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Intervention de Alain Cacheux

Réunion du 9 novembre 2007 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Écologie développement et aménagement durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Cacheux, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan pour l'énergie et les matières premières :

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, madame la secrétaire d'État chargée de l'écologie, monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, mes chers collègues, le programme 174 « Énergie et matières premières » est l'un des douze programmes de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Il représente 8,9 % des autorisations d'engagement et 9 % des crédits de paiement de la mission pour 2008.

C'est la première fois que la politique de l'énergie et des matières premières fait l'objet d'un programme à part entière. Jusqu'au projet de loi de finances pour 2008, les crédits correspondants ne représentaient en effet qu'une action de la mission « Développement et régulation économiques ». L'importance de l'énergie et des matières premières dans l'économie française est ainsi reconnue au plan budgétaire.

Toutefois, en dépit des progrès de lisibilité, il s'en faut de beaucoup pour que l'examen du projet annuel de performances pour 2008, dans son état actuel, suffise à donner une vue d'ensemble de la politique de l'énergie et des matières premières conduite par les pouvoirs publics.

Dans cette courte intervention, je vous propose de vous présenter d'abord les données budgétaires relatives à ce programme 174, de pointer ensuite les progrès qu'il convient de faire pour mieux retracer l'effort de la nation dans le domaine de l'énergie et, enfin, d'évoquer quelques sujets de l'actualité de l'énergie, d'une grande importance.

Le programme 174 « Énergie et matières premières » se compose de deux blocs d'actions. Le premier est celui de la politique de l'énergie et des matières premières proprement dite, qui est traitée par l'action n° 1 du programme. Le second correspond à la politique de solidarité de l'après-mines, traitée par les trois autres actions, l'action n° 2 « Gestion de l'après-mines », l'action n° 3 « Travaux de sécurité, indemnisation et expropriation sur les sites miniers », et l'action n° 4 « Prestations à certains retraités des mines ».

Les crédits demandés pour l'action n° 1 « Politique de l'énergie et des matières premières » s'élèvent à 54 millions d'euros en autorisations d'engagement pour 2008, en augmentation de 0,9 % par rapport à la loi de finances de 2007. Ces autorisations se répartissent en 37 millions d'euros de dépenses de fonctionnement et 17 millions de dépenses d'intervention.

Correspondant à 185 équivalents temps plein travaillés, les dépenses de personnel sont extérieures au programme 174, étant prises en compte dans les actions miroir du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables ». Pour les dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel, signalons une réduction d'un facteur 4 des dépenses liées au contrôle des carburants, grâce à la mise en place de marchés à bons de commande.

L'essentiel des autres dépenses de fonctionnement est représenté par des subventions pour charges de service public. La subvention de 4 millions d'euros en autorisations d'engagement versée à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs lui facilitera la réalisation de l'inventaire triennal des déchets radioactifs et lui permettra d'assumer les missions d'intérêt général d'assainissement de sites ou de reprise de déchets orphelins qui lui ont été confiées par la loi de programme du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et des déchets radioactifs.

La subvention de 31 millions d'euros en autorisations d'engagement versée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie a pour objet le financement de ses dépenses de fonctionnement, à hauteur de 19 millions d'euros, et de ses dépenses d'intervention, à hauteur de 12 millions d'euros.

L'action n° 1 « Politique de l'énergie et des matières premières » comprend également 17 millions d'euros d'autorisations d'engagement au titre de dépenses d'intervention, focalisées sur les actions internationales, en particulier le partenariat mondial de lutte contre les menaces nucléaires, chimiques et bactériologiques liées au démantèlement des arsenaux russes et ukrainiens conclu pour dix ans en 2002.

S'agissant de la solidarité de l'après-mines, les demandes de crédits pour l'ensemble des trois actions s'élèvent à 853 millions d'euros en autorisations d'engagement, en augmentation de 25 % par rapport à la loi de finances de 2007.

Représentant 94 % du total du programme, ces crédits correspondent à la solidarité nationale pour l'après-mines, celle-ci comprenant aussi bien le financement de la mise en sécurité des sites miniers que certaines prestations versées aux mineurs retraités : prestations de chauffage et de logement, pensions de retraite anticipée, indemnités de cessation anticipée d'activité. L'essentiel de cette augmentation provient de la reprise, par l'État, des engagements de Charbonnages de France, dont la dissolution sera effective en fin d'année 2007.

Nous pouvons tous nous réjouir de voir l'État assurer la continuité des prestations versées aux anciens mineurs. Les structures mises en place, en particulier le département prévention et sécurité minière du Bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM, et l'Agence nationale pour la garantie des droits de mineurs fonctionnent d'une manière efficace avec des coûts de fonctionnement maîtrisés. La page de la civilisation minière s'est tournée, en France, avec la fermeture de la mine de La Houve, dernière mine de Lorraine, le 23 avril 2004. La collectivité nationale n'a pas oublié tout ce qu'elle doit aux mineurs. Le programme budgétaire qui nous est proposé en atteste et c'est heureux.

Tels sont les crédits de ce programme 174 « Énergie et matières premières » : 6 % pour les crédits de la politique de l'énergie et des matières premières, 94 % pour les dépenses de la solidarité de l'après-mines, 54 millions d'euros pour la politique de l'énergie et des matières premières et 853 millions pour la solidarité de l'après-mines.

J'en viens à la nécessité d'aborder une nouvelle étape dans la lisibilité des crédits budgétaires relatifs à la politique de l'énergie.

Les moyens de la politique énergétique et de la politique des matières premières dépassent très largement les crédits budgétaires. La législation, la réglementation, la fiscalité, les orientations données aux entreprises publiques ou aux entreprises contrôlées par l'État sont de puissants moyens de politique énergétique.

