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Intervention de Michel Bouvard

Réunion du 30 juin 2008 à 17h30
Règlement des comptes et rapport de gestion pour 2007 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Bouvard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, c'est la première fois que notre assemblée examine une loi de règlement dans les conditions souhaitées par la loi organique, c'est-à-dire avant le débat d'orientation budgétaire, en consacrant du temps à l'examen du budget réel et à l'audition des ministres dans le cadre de commissions élargies, afin de pouvoir apprécier, non seulement le respect du volume des crédits engagés, mais aussi l'efficacité de la dépense publique.

Les commissions élargies ont ainsi permis, comme lors de l'examen du projet de loi de finances, d'entendre les ministres chargés des différentes missions budgétaires et de les interroger sur le contenu des rapports annuels de performance, en s'appuyant également sur l'analyse de l'exercice clos par la Cour des comptes.

Certes, le résultat pourra paraître bien timide, tant au regard du nombre des programmes examinés que de celui des députés présents aujourd'hui dans l'hémicycle. Ces auditions constituent néanmoins un véritable progrès, dans la perspective de la construction d'une culture du contrôle et de la performance susceptible de tous nous réunir. Puis-je renouveler mon souhait que, si, comme je l'espère, la révision constitutionnelle donne au Parlement une meilleure maîtrise de son ordre du jour, la présidence de notre assemblée consacrera définitivement, après une session extraordinaire particulièrement dense, le caractère prioritaire de la fonction de contrôle parlementaire, en évitant la concomitance des commissions élargies et de la séance publique ?

S'agissant des données générales de l'exécution 2007, je ne reviendrai pas sur les propos du rapporteur général, dont je partage l'analyse. Je me réjouis du recours limité aux décrets d'avance, même si leur nombre aurait pu être encore réduit en dotant mieux certaines lignes, comme les opérations extérieures du ministère de la défense ou l'hébergement d'urgence, ou en mettant en place de véritables provisions pour les crises agricoles – le Fonds national de garantie des calamités agricoles n'était pas encore doté au début de cet exercice. Toutefois, sur ce point aussi, nous progressons.

L'amélioration des recettes fiscales et non fiscales, conjuguée à une maîtrise satisfaisante de la dépense budgétaire directe, a permis de limiter le déficit 2007. Certains sujets de fond demeurent cependant préoccupants. Ce sont eux que souhaite évoquer, monsieur le ministre, non pour vous convaincre de leur importance, car je sais que vous y êtes attentif, mais pour vous faire part des préoccupations de la majorité.

Mon premier motif de préoccupation concerne la croissance de la dépense fiscale. Le montant des recettes fiscales, de 266,7 milliards d'euros, est en retrait de 1,2 milliard par rapport à 2006, ce qui constitue, comme le souligne la Cour des comptes, une deuxième baisse consécutive et une stagnation sur quatre ans. En effet, les recettes brutes sont passées de 340 à 347 milliards d'euros, mais les remboursements et les dégrèvements se sont emballés, avec une hausse de 8,8 milliards. Une telle augmentation ne peut être imputée, pour cette année, aux mesures de la loi TEPA – dont, par ailleurs, l'utilité est réelle. Cela doit nous inciter à nous montrer extrêmement vigilants sur ces dépenses fiscales, qui minent les recettes : il convient de refuser la création de dépenses de ce type en dehors des lois de finances ou, tout au moins, les régulariser à cette occasion, en les évaluant correctement et en appréciant régulièrement leur efficacité.

Les rapports annuels de performance ont mis en évidence cette année l'insuffisance de l'information relative à la dépense fiscale. Lors des commissions élargies auxquelles j'ai assisté, j'ai pu constater que les ministres eux-mêmes étaient désireux d'une meilleure évaluation. Or, souvent, ils n'en disposent pas. Ainsi, dans le budget de la culture, en ce qui concerne la dépense fiscale liée au patrimoine, sept items sur douze ne sont pas renseignés ! Les commentaires sur la fiabilité de certaines évaluations prêteraient à sourire s'il ne s'agissait du budget de l'État : une mention zéro inscrite depuis trois ans peut être qualifiée « d'ordre de grandeur » ; on parle de « bon chiffre » lorsqu'il n'y en a pas ! Il est souhaitable que les systèmes d'information, dont la faiblesse est souvent à l'origine de cette situation, puissent être rapidement améliorés afin de permettre un véritable pilotage des politiques publiques et un arbitrage entre dépense fiscale et dépense budgétaire, l'une et l'autre devant être justifiées au premier euro.

Mon deuxième motif de préoccupation a trait aux opérateurs ; chaque année, nous évoquons le sujet. Des efforts ont été accomplis dans les documents budgétaires, je vous en donne acte ; toutefois, force est de constater que des opérateurs essentiels échappent à la présentation budgétaire – par exemple, cette année encore, l'agence française de développement.

C'est un sujet essentiel, car un certain nombre d'opérateurs échappent aux orientations générales des ministères. Comme la Cour des comptes le rappelle, leur poids dans la mise en oeuvre de certaines politiques nuit à la lisibilité de l'action publique. Surtout, ils sont un moyen de contourner le plafond des autorisations d'emploi. Pour ne prendre qu'un exemple, sur les 30 780 emplois que compte le secteur culturel, seuls 7 751 sont affectés au ministère, les autres dépendant des opérateurs !

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