compétence du législateur dans le domaine du droit de grève ». Ainsi, l'article 34 de la Constitution, mais aussi le septième alinéa du préambule de la Constitution de 1946, qui dispose que le droit de grève « s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent », ou encore la jurisprudence du Conseil constitutionnel habilitent le législateur à tracer des limites au droit de grève en conciliant la défense des intérêts professionnels – dont la grève est un moyen – et la sauvegarde de l'intérêt général – auquel la grève peut porter atteinte. Peut-il y avoir contradiction entre l'exercice du droit de grève et le respect des obligations de service public ? Dans une société moderne, l'un ne va pas sans l'autre. Les autres pays européens ont trouvé, chacun à sa manière et compte tenu de sa culture propre, des réponses appropriées à ce lancinant problème, en mettant en évidence son caractère vital pour le fonctionnement de la société.

Enfin, ce texte renforce le service public, facteur de cohésion sociale et élément constitutif de notre pacte républicain. La jurisprudence administrative définit le service public par trois principes : mutabilité ; égalité de traitement des usagers ; continuité. Or, en France, le service public n'est pas seulement un concept juridique, une administration ou une idée ; c'est une véritable conception du lien social, qui exprime la responsabilité de tous envers chacun, et de chacun envers la nation. Le modèle français de service public répond à l'aspiration que les activités au coeur de la solidarité nationale soient effectivement au service du public.

Aujourd'hui, deux des trois grandes obligations d'un service public, la capacité d'adaptation et la continuité, ne sont plus complètement assurées. Or, ce qui fait la légitimité du service public, chers collègues, c'est précisément sa continuité.

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