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Intervention de Christian Hutin

Réunion du 3 octobre 2007 à 15h00
Grenelle de l'environnement — Déclaration du gouvernement et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Hutin :

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, outre son expérience, le député novice que je suis a une spécificité, qui est d'être probablement l'élu de la circonscription la plus industrielle de France. Dunkerque compte le pôle énergétique le plus important d'Europe, la centrale nucléaire la plus importante d'Europe, le fleuron, désormais italien, de la métallurgie ex-française, des entreprises dans le secteur de la pétrochimie, de la chimie pure, des pétroliers, de l'aluminium.

Si je plante ainsi le décor, c'est pour expliquer simplement que mes propos vont être équilibrés.

D'un côté, il y a les risques importants qui planent sur notre population, comme une épée de Damoclès. Vous avez, madame la secrétaire d'État, dans le bureau de votre direction de la prévention des pollutions et des risques, une photo qui montre l'horreur de ce qui s'est passé à AZF. Des problèmes atmosphériques se posent, qui peuvent faire naître un risque d'empoisonnement, du fait des plus grosses particules, les poussières, mais aussi des particules fines. Selon une estimation récemment rendue publique par la Commission européenne, plus de 350 000 décès prématurés sont dus à ces dernières.

D'un autre côté, nous avons un bassin d'emplois extrêmement important, noyé dans un bassin de chômage, lui-même noyé dans un bassin de précarité.

Devant ces deux aspects du problème, il est difficile de ne pas faire la part des choses. Dans les réflexions du Grenelle de l'environnement, il sera nécessaire d'articuler les problèmes environnementaux et les problèmes sociaux. Nous ne devons pas penser uniquement aux 4x4 polluants avec lesquels certains font leurs courses, mais aussi à ces ouvriers qui vont travailler parfois avec des véhicules d'occasion, ou des mobylettes chères à Xavier Bertrand, à Saint-Quentin, ou encore à des personnes qui ont plus de difficultés à se déplacer, qui sont au chômage et qui doivent trouver du travail. Tout est question d'équilibre.

En France, nous avons pris du retard. La prise de conscience collective des problèmes environnementaux date d'une dizaine d'années, en particulier avec la loi sur l'air, dont certains gènes peuvent être attribués à Dominique Voynet, et d'autres à Philippe Richert, auteur du premier rapport sur la loi sur l'air. Il a rédigé son deuxième rapport dix ans plus tard, et vous l'avez reçu, monsieur le ministre d'État. Quand nous sommes allés en Alsace visiter l'ASPA, l'Association pour la surveillance et l'étude de la pollution atmosphérique en Alsace, vous avez dit que vous aviez réuni des gens qui ne se parlaient pas. Et je pense que vous y avez réussi, en effet. Vous ne m'en voudrez donc pas si je vous parle un peu des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air, dont je préside la Fédération nationale.

Ces associations travaillent sur un mode déjà assez « grenellien », puisque les entreprises, les associations, les ONG, l'État et les collectivités se réunissent depuis dix ans pour surveiller la qualité de l'air. Il faudra penser à ces associations dans les décisions qui seront prises, et leur donner un champ de compétences étendu, notamment en ce qui concerne le climat, les polluants émergents, comme la dioxine ou les pesticides, mais aussi l'air intérieur, dont nous n'avons pas encore parlé dans ce débat et qui sera l'une des priorités de nos concitoyens dans les années qui viennent. Nous commençons à surveiller la qualité de l'air dans les gares – c'est déjà fait dans un certain nombre de régions –, et dans les écoles. Un petit drame s'est produit récemment. Si nous pouvions un jour, mais je n'ose l'imaginer, surveiller la qualité de l'air dans le métro, je crois que nous serions extrêmement surpris. Je peux même proposer, monsieur le président, que nous surveillions la qualité de l'air à l'Assemblée nationale, ce qui serait assez symbolique et pourrait nous donner une idée de ce qui se passe dans les univers clos.

En tant que médecin, je tiens à dire un mot des particules fines. Ce sont les plus dangereuses pour la santé. Il n'est pas normal que le transport routier, qu'il s'agisse des citoyens ou des industriels, soit totalement exonéré de la TGAP. C'est l'une des choses primordiales qu'il faudrait faire dans le cadre du Grenelle de l'environnement.

A l'occasion de deux crises majeures, l'État n'a pas su apporter une réponse convenable aux yeux de nos concitoyens. Personne ne croit plus que ni la ligne Maginot ni la ligne bleue des Vosges aient arrêté les radiations en provenance de Tchernobyl. L'État n'a pas su non plus répondre au problème de l'amiante : 70 % de l'amiante a été déchargé en vrac dans le port de Dunkerque. C'est terrible. Des dizaines de milliers de morts sont à prévoir dans les années qui viennent.

Je souhaite que ce Grenelle permette de régler ces problèmes, et que l'État apporte enfin une réponse adaptée à des crises environnementales graves, qui entraînent des problèmes de santé majeurs pour nos concitoyens.

Monsieur le ministre d'État, nous nous connaissons bien. Je connais votre capacité « oranginesque » à secouer les choses. Je souhaite de tout coeur, pour vous comme pour l'ensemble de nos concitoyens, que de ce Grenelle ne sortent pas des paillettes à la mode, ou des particules – contre lesquelles nous luttons – laissées en suspension. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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