…et a adopté un statut de société coopérative européenne. C'est la directive qui régit l'implication des salariés dans cette société qu'il vous est proposé de transposer aujourd'hui.
La SCE permettra aux coopératives d'exercer leurs activités dans l'ensemble du marché intérieur au sein d'une même structure, avec une seule personnalité juridique et suivant une réglementation unique.
Le statut de la SCE va donc faciliter le développement des activités transnationales des coopératives en leur permettant d'opérer dans toute l'Union, sans avoir à créer un réseau de filiales relevant du droit national de chaque pays d'implantation, ni à dissoudre une société pour en recréer une nouvelle en cas de transfert du siège de l'entreprise.
Outre cette facilité nouvelle offerte aux coopératives, ce projet de loi détermine les règles d'information, de consultation et de participation des salariés au sein de la SCE. Il doit ainsi permettre à nos coopératives nationales de mieux atteindre une dimension communautaire, tout en leur permettant de conserver leurs spécificités sociales, héritées d'une longue histoire.
Quant au processus de constitution des SCE, un projet de loi relatif au droit des sociétés devrait être présenté en conseil des ministres dans les prochaines semaines, afin de rendre pleinement applicables les dispositions du règlement européen qui traitent de ce point.
Ce texte respecte scrupuleusement le contenu de la directive européenne, qui ne nous laisse qu'une faible marge de manoeuvre, et il permettra à la France d'accueillir les projets de coopératives européennes qui ne peuvent pas, pour l'instant, voir le jour dans notre pays. Actuellement, en effet, les porteurs de projet préfèrent s'établir dans les pays de l'Union où les textes européens sont déjà en application, en raison des contraintes qui leur sont imposées en France où ils se trouvent obligés de procéder soit par fusion, soit par création d'une société spécifique.
Le projet de loi transpose également la directive du 23 septembre 2002 relative à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, qui vient préciser les règles de paiement des créances impayées détenues par les employés d'une entreprise. C'est, là aussi, un point essentiel, car le droit des procédures collectives doit s'adapter au fait que l'activité des entreprises dépasse bien souvent les frontières d'un seul État. En effet, l'insolvabilité d'une entreprise transnationale a des conséquences importantes en termes économiques et sociaux et nous devons simplifier au maximum les procédures au bénéfice de tous les acteurs, à commencer par les salariés. Tel est l'objet de ce texte.
Dès le début des années 1980, un système particulier avait été institué pour garantir les droits des travailleurs des entreprises transnationales en cas d'insolvabilité de leur employeur. C'est pour modifier ce système, qui s'était révélé incomplet, que le Parlement européen et le Conseil ont adopté la directive 200274CE du 23 septembre 2002, dont nous devons aujourd'hui transposer les articles 8 bis et 8 ter en adoptant le projet de loi.
L'article 8 bis dispose que, dans l'hypothèse d'une faillite transnationale, l'institution qui doit garantir les créances salariales impayées est celle de l'État membre sur le territoire duquel le salarié exerce ou exerçait habituellement son travail. La transposition de cette mesure reprend la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européennes et elle apportera une plus grande sécurité juridique aux salariés. Elle assurera également un traitement plus rapide des dossiers, en évitant aux salariés de devoir porter leurs affaires devant le juge communautaire, les dernières procédures de ce type ayant abouti près de trois ans après la faillite – sans compter le délai effectif de paiement des créances...
Mesdames, messieurs les députés, les situations que je viens d'évoquer ne sont pas des cas d'école et elles ne concernent pas seulement les autres. C'est pourquoi le projet de loi vient clarifier les choses. Désormais, le syndic ou l'équivalent du mandataire ou du liquidateur judiciaire étranger établira un relevé de créances qu'il transmettra à l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, autrement dit l'AGS. Au vu de ce « bon à payer », celle-ci avancera les sommes directement au salarié dans les huit jours. Elle prendra ensuite le rang de créancier à la place du salarié dans la procédure étrangère.
Cette avance directe des créances au salarié résulte d'un amendement du Sénat, car la procédure nationale habituelle ne met pas directement en relation l'AGS et le salarié créancier. Les fonds transitent par l'intermédiaire du mandataire ou du liquidateur. C'est ce modèle que le projet de loi voulait reproduire, mais le Sénat a estimé, à juste titre, que cette procédure était trop lourde et trop longue, d'autant qu'aucun délai de reversement ne pouvait être fixé pour obliger un syndic ou un professionnel étranger d'un autre État membre. Ce souci de rapidité vaut également pour nos mandataires et liquidateurs nationaux, qui devront reverser immédiatement au salarié concerné l'argent qu'ils auront perçu d'un organisme de garantie européen équivalent à l'AGS.
Le projet de loi contient en outre une disposition relative à l'échange d'informations entre organismes de garantie des États membres. Là encore, le Sénat a allégé l'obligation de l'AGS en la matière. En effet, le projet de loi présenté par le Gouvernement prévoyait que celle-ci répondrait à toute demande sur la réglementation des procédures collectives, les règles de licenciement et les organismes sociaux collecteurs de cotisations ou de contributions sociales. Or le Sénat a estimé plus sage que l'AGS s'en tienne aux informations touchant à son coeur de métier.
Aujourd'hui, la pratique professionnelle permet déjà le recouvrement des créances puisque, depuis 2002, l'AGS a versé 4,5 millions d'euros d'avance à un peu moins de 700 salariés. Cependant, ce recouvrement se faisait jusqu'ici de façon empirique et aléatoire et occasionnait pour les salariés des procédures longues et souvent coûteuses. C'est à cela aussi que nous allons mettre fin avec ce texte.
Mesdames, messieurs les députés, sous une apparence technique, ce projet permettra à tous les salariés de voir leurs droits effectivement garantis en cas de défaillance de leur employeur. Il s'agit d'une étape supplémentaire dans la construction de l'Europe sociale, car c'est en améliorant la protection des salariés, où qu'ils travaillent en Europe, que l'on pourra favoriser la mobilité de la main-d'oeuvre, et, au final, contribuer au développement de nos entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)