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Christophe Bouillon
Question N° 108029 au Ministère de l'Économie


Question soumise le 10 mai 2011

M. Christophe Bouillon attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la prochaine refonte du mode de calcul de l'indice des prix réalisé par l'INSEE. En effet, selon des informations récentes émanant de l'intersyndicale (CGT-CFDT-FO-Sud) de l'INSEE, le projet de révision du mode de calcul de l'indice des prix consisterait désormais à confier aux grandes et moyennes surfaces le relevé des prix au moyen des « données de caisse ». Or ce mode de relevé est en contradiction avec le procédé actuel, confié aux agents de l'INSEE, et pose ainsi un grave problème de sincérité dans la collecte des données. En effet, la collecte des données, confiée aux grands distributeurs, mettraient ceux-ci en conflit d'intérêt permanent. Comment celles-ci pourraient-elles donner de manière loyale des données qui pourraient servir à l'INSEE pour construire un indice potentiellement défavorable à leur publicité ? En conséquence et au vu de l'intérêt tant pour les consommateurs que pour les responsables politiques de disposer d'un outil fiable de mesure des prix, il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles démarches elle compte engager pour s'assurer que le nouveau mode de calcul de l'indice des prix respectera les critères déontologiques et scientifiques nécessaires à son objectivité.

Réponse émise le 23 août 2011

L'élaboration de l'indice des prix à la consommation (IPC) est une opération de grande ampleur pour l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Celui-ci réalise chaque mois environ 180 000 relevés de prix dans 27 000 points de vente. Ces relevés sont complétés par une collecte de données professionnelles auprès des opérateurs ou régulateurs nationaux (EDF, GDF, SNCF pour le transport ferroviaire, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes pour la téléphonie mobile, direction générale de l'aviation civile pour le transport aérien), auprès des fédérations professionnelles (Fédération française bancaire) ou d'organismes privés de collecte (remontées de prix des classes thérapeutiques de médicaments couvrant 60 % des pharmacies). Pour calculer l'indice des prix à la consommation, l'INSEE a donc, d'ores et déjà, recours à de nombreuses bases de données professionnelles. Si le nombre de prix relevés, tous produits confondus, peut sembler important, en revanche, il est relativement limité pour un produit élémentaire du fait de la grande diversité des biens et services consommés par les ménages français. Ainsi, pour un produit élémentaire (comme la baguette de pain, l'huile d'olive, le camembert), le nombre moyen de relevés effectués en métropole est de l'ordre de 140 par mois. Compte tenu de la diversification des formes de vente au cours des vingt dernières années (développement du hard discount, des supérettes de centre-ville...) et de la segmentation croissante de l'offre de produits (séparation entre marques nationales, marques de distributeurs et premiers prix, développement des produits bio ou issus du commerce équitable, développement des gammes de produits discount, apparition de produits hallal...), cet échantillon, qui doit également prendre en compte les disparités de prix entre les différentes agglomérations de collecte, risque à terme de peiner à refléter l'ensemble des tendances du marché et la diversité croissante de la consommation des ménages français. Il n'est pas envisagé d'augmenter le nombre de relevés de prix effectués par les enquêteurs, et ce d'autant plus qu'une telle démarche risquerait de conduire à une sollicitation excessive des points de vente du fait de l'accroissement du nombre de visites que cela induirait. Dans le même temps, les grandes enseignes de la distribution enregistrent, de façon exhaustive et précise, l'ensemble des articles passant à la caisse de leurs magasins. Elles transmettent chaque jour ces données à plusieurs opérateurs, notamment deux sociétés d'études de marché. Ces informations, qui sont bien sûr utilisées par les enseignes elles-mêmes (gestion de stock en temps réel, suivi du marché...), sont également mobilisées par des entreprises spécialisées dans le marketing et les études de marché. Ces données professionnelles contiennent les prix effectivement pratiqués en caisse et affichés dans les rayons. Elles concernent tous les produits effectivement vendus au cours de la journée dans leurs magasins et comportent les informations suivantes : l'identification du magasin, le code-barres du produit ainsi quelques variables descriptives de celui-ci, le prix, le nombre d'articles vendus ou la valeur des ventes. Les nouveaux besoins évoqués plus haut, ainsi que les potentialités offertes par une source d'information très riche sur les prix, ont donc conduit l'INSEE à lancer un projet d'exploitation des données de caisse des enseignes de la distribution : d'une part, l'utilisation des « données de caisse » améliorerait la précision de l'indice des prix à la consommation grâce à l'augmentation du nombre de séries suivies (au minimum un décuplement), tout en modernisant les processus de collecte et en renforçant leur fiabilité ; d'autre part, les données de caisse permettraient, à terme, de répondre à des nouvelles demandes adressées à l'INSEE : mise en place d'indices de prix moyen (préconisation du rapport du Conseil d'analyse économique sur la mesure du pouvoir d'achat), comparaisons spatiales de prix, tableau de bord du grand marché intérieur (comparaison des niveaux de prix entre pays européens), suivi de certains segments de marché particuliers (produits écolabellisés notamment). Par ailleurs, des innovations se développent à l'étranger (Google Price Index, Billion Price Index du MIT) à partir des données de prix figurant sur Internet qui pourraient, à terme, déclasser les indices de prix fondés sur une collecte classique. En outre, le projet offrirait une base de données à partir de laquelle des travaux de recherche sur de nouveaux indicateurs de prix pourraient se développer. Sur le plan européen, l'office statistique de la Commission (Eurostat) a manifesté son intérêt pour cette source de données pour les statistiques de prix. À l'heure actuelle, trois pays européens utilisent les données de caisse en production de l'indice des prix : la Suisse, les Pays-Bas et la Norvège. Ces données sont fournies par les enseignes de la grande distribution sur une base volontaire, dans le cadre de partenariats mis en place avec les instituts statistiques nationaux suisse, néerlandais et norvégien. Bien que les méthodologies employées diffèrent suivant les pays, il apparaît dans tous les cas que l'utilisation des données de caisses a conduit à une amélioration sensible des processus de production et de la qualité des indices produits. Aujourd'hui, le projet de l'INSEE entre dans une phase expérimentale qui courra au moins jusqu'en 2014. À cette date, l'INSEE pourrait alors décider du passage en production (début 2015 dans le scénario le plus rapide). Une telle décision nécessite la mise en place de dispositifs visant à garantir l'indépendance du calcul de l'indice des prix à la consommation et la sécurité juridique d'approvisionnement en données de caisse, de façon à assurer la pérennité de la production future. L'INSEE réfléchit notamment à l'instauration d'une obligation légale de transmission des données de caisse pour les grandes enseignes de la distribution et à la mise en place d'une enquête de contrôle de la qualité des données de caisse. Cette enquête serait fondée sur des relevés de prix réalisés par les enquêteurs de l'INSEE dans les magasins qui seraient ensuite rapprochés des prix figurant dans les données de caisse.

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