Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, madame, monsieur les secrétaires d'État, mes chers collègues, les crédits sur lesquels je suis rapporteur spécial sont inscrits dans le budget général pour deux programmes : celui des transports aériens et de la météorologie de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », et dans le budget annexe pour la mission « Contrôle et exploitation aériens ».
Le programme « Transports aériens » finance les activités régaliennes de la direction générale de l'aviation civile. Les crédits demandés pour 2008 sont inférieurs de plus de moitié à ceux votés en loi de finances initiale pour 2007 : 80 millions d'euros contre 170 en crédits de paiement.
Cela s'explique par deux mesures : d'une part, la quasi-totalité des crédits de personnel, soit près de 60 millions d'euros, sera transférée vers le programme « Support de la mission » ; d'autre part, une mesure de débudgétisation est proposée, à hauteur de 30 millions d'euros. Il s'agit de supprimer le financement budgétaire d'une partie des dépenses de sûreté, c'est-à-dire, pour l'essentiel, des dépenses engagées pour lutter contre le terrorisme. Ces dépenses seraient intégralement financées par la taxe d'aéroport : c'est l'un des objets de l'article 44 du présent projet de loi de finances, dont nous discuterons tout à l'heure.
L'architecture du programme « Transports aériens » demeure à mes yeux largement perfectible. Pour la troisième année consécutive, je plaide pour le rattachement à ce programme des dépenses de personnel de la gendarmerie du transport aérien. Le Comité interministériel d'audit des programmes, le CIAP, est allé dans mon sens, mais la DGAC a choisi de maintenir le statu quo. Il semblerait que les résistances proviennent plutôt du ministère de la défense, les gendarmes souhaitant rester attachés à ce ministère – vieux débat ! Il faut préciser que le transfert des crédits n'empêcherait pas que la gestion du personnel reste assurée par le ministère de la défense.
Je rejoins le CIAP dans sa proposition de consacrer une action consacrée à la sécurité et à la sûreté, qui rendrait plus lisible la politique conduite en la matière. La DGAC devait étudier cette possibilité dans le cadre de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2008, mais là encore la structure n'a pas évolué. Pourriez-vous, monsieur le ministre ou monsieur le secrétaire d'État, nous préciser si vous envisagez de mettre en oeuvre cette réforme dans le cadre du PLF pour 2009 ?
En application de l'article 18 de la loi organique relative aux lois de finances, le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » doit être essentiellement financé par des redevances pour service rendu. Or le produit attendu de ces redevances – il s'agit essentiellement de la redevance de route et de la redevance pour services terminaux de la navigation aérienne – devrait augmenter en 2008. Mais je constate une nouvelle fois que la DGAC tend à sous-évaluer le trafic, et à fixer en conséquence les redevances à un niveau supérieur à ce qui est nécessaire pour couvrir le coût du service rendu, même si un mécanisme de récupération de 70 % de la différence joue l'année suivante.
Mais ma principale critique va à l'évolution de la taxe de l'aviation civile. Une partie de cette taxe est affectée au budget annexe pour financer les dépenses non couvertes par le produit des redevances. Chaque année, la loi de finances détermine la part du produit de la TAC affectée au budget annexe et la part affectée au budget général. Pour 2008, il est proposé d'augmenter la part affectée au budget annexe. Cette évolution me semble en contradiction avec l'esprit de la LOLF et la logique de séparation des activités régaliennes et des activités de prestation de service. Dans ces conditions, la DGAC n'est pas spécialement incitée à faire des efforts sur la productivité du budget annexe – qui du reste ne progresse plus depuis deux ans, à en croire les indicateurs fournis par le ministère.
Ma principale remarque concernant les programmes du budget annexe porte sur leur architecture. Le CIAP a critiqué le fait que le programme « Formation aéronautique » ne regroupe pas tous les crédits de formation inscrits dans le budget annexe. Je pense que cela rendrait beaucoup plus lisible la politique menée en la matière. Nous discuterons plus tard de l'amendement, que j'ai déposé et qui a été approuvé en commission, tendant à transférer tous les crédits de formation du budget annexe vers le programme « Formation aéronautique ».
À propos du programme « Météorologie », je souscris à la proposition formulée par la Cour des comptes, tendant à ce que le président-directeur général de Météo France ne soit plus responsable de ce programme. Il conviendrait de confier cette fonction à une personne dépendant hiérarchiquement du ministre, lui-même responsable devant le Parlement de l'exécution des crédits votés, ce qui n'est pas le cas du PDG de Météo France.
J'encourage Météo France à réformer son organisation territoriale. L'établissement possède une antenne dans presque tous les départements. À l'exception des zones montagneuses et de l'outre-mer, cela ne se justifie plus et coûte très cher à l'établissement public. L'évolution des modèles de prévision météorologique permet d'envisager une implantation régionale et non plus départementale. Cela permettrait de réduire ses effectifs de 400 personnes environ.
Au-delà des questions strictement budgétaires que je viens d'évoquer, je vous propose maintenant un rapide tour d'horizon du secteur de l'aérien.
