La commission des affaires économiques a décidé de se saisir pour avis de la présente proposition de loi qui vise à redéfinir les règles applicables aux ouvertures dominicales des commerces, le secteur du commerce relevant de nos attributions. (Brouhaha continu sur les bancs des groupes SRC et GDR, dont les membres se lèvent et quittent l'hémicycle sous les applaudissements de nombreux députés du groupe UMP. – M. Gremetz s'approche des bancs de la commission, puis du groupe UMP, tandis que les huissiers s'interposent.)
Je voudrais rassurer M. Brottes en lui disant que nous avons examiné la première version de ce texte en commission et que nous avons eu à coeur d'intégrer trois de nos amendements à la nouvelle rédaction de l'article 2 que vous avez eue tout à l'heure.
Nous avons tout entendu sur cette proposition de loi. Les caricatures ont été nombreuses, mais, comme tout ce qui est outrancier, cela finit par perdre tout sens. Ce texte fait suite aux travaux du CES et d'un groupe mené par notre collègue Richard Mallié qui a conduit de très nombreuses auditions.
Je veux réaffirmer combien notre commission, à l'instar du Conseil économique et social, est attachée au principe selon lequel le dimanche, « marqueur historique, culturel et identitaire, constitue à tous égards un marqueur temporaire de la semaine ». C'est incontestablement, pour chacun d'entre nous, un point de repère symbolique qu'il convient de ne pas banaliser, tant il constitue un point d'ancrage stable pour la vie familiale et sociale.
Nous savons tous que le repos hebdomadaire date de la loi du 13 juillet 1906 et qu'il a connu de très nombreuses dérogations dès sa mise en place.
Avec cette proposition de loi, il s'agit de tenir compte de la spécificité de certains territoires : les zones touristiques, les zones frontalières, ainsi que les zones qui ont déjà pour usage de travailler le dimanche.
Tenir compte de ces spécificités, c'est clarifier des situations précaires et, surtout, répondre aux attentes non seulement de certains salariés, mais aussi de certains consommateurs que nous devons également entendre quand ils expriment la volonté de travailler le dimanche, voire de consommer le dimanche. Sept millions de Français déclarent travailler régulièrement ou occasionnellement le dimanche. Par ailleurs, trois Français sur quatre vivent en zone urbaine et les temps de transport sont de plus en plus longs en Île-de-France. Il n'est pas rare que douze à quatorze heures – lorsque l'on intègre le temps de transport – soient dévolues à la journée de travail. Il ne faut pas non plus oublier l'évolution, dans notre pays, de la composition des familles, notamment monoparentales.
De plus, de nombreux étudiants cherchent une expérience professionnelle ou ont besoin de financer tout ou partie de leurs études. Pour certains, le fait de travailler le dimanche peut alors devenir un choix.
Mes chers collègues, ce que nous souhaitons, et qui correspond à l'esprit de cette proposition de loi, c'est que le volontariat reste la règle et que le caractère exceptionnel soit reconnu, tant en termes de rémunération que de repos compensateur. Nous devons être clairs, mes chers collègues : en aucun cas il ne s'agit d'ouvrir partout, tous les dimanches, tous les commerces. De ce point de vue, le changement de titre de la proposition de loi constitue un élément symbolique particulièrement fort : il s'agit bien de redéfinir la réglementation du repos dominical. La règle reste évidemment celle du repos hebdomadaire, comme le rappelle l'article 1er de la proposition de loi qui vous est soumise.
La commission des affaires économiques a adopté quelques amendements pour encadrer et renforcer le caractère exceptionnel de l'ouverture dominicale. Je le répète : trois de ces amendements ont été repris dans la nouvelle réaction de l'article 2, visant à demander l'avis des chambres de métiers et à s'assurer que nous sommes bien en possession des délibérations aussi bien des communes que des EPCI concernées.
Enfin, deux amendements, qui visent à protéger particulièrement les salariés, nous ont paru importants. Nous avons tout d'abord souhaité prévoir, dans le droit du travail, une clause de réversibilité fondée sur les mesures relatives au temps partiel. Il est tout à fait normal qu'un salarié qui travaille le week-end soit prioritaire le jour où un poste s'ouvre dans l'entreprise pour les autres jours de la semaine. De même, un salarié qui travaille la semaine doit être prioritaire si un poste s'ouvre le week-end. Il faut qu'existe la possibilité de revoir la décision pour s'adapter aussi bien à l'évolution de la vie du salarié qu'à celle de l'entreprise, sur la base du volontariat.
De plus, l'autorisation d'ouvrir le dimanche est liée à la fois à l'activité et à l'exploitant. En d'autres termes, tout changement doit appeler une nouvelle autorisation, ce qui représente une garantie claire pour les salariés. C'en est une, en effet, de savoir que l'opportunité est appréciée en fonction de l'activité de chacun des commerces.
Mes chers collègues, je voudrais rappeler que les ventes sur Internet ont augmenté de 27 % au troisième trimestre de 2008. Chacun le sait ici : Internet fonctionne vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Certains diront qu'il ne s'agit pas d'un acte d'achat : il n'en reste pas moins vrai que ce qu'on a dépensé sur Internet, on ne le dépensera plus dans un commerce.
Par ailleurs, au moment où les magasins de plusieurs de nos voisins européens ouvrent le dimanche, ce texte est très important pour les villes françaises situées en zone frontalière.
Enfin, au moment où le tourisme constitue une des toutes premières activités économiques, il est indispensable d'adapter notre législation. Dois-je rappeler que le Président de la République s'était engagé sur le sujet durant la campagne électorale ?
La discussion de ce texte montre, de façon quelquefois exacerbée, combien notre démocratie reste vigilante quand il s'agit de questions de société. Il est parfaitement légitime que nous sachions nous retrouver pour débattre des enjeux de société. Ce débat-là, je le comprends quand il est situé dans le bon contexte, mais ne nous trompons pas de débat ! Ce à quoi nous invite le texte, c'est simplement à autoriser une évolution de la réglementation. Il serait sage que nous remettions tous cette proposition de loi à sa juste place : celle d'une proposition d'harmonisation de notre législation. C'est de cela que nous souhaitons discuter avec vous, dans le calme et la sérénité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)