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Dominique Orliac
Question N° 123224 au Ministère du Travail


Question soumise le 29 novembre 2011

Mme Dominique Orliac attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les études épidémiologiques récentes sur les anxiolytiques et les somnifères qui, pris de manière chronique, favoriseraient le risque de maladie d'Alzheimer. En effet, la récente étude réalisée par le professeur Begaud sur 4 000 patients montre que la consommation chronique de benzodiazépines, de tranquillisants et des somnifères favorise l'apparition de la maladie d'Alzheimer. D'autres études internationales réalisées ces dernières années confirmeraient ce doute. Alors que l'affaire du médiator a démontré les risques qui peuvent résider dans l'utilisation à long terme d'un médicament et où le Parlement délibère sur la sécurité sanitaire, ces études ne doivent pas être ignorées. La maladie d'Alzheimer se développant et représentant une vraie menace pour notre population, toute cause éventuelle doit donc être étudiée avec précision. Ces études sont donc des signaux forts qui doivent être pris en compte sans attendre, alors qu'il faut rappeler qu'un rapport de l'office parlementaire d'évaluation des politiques de santé (OPEPS) sur le bon usage des psychotropes, remis au Parlement en 2006, avait déjà indiqué ces risques. La maladie d'Alzheimer étant devenue une grande cause nationale, elle lui demande quelle suite il entend donner, en concertation avec les organismes compétents, aux conclusions de ces études et s'il compte faire véritablement appliquer l'arrêté du 1er février 2001 sur les substances à propriété hypnotique ou anxiolytique dont la durée de prescription est limitée.

Réponse émise le 1er mai 2012

Les benzodiazépines, spécialités pharmaceutiques possédant des propriétés anxiolytiques, sédatives, myorelaxantes mais aussi anticonvulsivantes font l'objet d'une surveillance active par les autorités sanitaires françaises depuis le début des années 80, et tout particulièrement par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) qui s'appuie sur les réseaux des Centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) et des Centres d'évaluation et d'information sur la pharmacodépendance (CEIP). Un certain nombre de risques liés à leur utilisation sont connus et figurent dans le Résumé des caractéristiques du produit (RCP) de ces spécialités, tels que les risques d'amnésie antérograde (perte de mémoire des faits récents), les risques d'altération des fonctions psychomotrices pouvant survenir dans les heures suivant la prise, les troubles du comportement, de la mémoire et une altération de l'état de conscience, ainsi que les risques liés à la tolérance au produit et à la dépendance. Les trouubles de la mémoire sont un effet indésirable largement documenté lors des traitements par benzodiazépines. Plusieurs études ont tenté d'évaluer le risque d'altération de la fonction cognitive voire d'apparition d'une démence et son association à l'exposition aux benzodiazépines. Toutefois, il n'a pas été établi à ce jour de lien entre benzodiazépines et démences, et en particulier entre benzodiazépines et maladie d'Alzheimer. En France, ce sujet fait l'objet d'une préoccupation particulière des pouvoirs publics du fait d'une consommation importante de benzodiazépines dans la population. Elle s'inscrit également dans le cadre du Plan Alzheimer qui est une priorité de santé publique depuis 4 ans. Un article paru le 28 septembre 2011 dans Sciences et Avenir s'est fait écho des résultats d'une étude portée par le Professeur Bégaud, qui seraient en faveur d'une association entre la prise de benzodiazépines et la survenue d'une démence. Le Professeur Bégaud a communiqué à l'AFSSAPS une note faisant le point sur ces travaux en cours dont il a précisé que les résultats définitifs n'étaient pas connus. Le groupe de travail PGR-PEPI (Plan de gestion des risques - Etudes pharmacoépidémiologiques) de l'AFSSAPS a analysé en novembre 2011 les premiers éléments de l'étude du Professeur Bégaud ainsi que les résultats des études publiées sur le sujet. Les résultats de cette analyse sont rendus publics dans un rapport élaboré par l'AFSSAPS et intitulé : « Etat des lieux de la consommation de benzodiazépines en France » disponible sur son site Internet (www. afssaps. fr). Au terme de ce travail d'évaluation, il apparaît que les résultats de ces études ne sont pas homogènes ; quatre vont dans le sens d'une association entre l'exposition aux benzodiazépines et le risque d'apparition d'une démence, quatre ne concluent pas et une étude va dans le sens d'une association « protectrice ». Depuis, 3 nouvelles études ont été publiées dont un travail important d'une équipe coréenne. Il existe néanmoins un signal qui paraît donc devoir être exploré. En ce qui concerne l'étude en cours « Benzodem » conduite par le Professeur Bégaud, le groupe de travail analysera les résultats définitifs, dès qu'ils seront disponibles, au début du second semestre 2012. Par ailleurs, s'agissant des actions mises en 'uvre par les autorités sanitaires quant à l'encadrement de la prescription des benzodiazépines et à l'information des professionnels de santé et patients, des mesures ont été prises depuis 1991. La durée maximale de prescription est limitée à 12 semaines pour les anxiolytiques et 4 semaines pour les hypnotiques. Elle a été réduite de façon plus importante pour certains médicaments hypnotiques (par exemple limitation de la durée de prescription du flunitrazépam à 14 jours en 2001). De plus, la restriction de la durée maximale de prescription a également été un levier pour limiter l'abus du clonazépam (limitation à 12 semaines depuis 2010). Pour certaines benzodiazépines particulièrement utilisées notamment par les toxicomanes, la prescription sur ordonnance sécurisée est devenue obligatoire (flunitrazépam, clorazépate dipotassique et clonazépam). Enfin, les indications de certaines benzodiazépines ont été restreintes (par exemple, flunitrazépam en 1996). De même, l'information des professionnels de santé et des patients quant à l'utilisation de ces produits a été renforcée notamment par l'harmonisation des RCP de ces produits, qui depuis 2004 a permis d'établir un tronc commun d'informations et notices de l'ensemble des benzodiazépines, par la diffusion régulière de communiqués et de lettres d'information aux professionnels de santé, par l'élaboration et la publication de mises au point et recommandations ainsi que depuis 2005 l'apposition d'un pictogramme sur le conditionnement externe de ces médicaments qui sont susceptibles « d'altérer les capacités à conduire un véhicule et, par extension, à utiliser des machines potentiellement dangereuses ou à exécuter des travaux nécessitant une attention soutenue ». Les benzodiazépines sont des molécules dont les propriétés permettent le traitement d'un certain nombre de pathologies parfois sévères et restent indispensables pour le traitement de très nombreux patients. Le niveau élevé de consommation en France, les effets secondaires à court terme de ces substances et les possibles effets secondaires à long terme invitent à une utilisation prudente et raisonnée de ces médicaments. Le strict respect des termes de leur AMM est la condition indispensable à leur bon usage dans le cadre d'un rapport bénéfices/risques positif. Les autorités sanitaires s'attachent à répéter ce message de bon usage et à poursuivre le suivi des effets indésirables de ces molécules, en particulier pour ce qui concerne les effets potentiellement délétères à long terme. Dans ce cadre, l'AFSSAPS va continuer son processus d'analyse des données scientifiques au fur et à mesure de leur mise à disposition en y associant les équipes de recherche mobilisées par la thématique « Alzheimer » dans le cadre du plan gouvernemental.

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