Le trafic est dynamique, puisqu'il devrait augmenter de plus de 4 % en 2008. Les compagnies aériennes en profitent, notamment Air France KLM, dont les résultats ne cessent de progresser, et on ne peut que s'en féliciter. L'ancienne compagnie nationale est très concernée par l'avenir de la caisse de retraite des personnels navigants. Comme vous le savez, cette caisse complémentaire autonome n'est pas un régime spécial et n'est donc pas concernée par les négociations en cours, mais elle connaît elle aussi un déficit structurel. La solution la plus opportune est l'allongement de la durée de cotisation, sur le modèle de ce qui est proposé pour les régimes spéciaux. Le problème, c'est que la loi a posé le principe d'un âge limite d'activité en vol des personnels navigants, commerciaux ou techniques, pour des raisons de sécurité et de pénibilité. Cet âge limite a été fixé par décret à 55 ans pour les personnels navigants commerciaux, qui sont censés être reclassés au sol au-delà de 55 ans. Mais ils ne le sont pratiquement pas dans les faits : ils font l'objet d'un licenciement, ce qui grève les recettes de la CRPN, qui leur alloue une indemnité complémentaire en plus de l'indemnité chômage.
Lors de la discussion du PLFSS a été adopté un amendement déposé par notre collègue Jacques Myard, qui supprime la limite d'âge. Il faut espérer que les compagnies jouent le jeu et emploient les personnels navigants jusqu'à ce qu'ils aient atteint l'âge de la retraite. Je crois pour ma part qu'il faut mettre en place une véritable gestion des carrières des personnels commerciaux. Il convient également de réfléchir avec le personnel navigant technique à la possibilité de faire évoluer la limite d'âge pour cette catégorie également.
J'en viens maintenant à l'industrie aéronautique. EADS doit faire face à un renchérissement de l'euro face au dollar, dont les effets se feront véritablement sentir dans deux ans, ainsi qu'aux conséquences du retard de l'A380, et même de l'A400M : on parle publiquement désormais d'un retard minimum de six mois, peut-être même d'un an. Mais la réforme de la gouvernance est bien engagée, le groupe ayant désormais un seul patron, bien identifié. Le plan Power 8 suit son cours dans un climat social calme, et – cela mérite d'être relevé – sans participation publique aux mécanismes de préretraite.
Les aéroports se réforment. Aéroports de Paris développe ses activités commerciales. Cent cinquante aérodromes ont été transférés de l'État aux collectivités territoriales, et les sociétés aéroportuaires créées en 2005 commencent à se substituer aux chambres de commerce et d'industrie pour la gestion des aéroports de province.
Les préoccupations environnementales sont croissantes dans le secteur de l'aérien, comme dans le reste de la société, ce qui est en tant que tel une bonne chose. Pour l'heure, la convention de Chicago empêche la taxation du kérosène, mais des dérogations bilatérales sont possibles. Je souhaite pour ma part que soit maintenu le principe de non-taxation du kérosène, puisque nous n'obtiendrons pas un accord international suffisamment large pour sa taxation, et que soit privilégié l'échange de permis d'émissions de CO2dans un cadre européen.
Il faut en effet rappeler que la pression fiscale sur le transport aérien est forte. J'ai déjà démontré à de nombreuses reprises dans mes rapports précédents l'inefficacité des mesures de sûreté, qui coûtent à la France, mes chers collègues, la bagatelle de 700 millions d'euros en 2007. Les dépenses de sûreté ont augmenté de façon vertigineuse depuis les attentats du 11 septembre 2001. Il conviendrait, monsieur le ministre d'État, de poursuivre dans un cadre international une action visant à réduire ce type de dépenses et à privilégier la lutte en amont contre le terrorisme, la seule qui soit efficace.
Je soutiens en revanche le financement par la taxe d'aéroport des dispositifs de contrôle biométrique du passage aux frontières. L'article 44 rattaché du projet de loi de finances le permet, et j'ai déposé un amendement destiné à sécuriser ce financement.
Pour finir, je rappellerai l'importance qu'ont prise les compagnies low cost. Ces compagnies pourraient desservir davantage de zones enclavées et favoriser un meilleur aménagement du territoire. Mais elles sont victimes d'une stratégie de freinage de la part des autorités françaises. Le taux de pénétration des low cost est de 17 % seulement en France, contre 25 % en moyenne dans l'Union européenne et jusqu'à 40 % dans certains pays de l'Union. Je regrette en particulier que les exploitants d'aéroports ne modulent pas suffisamment les redevances en fonction du service rendu. Ce système attire en effet les low cost, qui utilisent moins de services aéroportuaires que les compagnies classiques. C'est ainsi qu'EasyJet a récemment annoncé son implantation à Lyon. J'encourage vivement le développement de cette stratégie de modulation des redevances.
Après ce bref aperçu de la situation du transport aérien, j'en reviens au budget. Sur ma proposition, la commission des finances a adopté les crédits des programmes « Transports aériens et météorologie », ainsi que les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Je vous demande donc, mes chers collègues, d'émettre un vote favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)