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Jean-Marc Roubaud
Question N° 85952 au Premier Ministre


Question soumise le 3 août 2010

M. Jean-Marc Roubaud attire l'attention de M. le Premier ministre sur les difficultés rencontrées par les fédérations de motocyclisme et de sport automobile concernant l'application du dispositif législatif et réglementaire (décret n° 2010-365 du 9 avril 2010) portant sur l'évaluation des incidences Natura 2000. Ces textes imposent désormais la réalisation d'une évaluation aux manifestations ainsi qu'aux circuits dès lors que leur existence est susceptible d'avoir une incidence significative sur un site protégé et ce, que la manifestation ou le circuit soient situés à l'intérieur ou à l'extérieur d'une zone Natura 2000. Or, le fait que cette évaluation puisse être réclamée lorsque l'activité se trouve à l'extérieur d'un site Natura 2000, notion extensive et interprétable, peut avoir pour conséquence automatique d'en imposer la production à la quasi-totalité des organisateurs et gestionnaires de circuits. Bien qu'il soit vraisemblable que l'esprit du texte ne visait à l'origine que les activités situées à l'extérieur d'une telle zone, mais dont la proximité était susceptible d'impacter de manière significative celle-ci, l'imprécision de la rédaction permet déjà à certains de s'engouffrer dans cette brèche afin d'imposer des contraintes à toutes les manifestations et circuits sur le territoire national. Par ailleurs, outre le champ d'application particulièrement vaste de cette contrainte, est constaté que ce dispositif instaure pour les organisateurs de manifestations, une véritable présomption d'atteinte aux objectifs de conservation des sites Natura 2000. L'administration souligne ainsi que le simple risque de compromettre les objectifs de conservation du site concerné doit être considéré comme susceptible d'affecter ce dernier de manière conséquente. Afin de renverser cette présomption, mais également pour contenir les procédures contentieuses inévitablement engagées par les associations écologistes, les organisateurs n'auront d'autre choix que de faire établir une liste exhaustive qui nécessitera de recourir à des experts spécialisés dans a réalisation d'études environnementales et qui représentera un coût financier insurmontable pour la grande majorité des organisateurs. Les fédérations concernées vont en outre voir leurs missions de structuration et d'encadrement de la pratique sévèrement remises en cause alors même que la promotion et le développement de leurs disciplines sont considérés, au sens des dispositions de l'article L. 100-1 du code du sport, comme des activités d'intérêt général. En effet, la charge réglementaire, administrative et financière disproportionnée que fait peser cette nouvelle réglementation sur les associations sportives ne peut qu'aboutir, à court et moyen terme, à favoriser une pratique sauvage et déstructurée dont l'incidence sur l'environnement est assurément beaucoup plus préjudiciable. De plus, ce dispositif inapproprié met en péril les nombreuses actions constructives engagées par nos institutions auprès de tous les pratiquants s'agissant des problématiques environnementales. Enfin, il convient de rappeler que la charte constitutionnelle de l'environnement de 2004 affirme que si le développement durable comporte un volet environnemental, il doit permettre également le développement économique ainsi que le progrès social. Or, le dispositif réglementaire dans sa rédaction actuelle ne tient compte ni du rôle économique moteur que jouent les manifestations de sports mécaniques dans l'aménagement du territoire, ni de celui de laboratoire d'innovations technologiques qui contribue à répondre à de nombreuses problématiques environnementales et sociales. Si les démarches engagées par les deux fédérations n'entendent pas remettre en cause la nécessité d'une politique nationale environnementale en adéquation avec des exigences européennes, elles comptent sur le soutien et l'intervention des acteurs politiques concernés. Elles attendent que le dispositif réglementaire soit rediscuté afin qu'à terme il n'impose aux acteurs des sports mécaniques que des contraintes strictement nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis pour la conservation des sites Natura 2000 et tenant compte des intérêts du sport. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer sa position sur ce dossier.

