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Geneviève Fioraso
Question N° 97869 au Ministère de l'Intérieur


Question soumise le 18 janvier 2011

Mme Geneviève Fioraso attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur la modification de la liste des pays d'origine « sûrs ». En effet, le 13 novembre 2009, le conseil d'administration de l'OFPRA a modifié cette liste des pays d'origine sûrs et y a ajouté la Serbie, l'Arménie et la Turquie. L'inscription d'un État sur la liste des pays d'origine sûrs a pour conséquence de diviser par six le temps d'examen d'une demande d'asile, de priver la personne de tout accès à un centre d'accueil pour demandeur d'asile, de lui refuser le bénéfice de toute aide financière le temps de sa demande. Enfin, cela empêche tout demandeur de bénéficier d'un recours suspensif d'un éloignement du territoire devant la Cour nationale du droit d'asile. En conséquence, elle l'exhorte à revenir sur le principe discriminatoire de pays d'origine « sûrs » et, en attendant, lui demande quelles mesures il entend prendre pour qu'une procédure écrite et publique de révision de la liste des pays d'origine « sûrs » soit adoptée et qu'un suivi permanent et vigilant de la situation des droits de l'Homme dans ceux-ci soit mis en place par l'OFPRA.

Réponse émise le 7 juin 2011

En application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les demandes d'asile émanant de ressortissants étrangers, originaires de pays inscrits sur la liste des pays considérés comme d'origine sûrs peuvent être examinées selon une procédure « prioritaire ». Le principe de l'adoption d'une liste nationale de pays d'origine sûrs et la possibilité de soumettre les demandes émanant des ressortissants de ces pays à une procédure d'examen prioritaire sont prévus par la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005. Ce dispositif, qui a été jugé conforme au droit d'asile et au principe d'égalité par le conseil constitutionnel (décision du 4 décembre 2003), vise à faciliter le traitement des demandes d'asile en distinguant, en fonction de critères objectifs, selon qu'elles émanent ou non de ressortissants de pays veillant « au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'Homme et des libertés fondamentales » et à dissuader les demandes dont les motivations paraissent étrangères à une problématique d'asile. L'application de ce dispositif ne signifie pas que les personnes sont inéligibles à une protection internationale, mais a seulement pour objet de soumettre l'examen de leur demande à une procédure « prioritaire » permettant l'intervention d'une décision dans des délais rapides, de l'ordre de quinze jours, sans que soit modifiée la durée même de l'examen. Cette procédure préserve intégralement les garanties résultant d'un examen individuel par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) assuré dans les mêmes conditions d'indépendance et de compétence que pour toute demande d'asile. De même, si l'étranger ne bénéficie pas du caractère suspensif du recours devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) contre une décision négative de l'OFPRA, il peut, à l'occasion d'un recours devant le juge administratif contre la mesure d'éloignement consécutive à la décision de rejet de l'OFPRA, contester la désignation du pays de renvoi en faisant valoir les risques qu'il y encourt et ce recours a un caractère pleinement suspensif. Par ailleurs, les modalités selon lesquelles la liste des pays d'origine sûrs est établie et peut être révisée sont précisément encadrées par la directive communautaire précitée, par la législation nationale et par la jurisprudence. Ainsi, l'inscription d'un pays sur la liste n'est possible que s'il s'agit d'un État démocratique, respectueux des droits et libertés individuels tels que garantis par les instruments internationaux de protection des droits de l'Homme et où les personnes sont protégées contre des mauvais traitements et contre les violations de leurs droits fondamentaux. Ces garanties doivent exister de manière effective et s'inscrire dans la durée. L'inscription, le maintien ou le retrait d'un pays sur cette liste résulte d'un examen attentif et rigoureux de la situation dans les pays concernés s'appuyant sur les informations données par les postes diplomatiques et les directions compétentes du ministère des affaires étrangères et européennes ainsi que sur les rapports du haut comité aux réfugiés (HCR) et d'organisations non gouvernementales internationalement reconnues (Amnesty International, Human Rights Watch...). L'établissement de cette liste procède d'une décision collégiale du conseil d'administration de l'OFPRA, lequel comprend, aux côtés des représentants de l'État et du personnel de l'office, deux parlementaires, désignés par l'Assemblée nationale et par le Sénat, un représentant de la France au Parlement européen et aux séances duquel assistent et peuvent présenter des observations, le délégué du haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés ainsi que trois personnalités qualifiées. Le conseil d'administration de l'Office se réunit au moins deux fois par an et chaque fois que cela est nécessaire, sur convocation de son président ou à la demande d'au moins quatre de ses membres. Enfin, les décisions prises à cet égard par le conseil d'administration de l'OFPRA sont susceptibles d'un recours juridictionnel devant le Conseil d'État qui exerce un contrôle rigoureux de la pertinence de la décision au regard du contexte prévalant dans le pays concerné, comme l'ont montré ses décisions du 13 février 2008 et du 23 juillet 2010, ayant conduit respectivement au retrait de la liste, d'une part, du Niger et de l'Albanie, d'autre part, de la Turquie, de Madagascar, de l'Arménie et du Mali (en ce qui concerne les femmes).

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