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Patrick Balkany
Question N° 98847 au Ministère du Travail


Question soumise le 1er février 2011

M. Patrick Balkany attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur l'inquiétude de certains opticiens concernant les remboursements pratiqués par de nombreuses mutuelles ayant monté des partenariats avec certains professionnels d'optique. Afin d'attirer de nouveaux clients, de nombreuses mutuelles ont élargi leur offre optique en proposant à leurs assurés des remboursements attractifs sur les lunettes et les lentilles. Néanmoins, afin que ces remboursements importants n'engendrent pas un coût trop élevé pour les mutuelles, ces dernières ont monté des partenariats avec certains opticiens acceptant de baisser leurs tarifs sur ces produits. Ainsi, les achats de lentilles et montures effectués chez un opticien partenaire sont mieux remboursés que les achats effectués chez un opticien non partenaire. Ces pratiques ont participé à la mise en place d'un véritable réseau fermé opposant, d'une part, les opticiens partenaires et, d'autre part, les opticiens non partenaires qui ont vu certains de leurs clients redirigés par leur mutuelle chez un opticien concurrent partenaire. Si l'existence de ce système s'est traduite, pour le consommateur, par une baisse des tarifs qu'il faut saluer, il a également introduit un biais injuste portant atteinte au principe de concurrence libre et non faussée qui doit régir le marché. En effet, nombre des professionnels d'optique se sont vus écartés de ces réseaux alors même qu'ils étaient prêts à se soumettre aux conditions fixées par les mutuelles. Par ailleurs, si l'existence de ces réseaux n'a pas été remise en cause, la pratique des remboursements différenciés a quant à elle été condamnée au mois de septembre 2010. La juridiction saisie a, en effet, estimé que le niveau de remboursement ne pouvait varier en fonction des choix du praticien. Or, malgré ce jugement, la pratique des remboursements différenciés perdure. Face à cette situation et au regard de la jurisprudence, nombre d'opticiens se sont mobilisés pour demander, d'une part, que ces réseaux mis en place par les mutuelles s'ouvrent à l'ensemble des opticiens qui souhaiteraient s'associer à cette démarche - cette ouverture des réseaux, juste et équitable pour les professionnels d'optique, se traduirait également par un gain pour les consommateurs qui seraient ainsi plus nombreux à bénéficier de remboursements avantageux - et, d'autre part, l'interdiction effective des remboursements différenciés encore pratiqués par certaines mutuelles. Il lui demande donc de lui faire part de la position du Gouvernement sur ce sujet.

Réponse émise le 25 octobre 2011

Les réseaux de soins, mutualistes ou non, ont été conçus dans un double objectif : d'une part, de modérer les tarifs des prestations de santé, notamment dans des secteurs où la prise en charge par l'assurance maladie reste faible (optique et dentaire) ; d'autre part, de lutter contre le renoncement aux soins en modérant les tarifs et ainsi rétablir l'égalité dans l'accès à certaines prestations de santé. Par un arrêt du 18 mars 2010, la Cour de cassation a jugé contraire à la loi la pratique du remboursement bonifié d'un adhérent fréquentant un réseau de soins, du fait de l'insuffisance de base légale. En effet, l'article L. 112-1 du code de la mutualité définit restrictivement les critères possibles de modulation des remboursements. Or, dans sa rédaction actuelle, le code n'autorise pas une modulation du remboursement en fonction de la consultation d'un praticien adhérant à un réseau de soins, alors que les organismes d'assurance disposent de cette faculté en application du code des assurances. En tout état de cause, l'arrêt précité de la Cour de cassation ne remet pas en cause le principe même des réseaux de soins. S'il est vrai que les réseaux de soins constituent des marchés restreints, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un processus de contractualisation libre entre acteurs privés. Du reste, l'autorité de la concurrence a déjà pris position sur la question (avis 09-à-46 du 9 septembre 2009 relatif aux effets sur la concurrence du développement de réseaux de soins agréés). Elle retient que ces réseaux de soins ne sont pas contraires au droit de la concurrence dés lors que les parts de marché détenues par les membres du réseau de soir n'excédent pas le seuil de 30 % du marché pertinent. Lorsque ce seuil est respecté, l'atteinte au principe de libre concurrence ne peut être caractérisée qu'en présence d'un effet substantiellement négatif sur celle-ci (réduction de l'accès aux marchés ou de la concurrence sur ceux-ci). Priver les mutuelles de cette capacité à contractualiser reviendrait à leur ôter un outil en matière de régulation des dépenses de santé. Plus généralement, remettre en cause le principe des réseaux de soins serait également un signal contradictoire à un moment où les complémentaires santé sont appelées à s'impliquer plus activement dans la gestion du risque. Une modification législative est donc nécessaire pour donner une base juridique aux pratiques des mutuelles. Un amendement, déposé par le député Yves Bur, a été adopté en ce sens par l'Assemblée nationale en première lecture lors de l'examen de la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. En deuxième lecture à l'Assemblée nationale, le Gouvernement avait également institué un encadrement des règles auxquelles doivent obéir tout conventionnement, quel que soit l'organisme assureur concerné, en renvoyant à un décret la mise en oeuvre des principes de transparence, d'égal accès aux soins et de qualité des pratiques et des produits. Cet article a cependant été déclaré non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel qui a considéré que cet amendement était étranger à l'objet de la loi dans laquelle il s'insérait.

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