Réponse émise le 23 novembre 2010

Les sports motorisés sont soumis à évaluation des incidences Satura 2000 en application du paragraphe 3 de l'article 6 de la directive « habitats », selon lequel l'évaluation des incidences doit porter sur tout projet susceptible d'affecter un site Satura 2000. Or, la Cour de justice de l'Union européenne a rendu, le 4 mars 2010, un arrêt jugeant non conforme la transposition en droit interne de cet article. Afin d'exécuter l'arrêt de la Cour et répondre à nos obligations communautaires, l'article 13 de la loi relative à la responsabilité environnementale votée le 1er août 2008 a validé le choix de la France de transposer l'article 6 de la directive en s'appuyant sur un dispositif de listes positives. Ce choix a fait l'objet de discussions approfondies avec l'ensemble des représentants des catégories socioprofessionnelles. La majorité d'entre eux a souligné le caractère sécurisant de ce dispositif qui a donc été retenu par le Gouvernement et voté par le Parlement. S'agissant de la pratique des sports motorisés, l'expérience des services du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat (MEEDDM) et les contentieux nationaux et communautaires sur ce sujet, ont justifié leur inscription sur la liste nationale du décret du 9 avril 2010. Eu égard à l'enjeu pour les sites Satura, c'est aussi dans l'intérêt d'une meilleure sécurisation juridique des pratiques des sports motorisés que cette catégorie est soumise à évaluation des incidences, qu'elle se déroule à l'intérieur ou à l'extérieur des sites. Toutefois, afin de ne pas alourdir exagérément les contraintes pour les pétitionnaires, le principe est que l'évaluation des incidences s'intègre dans les régimes d'encadrement administratifs existants. Ainsi, il est prévu une évaluation des incidences simplifiée lorsque la conclusion sur l'absence d'impacts significatifs est évidente. Si l'obligation d'évaluation demeure pour les manifestations automobile ou motocycliste devant se dérouler loin des sites désignés, le contenu de celle-ci est proportionnellement réduit lorsque le risque d'atteinte à un site Satura 2000 est moindre. Ce système permet ainsi à l'organisateur de s'interroger en amont sur les interactions de sa manifestation avec les sites Satura 2000 et de prévenir les éventuels recours d'opposants. Cette disposition est également de nature à répondre à l'inquiétude des fédérations quant aux coûts susceptibles d'être engendrés par la réalisation des évaluations. Lorsque le risque d'atteinte à un site Satura 2000 est peu élevé, l'évaluation peut généralement être conduite directement par le porteur du projet en consultant les inventaires et données publics, l'animateur du site ou encore le service déconcentré chargé de Satura 2000. de plus, afin d'accompagner les acteurs sportifs dans cette nouvelle obligation, en collaboration avec les ministères chargés de la jeunesse et des sports et les représentants du réseau intersports, un guide méthodologique pour l'évaluation des incidences des manifestations sportives, destiné aux organisateurs a été élaboré. Les discussions à l'occasion de ce guide ont montré d'une part, un besoin d'appropriation des questions de biodiversité par le monde du sport et d'autre part, l'importance pour l'organisateur de construire son projet en intégrant dès le début les enjeux de préservation de la biodiversité. À cet effet, il est essentiel que les organisateurs prennent contact le plus en amont possible avec les services de l'État pour concevoir une manifestation qui évite les zones ou périodes sensibles, identifier les perturbations ou destructions néanmoins occasionnées et éviter ou réduire ces impacts. L'objectif est de favoriser le dialogue qui dépend largement de la bonne volonté des organisateurs. L'évaluation des incidences permet ainsi aux organisateurs de démontrer que leurs activités ou manifestations se déroulent en comptabilité avec les objectifs de conservation du site concerné. Les fédérations craignent que leur rôle d'encadrement de la pratique sportive soit remis en cause par l'obligation d'évaluation des incidences, au motif qu'elles encourageraient une pratique sauvage. Au contraire, la vocation de structuration des fédérations est renforcée par l'appui qu'elles peuvent aux clubs et associations locales. Les pratiquants qui s'exonèreraient du respect des lois et règlements s'exposent à des sanctions administratives et pénales. Il serait très préjudiciable pour l'État comme pour les fédérations de sport motorisé que la pratique sauvage de ces activités se multiplie. Il en irait alors de la responsabilité des autorités publiques comme de celles des organisateurs. De telles initiatives iraient à l'encontre des obligations réglementaires encadrant la pratique de ces activités. La France devra compte de l'exécution de l'arrêt de la Cour de justice en mars 2011. Elle devra démontrer qu'elle remplit bien les obligations qui lui incombent au regard de l'article 6 de la directive « habitats » et donc que le nouveau dispositif pris pour l'évaluation des incidences est opérationnel et répond aux engagements communautaires. Dans ce contexte, il n'est pas envisagé de modifier les dispositions législatives et réglementaires qui viennent d'être adoptées. Le réseau Natura 2000 s'inscrit dans la politique de développement durable des territoires. L'évaluation des incidences Natura 2000 vise à garantir que le développement des activités économiques, sociales et culturelles est compatible avec les objectifs de préservation des sites Natura 2000. Elle s'intègre donc dans le droit fil des actions visant à une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux initiés par les fédérations des sports motorisés mentionnés dans la question. Les bonnes pratiques ainsi soulignées doivent également viser la préservation de la biodiversité et intégrer les notions de dérangement des espèces ou de destruction des habitats par piétinement. Il faut donc encourager les fédérations à s'impliquer dans les comités de pilotage des sites Natura 2000 et participer ainsi à la gestion du site. Elles pourront ainsi contribuer à la prise en compte dans le document d'objectifs du site de la pratique de ces activités et solliciter si elles le souhaitent, l'adhésion à la charte qui permet la dispense d'évaluation des incidences.

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