Il est heureux que le projet annuel de performances présente le montant des dépenses fiscales rattachées au programme « Énergie et matières premières ». Celles-ci devraient s'élever à 2,5 milliards d'euros en 2008, à comparer aux 54 millions d'euros d'autorisations d'engagement du programme 174.

La principale dépense fiscale du programme, estimée à 2,4 milliards d'euros pour 2008, correspond au crédit d'impôt pour dépenses d'équipement de l'habitation principale en faveur des économies d'énergie et du développement durable. On estime à près d'un million le nombre de bénéficiaires de cette réduction de l'impôt sur le revenu et sur les sociétés. La question se pose de la cohérence du crédit d'impôt et du système de certificats d'économies d'énergie, un système qui ne fait pas intervenir le niveau de revenu des ménages, contrairement à celui du crédit d'impôt.

D'une manière générale, la politique de maîtrise de l'énergie et de réduction des émissions de CO2 fait appel à de très nombreuses réductions d'impôt, en particulier à de nombreuses exonérations de TIPP. Citons un cas d'actualité, les biocarburants, dont la détaxe devrait dépasser un milliard d'euros en 2008, en forte croissance par rapport à 2007.

Compte tenu de l'importance des dépenses fiscales dans le domaine de l'énergie, il me paraît essentiel, comme à mon collègue Pélissard, que l'efficience des mesures correspondantes soit évaluée avec sérieux.

Par ailleurs, la maquette budgétaire adoptée par le Gouvernement pour le projet de loi de finances pour 2008 opère une séparation entre le programme « Énergie et matières premières », qui appartient à la mission « Écologie et matières premières », et le programme « Recherche dans le domaine de l'énergie » qui est du ressort de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Dans mon rapport écrit, j'ai bien entendu examiné l'évolution des crédits de la recherche dans le domaine de l'énergie. Les choses vont plutôt dans le bon sens, avec une augmentation de près de 8 % des crédits dévolus aux nouvelles technologies de l'énergie et un effort réel pour la recherche relative au secteur des hydrocarbures.

Concernant la recherche nucléaire – je rappelle que notre production d'électricité repose à 78 % sur le nucléaire –, il semble toutefois que la décision de réaliser un prototype de réacteur de quatrième génération pour 2020 ne s'accompagne pas des crédits supplémentaires jugés nécessaires. Rappelons que la loi de programme du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et des déchets radioactifs a prévu avec précision la construction de ce prototype.

Il me semble, enfin, que les indicateurs de performance rattachés à l'action « Énergie et matières premières » doivent être complétés. Les indicateurs actuels ne portent en effet que sur la maîtrise de l'énergie et les énergies renouvelables.

Bien entendu, différentes informations utiles sont données dans le rapport sur les moyens consacrés à la politique énergétique.

Il est, en réalité, indispensable, de disposer dans le projet annuel de performances d'indicateurs de performance relatifs à la production, aux importations et à la consommation d'énergie primaire. De même, le taux d'indépendance énergétique, la consommation d'énergie finale par secteur et la facture énergétique de la France devraient figurer dans ce document.

J'aborderai, enfin, quelques sujets d'actualité et, d'abord, l'importance du secteur des matières premières.

La croissance rapide de la demande des pays émergents, en particulier de la Chine et de l'Inde, a déclenché une flambée des prix, comme pour le pétrole. Des groupes de taille mondiale se sont constitués, ce qui peut entraîner des menaces sur les emplois de leurs filiales françaises. J'invite les pouvoirs publics à la plus grande vigilance concernant le secteur de l'aluminium et de l'emballage, qui, je le rappelle, constituent des fleurons de l'industrie française.

Par ailleurs, c'est dans un contexte de flambée des prix que la France doit soutenir ERAMET, notre grande entreprise minière spécialiste du nickel et du manganèse. ERAMET joue un rôle fondamental dans l'économie de la Nouvelle-Calédonie. Les pouvoirs publics ne peuvent se désintéresser de la restructuration imminente de son capital.

Par ailleurs, les efforts d'Areva pour accroître sa production d'uranium doivent être encouragés, car les tensions sur le prix de l'uranium vont redoubler dans les prochaines années, avec l'essor du nucléaire en Asie et avec l'épuisement des stocks d'uranium hautement enrichi dont la commercialisation pèse depuis plusieurs années sur les prix.

Un autre dossier clé pour la politique de l'énergie est celui des besoins de développement et d'investissement des filières énergétiques françaises. Je ne l'aborde pas compte tenu du temps qui m'est imparti. Je crois que nous devons avoir à l'esprit qu'une priorité pour les prochaines années doit être l'investissement.

Je souhaiterais par ailleurs évoquer l'avenir de la filière nucléaire française, puisque l'on parle de son éventuelle restructuration, et rappeler certaines exigences qui doivent être prises en compte avant toute décision de restructuration.

C'est la nation qui a financé la construction de cette filière nucléaire, par l'impôt et par le prix acquitté pour sa consommation d'électricité. Ses intérêts doivent être préservés à long terme.

On nous dit par ailleurs que le groupe Areva, dans sa configuration actuelle, a des besoins d'investissement de 15 milliards d'euros d'ici à 2011. Si le renforcement de sa capacité d'investissement est la raison profonde des réflexions en cours, l'appel au marché peut se faire par l'endettement. Je rappelle que la construction de notre parc de cinquante-huit réacteurs nucléaires français a été financée par l'endettement. Gardons-nous de priver le CEA et l'État de revenus récurrents indispensables aujourd'hui et demain.

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