Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

André Gerin
Question N° 124387 au Ministère de la Justice


Question soumise le 13 décembre 2011

M. André Gerin attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le rapport de l'observatoire international des prisons (OIP) qui vient d'être rendu public. Il est le fruit d'un travail d'enquête de deux ans. Il est terriblement accusateur à l'égard des conditions carcérales dans notre pays. Le taux de surpopulation est globalement de 113 %, avec de fortes disparités selon les établissements. 60 % des détenus le sont dans une prison surpeuplée. Plus d'un quart des détenus sont illettrés ou éprouvent des difficultés à lire, plus d'un tiers sont toxicomanes, plus de 20 % souffrent de troubles psychiatriques, alors que les équipes de soins sont en sous-effectifs. Le taux de suicide demeure l'un des plus élevé d'Europe et le nombre de détenus ayant mis fin à leurs jours a augmenté de 8 % sur les dix premiers mois de l'année. Il rappelle l'avoir interpellé très récemment sur le cas d'un septième suicide à la maison d'arrêt de Corbas depuis le début de l'année 2011. Le rapport de l'OIP souligne le manque d'activité en prison : moins d'une personne sur onze bénéficie d'une formation professionnelle et moins d'un quart exerce un emploi, dans des conditions, par ailleurs, d'un autre âge et de non-droit. Les moyens humains mis à la disposition des SPIP deviennent dérisoires et rendent impossible un travail en faveur de la réinsertion. Dans ces conditions, les professions de foi contre la récidive sont illusoires car tout contribue à la nourrir, à moins de considérer que l'enfermement est la solution définitive pour lutter contre la délinquance. Cette situation est indigne de la France et d'une Nation qui à la violence doit opposer la civilisation. Il lui demande donc si le Gouvernement a l'intention de s'attaquer enfin efficacement et humainement à cette dérive honteuse de l'incarcération dans les conditions inacceptables dans lesquelles elle intervient aujourd'hui.

