Le troisième point que j'évoquerai concerne les radars. Je tiens en effet à appeler votre attention, messieurs les ministres, sur le fait qu'il importe de convaincre nos concitoyens que l'argent des radars est consacré à la sécurité routière, qu'il est utilisé pour financer de nouveaux radars et entretenir le système et peut l'être utilisé pour des investissements d'infrastructures qui contribuent eux-mêmes à la sécurité routière. Nous souhaitons que cette garantie qui nous avait été donnée lors de précédents débats budgétaires soit maintenue et que l'argent des radars ne serve pas à financer anonymement les besoins de l'AFIT ou des conseils généraux – nouveauté sur laquelle les opinions peuvent diverger à l'occasion du budget pour 2008…
Pour conclure, je tiens à insister, monsieur le ministre d'État, sur une question centrale qui se pose aujourd'hui et pour les mois et les années à venir : quelle politique des transports ? Quels choix ? Quels financements ?
Dans une autre jolie phrase, M. Borloo déclare encore, à la fin de son introduction au dossier de presse, que « tout est prêt pour passer à l'acte ». Je ne doute pas, monsieur le ministre d'État, madame et monsieur les secrétaires d'État, que vos talents permettront qu'il en soit ainsi. La réalité actuelle est cependant un peu plus compliquée.
Se pose tout d'abord, dans notre pays, un vrai problème de méthode de choix. On ne peut pas dire que le CIADT 2003, précédé pourtant de travaux parlementaires et techniques passionnants, ait abouti à une formalisation de décision très éclairante. Je souhaite que les débats en amont et, surtout, les conclusions du prochain CIADT permettent de savoir avec précision non seulement ce dont on a débattu – on y parvient d'ordinaire assez bien –, mais aussi ce qui a été décidé, ainsi que le calendrier et le degré d'engagement qui accompagnent ces décisions. En matière de transports, on a coutume de lancer nombre d'études et de réflexions, mais il vient un moment où il faut atterrir... Il est indispensable de mieux expliciter l'évaluation technique et, nous en sommes tous d'accord, de mieux prendre en compte les effets sociaux et environnementaux, comme l'exprime tout particulièrement la définition de la mission dont vous êtres chargés.
Des réflexions doivent aujourd'hui aboutir sur la définition des taux d'actualisation. Le volet technique, qui existe et que nous connaissons, peut être amélioré et doit être mieux explicité et partagé. Il faut, surtout, préciser la décision politique. Ainsi, monsieur le ministre d'État, alors que vous citez dans l'introduction du dossier de presse de nombreux projets d'infrastructures très bien venus, je n'y ai pas trouvé de mention de la liaison Lyon-Turin, alors que le Premier ministre visite aujourd'hui même, si je ne me trompe, un site de travaux préparatoires à cette liaison. C'est là un cas intéressant de projet auquel la nation contribue financièrement et sur lequel on mobilise divers acteurs et nos partenaires européens, mais dont il est difficile de savoir exactement si on a décidé ou non de le réaliser...
Avec quels moyens ? L'AFIT, bien sûr, qui porte plusieurs de projets déjà décidés. Il lui manque cependant 10,5 milliards d'euros d'ici 2012 pour financer ces projets, sans compter les choix nouveaux énoncés lors du Grenelle de l'environnement : 2 000 kilomètres de voies TGV nouvelles, représentant sans doute une contribution de l'ordre de 16 milliards d'euros pour l'État, et 1 500 kilomètres de tramways et de bus en site propre, pour un engagement qu'on peut estimer de l'ordre de 4 milliards d'euros. Comment trouver ces sommes ? Comment, si on ne les trouve pas, procéder aux arbitrages permettant de définir ce qu'on fait et ce qu'on ne fait pas ? Un budget des transports, monsieur le ministre d'État, c'est ce que l'on fait, mais c'est aussi ce qu'on ne fait pas.
La taxe poids lourds, que nous avons évoquée lors de votre audition devant la commission des finances, ne peut rapporter au mieux, chacun le sait, 1 milliard d'euros. Ce montant n'est certes pas inutile, mais il n'est pas à la hauteur des besoins de financement déjà connus pour 2012, ni de ceux qui viennent s'ajouter. Quel sera, d'ailleurs, l'effet de cette taxe sur la compétitivité de ce secteur économique essentiel qu'est celui du transport routier ? Le débat porte également sur la TIPP concernant ce secteur, ainsi que sur la taxe à l'essieu, la taxe professionnelle et d'autres dimensions du problème. Voilà, me semble-t-il, un chapitre important de nos travaux en 2008.
Se pose aussi le problème du délai de mise en oeuvre de la taxe poids lourds. M. Bussereau a analysé l'expérience allemande et je suis allé moi-même voir ce qu'il en était outre-Rhin : compte tenu des difficultés juridiques et techniques, nous ne serons évidemment pas en mesure de récupérer le moindre euro au titre de la taxe poids lourds avant 2010, au mieux, et plus probablement avant 2011, si ce n'est plus tard encore.
Quels moyens, donc ? Ils ne figurent pas nécessairement dans le budget pour 2008, mais il serait utile que vous puissiez déjà nous éclairer à l'occasion des débats qui se tiendront au cours de l'année 2008, qu'il s'agisse du CIADT ou de la préparation du budget pour 2009. Il est indispensable d'assurer entre les ambitions de la politique d'infrastructures de transport, que nous partageons, et les moyens disponibles, une cohérence qui est la condition d'une bonne politique des finances publiques et d'une bonne politique des transports.
Avec quels opérateurs, enfin, mener cette politique ? Il faut sans relâche encourager et lancer des actions visant à renforcer la compétitivité. C'est ce que vous nous proposerez avec la réforme portuaire.