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Jean-Jacques Candelier
Question N° 117907 au Ministère de la Justice


Question soumise le 13 septembre 2011

M. Jean-Jacques Candelier interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la pratique actuelle et les consignes données au personnel, s'agissant des fouilles à nu, par la direction du centre de détention de Bapaume. L'article 3 de la convention européenne des droits de l'Homme prévoit : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ». L'article 57 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 dispose que : « Les fouilles doivent être justifiées par la présomption d'une infraction ou par les risques que le comportement des personnes détenues fait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l'établissement. Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées à ces nécessités et à la personnalité des personnes détenues. Les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou l'utilisation des moyens de détection électronique sont insuffisantes. » L'arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme El Shennawy c/ France du 20 janvier 2011 stipule : « des fouilles intégrales systématiques non justifiées et non dictées par des impératifs de sécurité, peuvent créer chez le détenu le sentiment d'être victime de mesures arbitraires. Le sentiment d'arbitraire, celui d'infériorité et l'angoisse qui y sont souvent associées et celui d'une profonde atteinte à la dignité que provoque l'obligation de se déshabiller devant autrui [...], peuvent caractériser un degré d'humiliation dépassant celui, tolérable parce qu'inéluctable, que comporte inévitablement la fouille corporelle des détenus. » Il faut donc limiter le recours à la pratique de la fouille corporelle intégrale des détenus. Or le directeur de la prison de Bapaume avait édicté le 23 mai 2011 une note interne instituant des fouilles à nu systématiques dans certains secteurs de l'établissement. Sous la pression d'une procédure en référé engagée par l'Observatoire international des prisons, l'administration pénitentiaire a abrogé cette note avant l'audience qui s'est tenue le 11 août 2011 devant le tribunal administratif de Lille. Néanmoins, des inquiétudes existent quant à une possible persistance de ces pratiques au sein de l'établissement. D'après des témoignages, cette note venait officialiser une pratique déjà en cours dans l'établissement depuis plusieurs mois, sous peine de sanctions disciplinaires. Il souhaite connaître la pratique actuelle et les consignes données au personnel, s'agissant des fouilles à nu, par la direction du centre de détention de Bapaume.

Réponse émise le 20 décembre 2011

La nécessité de trouver un équilibre entre le respect de la dignité de la personne détenue et les impératifs de sécurité en établissement pénitentiaire constitue un objectif fort et permanent de l'administration pénitentiaire, en particulier s'agissant de la réalisation des divers contrôles et fouilles qui ponctuent la vie de la personne détenue en détention. Le régime applicable en matière de fouille a dernièrement fait l'objet d'une évolution normative significative pour prendre en compte les exigences de la jurisprudence, d'une part de la Cour européenne des droits de l'Homme, d'autre part des juridictions administratives françaises, le Conseil d'État ayant ainsi jugé que les fouilles devaient, pour être conformes aux normes applicables, en particulier l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, réunir les conditions de nécessité, d'adaptation au motif poursuivi et de proportionnalité des moyens employés. L'article 57 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 et les articles R. 57-7-79 à R. 57-7-82 du code de procédure pénale, issus du décret n° 2010-1634 en date du 23 décembre 2010, énoncent la nécessité d'adapter la nature de la fouille et sa fréquence aux circonstances de la vie en détention, au profil de la personne détenue et aux risques encourus en termes de sécurité et d'ordre. Ces nouvelles dispositions impliquent une profonde évolution des pratiques professionnelles fondées jusqu'alors sur des dispositions définissant les circonstances à l'occasion desquelles les fouilles s'effectuaient systématiquement. Une circulaire d'application immédiate a été diffusée aux services déconcentrés de l'administration pénitentiaire le 14 avril dernier. Elle stipule que chaque opération de fouille d'une personne détenue doit satisfaire aux principes de nécessité et de proportionnalité, quelle que soit la nature de la fouille ou le lieu de détention de l'intéressée. Compte tenu de l'évolution significative des pratiques professionnelles, la circulaire a nécessité d'être présentée et explicitée aux services déconcentrés. L'information a ensuite été portée au sein des établissements auprès des personnels et les chefs d'établissement ont veillé à la mise en oeuvre et à l'application des nouvelles dispositions relatives au contrôle des personnes détenues dans le respect des principes de proportionnalité et de nécessité. La modification en profondeur des pratiques nécessite du temps, mais la direction de l'administration pénitentiaire veille à accompagner les services déconcentrés dans cette démarche et vérifie que les dispositions prises au plan local relatives aux mesures de contrôle respectent le nouveau cadre juridique applicable. Cet accompagnement et cette veille ont été ainsi mis en oeuvre pour le centre de détention de Bapaume qui applique désormais les dispositions de la circulaire relative aux moyens de contrôle des personnes détenues.

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