Réponse émise le 27 mars 2012

Les établissements pénitentiaires connaissent une augmentation sensible du nombre de personnes écrouées détenues depuis le début de l'année 2011. En effet, au 1er décembre 2011, 65 262 personnes étaient écrouées et détenues contre 61 473 au 1er décembre 2010, soit une hausse de 6,2 %. Pour lutter contre cette surpopulation, plusieurs actions sont mises en oeuvre par la chancellerie. Tout d'abord, une politique active de développement des aménagements de peines et, plus généralement, des placements sous surveillance électronique  a été mise en oeuvre et connaît déjà des résultants encourageants. La part des personnes en aménagement de peine sous écrou sur l’ensemble des personnes condamnées écrouées est de 18,6 %, soit une hausse de plus de 2 points par rapport au 1er décembre 2010 (16,5 %) et de plus de 4 points par rapport au 1er décembre 2009 (14,5 %) : 7 444 aménagements de peine au 1er décembre 2009, 8 528 au 1er décembre 2010, 10 698 au 1er décembre 2011. Le placement sous surveillance électronique (PSE) a connu une hausse très significative ces dernières années, puisque 5 633 mesures étaient en cours de suivi au 1er décembre 2010, tandis qu’au 1er décembre 2011, 7 801 mesures étaient dénombrées, soit une hausse de 2 200 en un an. Parallèlement, le Gouvernement une politique immobilière ambitieuse, qui seule permettra de résorber la surpopulation carcérale. Ainsi, le nouveau programme immobilier pénitentiaire, annoncé en mai dernier par le garde des Sceaux, traduit la volonté du ministère de la justice et des libertés d’une part d'assurer des conditions dignes de détention, en conformité avec les règles pénitentiaires européennes et les prescriptions de la loi pénitentiaire de novembre 2009 et d’autre part d'augmenter les capacités d’hébergement de l’administration pénitentiaire afin d’améliorer le taux de mise à exécution des peines d’emprisonnement prononcées par les juridictions pénales. Ce programme sera complété, en application du projet de loi de programmation pour l'exécution des peines définitivement adopté par le Parlement le 29 février 2012 afin de disposer de 80 000 places de prison d'ici fin 2017.  Seront notamment développés les établissement pour courtes peines avec des règles de fonctionnement adaptées. S’agissant du travail en détention, la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 (articles 32 et 33) et ses décrets d'application du 23 décembre 2010 introduisent des modifications très importantes , relatives notamment à l'examen des candidatures au travail, à l'introduction de l'acte d'engagement ou à l'instauration d'une rémunération horaire minimale individualisée pour les personnes détenues. Le caractère très novateur de ces dispositions implique un accompagnement des services déconcentrés. A cette fin, la DAP finalise actuellement la circulaire d'application de ces nouvelles normes en matière de travail pénitentiaire, elle devrait pouvoir être diffusée dans le courant du premier trimestre 2012. L'administration pénitentiaire poursuit, par ailleurs, depuis 2008, le développement du plan d'action "Entreprendre", dont les différents axes (aménagements structurels et organisationnels, prospection commerciale...) visent à accroître l'offre de travail en détention. Quant aux soins psychiatriques prodigués aux personnes détenues, ils relèvent du ministère chargé de la santé, aux termes de la loi du 18 janvier 1994. Pour les soins ambulatoires, les personnes détenues souffrant de troubles mentaux sont ainsi prises en charge par le secteur psychiatrique général au sein de l’UCSA de l’établissement pénitentiaire ou par l’un des 26 services médico-psychologiques régionaux (SMPR), ayant une vocation de coordination et une compétence régionale, étant équipés de cellules d’hébergement de nuit. Les hospitalisations sont réalisées en milieu hospitalier par les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), par le secteur psychiatrique habilité de l’hôpital de rattachement (en cas d’absence d’UHSA) ou, sur prescription médicale, en unité pour malades difficiles (UMD). L’hospitalisation complète avec consentement est toujours réalisée en UHSA. L'article 48 de la loi d’orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 a posé le principe que les hospitalisations psychiatriques des personnes détenues seront réalisées dans les établissements de santé dans des unités adaptées que sont les UHSA. L’UHSA de Lyon a ouvert ses portes en mai 2010, celles de Nancy et de Toulouse ouvriront leurs portes au premier trimestre 2012, celles de Villejuif, Lille, Marseille, Orléans, Bordeaux et Rennes seront achevées en 2013 et 2014. La seconde tranche de construction, comportant 265 places, sera réalisée à partir de 2014, les sites restant à déterminer. La collaboration avec le ministère en charge de la santé se poursuit pour intensifier l’offre de soins aux personnes détenues tout au long de l’exécution de leur incarcération. Le ministère en charge de la santé a élaboré, en partenariat avec le ministère de la Justice et des Libertés, un plan d’actions stratégiques relatif à la prise en charge sanitaire des personnes détenues qui fixe les objectifs à atteindre en matière sanitaire jusqu’en 2014. Ce plan stratégique détermine notamment cinq mesures phares qui concernent le renforcement d’une politique de prévention du suicide concertée entre les différents intervenants, le développement d’actions d’éducation et de promotion de la santé, l’accessibilité des personnes détenues à des soins en santé mentale adaptés et la définition des modalités d’accès aux droits des personnes détenues en aménagement de peine. Enfin, il faut rappeler que les moyens humains dévolus aux services pénitentiaires d’insertion et de probation  sont passés entre 1997 et 2010 de 1 175 à 3 198 personnels afin de faire face à l’augmentation de la population pénale suivie.  La titularisation intervenue à la fin du mois de juin 2011 de 240 agents de la 14ème promotion des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP), ainsi que l’arrivée dans les services de 203 stagiaires de la 15ème promotion dès le 3 octobre 2011 ont accru les moyens humains de manière conséquente au sein de ces services. Dans l’attente du recrutement et de la formation des personnels, une centaine d’agents contractuels ont été recrutés en 2011 pour anticiper ces arrivées. Le recours à la réserve civile pénitentiaire, prévue à l’article 17 de loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, va également renforcer les effectifs de ces services en faisant appel à des personnels expérimentés et attachés au service public grâce au triplement du budget consacré en 2011 à la réserve judiciaire et pénitentiaire. Pour autant, ces mesures doivent s’accompagner d’une évaluation des méthodes et des charges effectives de travail. C’est pourquoi, ont été mis en place dès le mois de mars  2011 des inspections et des groupes de travail et diligentée une inspection conjointe IGF/IGSJ, afin d’étudier l’organisation et le fonctionnement des SPIP. Les préconisations portent notamment sur les méthodes de suivi des personnes placées sous main de justice (PPSMJ) et sur l’organisation des SPIP pour améliorer l’effectivité des mesures exécutées en milieu ouvert. Des personnels de surveillance de l’administration pénitentiaire ont été également affectés dans les SPIP afin d’assurer les enquêtes et le suivi matériel de la surveillance électronique. Ces affectations vont se poursuivre. Sur le plan méthodologique, la mise en œuvre d’un dispositif d’évaluation harmonisé et partagé sur tout le territoire national (diagnostic à visée criminologique) des PPSMJ au sein des SPIP participe à l’efficacité du service public pénitentiaire. Dans le discours qu'il a prononcé à Réau (Seine et Marne) le 13 septembre dernier, le président de la République a rappelé toute l’importance des SPIP dans la mission de prévention de la récidive.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion